Ingeburge de Danemark (vers 1175-1236) : sa nuit de noces avec Philippe Auguste fait trembler le royaume de France

Le roi Philippe n’a pas tout à fait vingt-huit ans et est veuf depuis trois ans quand il négocie, en 1193, ce qui paraît être une belle opération diplomatique : son mariage avec la sœur du roi Knut VI du Danemark.

L’alliance est très intéressante car le royaume scandinave est un allié de choix pour la France contre l’Angleterre de Richard Cœur de Lion, en raison notamment de son importante puissance maritime. De plus, Philippe Auguste doit assurer la pérennité de sa dynastie. De son premier mariage avec Isabelle de Hainaut, il ne lui est resté qu’un fils.

Le mariage est célébré à Amiens
On attend donc de la princesse danoise qu’elle donne le plus vite possible naissance à d’autres fils. La jeune Ingeburge a dix-neuf ans et elle semble pleine de qualités, parmi lesquelles sa beauté renversante fait l’unanimité. Au mois d’août, elle est conduite du Danemark à Amiens. C’est dans cette ville en fête, pleine de décorations et d’une foule joyeuse que l’on célèbre le mariage royal.

Ingeburge de Danemark. Gravure extraite de Histoire de France depuis Faramond
jusqu’au règne de Louis le Juste. Enrichie, de plusieurs belles et rares antiquitez,
et de la vie des reynes, etc. par François Eudes de Mézeray (édition de 1685)

Au petit matin, au lendemain de la nuit de noces, on prépare Philippe pour le troisième sacre de son existence. Ingeburge, de son côté, enfile une longue robe de soie lamée d’argent. Mais l’un et l’autre sont très pâles et le roi paraît étrangement tendu et préoccupé.

Philippe Auguste veut renvoyer son épouse au Danemark
Pendant le sacre, sa fébrilité est remarquée par bon nombre d’invités. Au moment où le prélat s’apprête à lui faire les onctions, Philippe est même pris de véritables tremblements. Une sueur froide inonde son visage, ses mains s’agitent, ses yeux se révulsent et sa pâleur s’accentue. Il regarde Ingeburge avec une sorte de terreur.

Philippe Auguste. Gravure extraite de Histoire de France depuis Faramond
jusqu’au règne de Louis le Juste. Enrichie, de plusieurs belles et rares antiquitez,
et de la vie des reynes, etc. par François Eudes de Mézeray (édition de 1685)

Les courtisans, qui s’interrogent sur l’étrange état du roi, ne sont pas au bout de leurs surprises. Après le sacre, le roi toujours très troublé fait part d’une incroyable décision. Il souhaite faire reconduire Ingeburge vers sa terre natale au plus vite. Mais même un roi de France ne peut effacer les sacrements du mariage : Ingeburge est la reine de France légitime.

C’est un drame obscur qu’il faudra alors essayer de comprendre, qui se noue autour de la nuit de noces des époux. Une nuit dont on ne saura jamais rien, mais qui est en train de devenir une affaire d’État.

Franck Ferrand
Radio Classique
Accédez à l’article source