Exposition Voyages en France

À travers ces fragiles traits de plume ou ces vigoureux coups de pinceaux s’expriment des artistes témoins de l’explosion créatrice qui jaillit à la Cour de France à cette époque. L’exposition évoque également le voyage et les différents types de voyageurs, du marchand au pèlerin, du prince à l’artiste.

Découverte et rencontre, absence et épreuve, le voyage est à la fois une initiation et une affirmation : il réunit les mythes et les rêves, les promesses et les projets. Il nourrit l’imaginaire et sert à son tour à exprimer les passions, même quand elles sont déçues. Les devises contre Madame de Monglas en apportent une illustration vengeresse : en représentant sa maîtresse en sirène, Bussy affirme qu’il ne l’écoutera plus chanter pour le détourner de son chemin.

Château de Bussy-Rabutin (Côte-d’Or)

Le voyage est aussi un art, transmutant des échecs en réussite littéraire comme l’illustre parfaitement Le Roman comique, c’est pourquoi il devient une invitation poétique à « Aimer à loisir, Aimer et mourir, Au pays qui te ressemble ! »

Chaque époque le formule à sa manière et pour tous les âges, au point que l’on peut voir dans Jules Verne un précurseur de la science-fiction et dans l’Arioste — poète italien de la Renaissance (1474-1533) — celui de la fantasy. Les voyages nourrissent l’imaginaire collectif et engendrent des œuvres qui suscitent de nouveaux départs, puis de nouveaux récits.

Roger de Rabutin est un grand voyageur. Pour ses campagnes, au gré des guerres, il se déplace aux frontières du pays, va en Italie, en Catalogne, dans les Flandres. Plus près de nous, les derniers propriétaires du château, les comtes de Sarcus, sont également des voyageurs : l’exposition montre le carnet de voyages de César de Sarcus, avec ses nombreux dessins de monuments et de costumes régionaux.

Les premières représentations des itinéraires à travers le territoire décrivent les routes empruntées par les porteurs de courrier. En effet, tout un réseau de relais-poste s’établit afin de pourvoir à leur besoin. Ils y trouvaient un gîte et des chevaux frais s’ils devaient continuer leur chemin sans attendre. Très rapidement, d’autres voyageurs profitent de ces relais même si, à la fin du XVI^e siècle, les parcours qui se dessinent à travers la France ne suivent pas toujours des chemins carrossables, certains chemins restant trop étroits voire dangereux pour ce type de véhicule.

La France étant un royaume dont les frontières évoluent selon les succès ou les échecs des campagnes militaires, les cartographes représentent un territoire dont les limites reproduisent plus ou moins celles créées par les éléments naturels (mers, fleuves, montagnes). Ainsi se dessine un réseau de circulation qui reflète la topographie des lieux et des régions. L’arborescence des chemins royaux part de Paris vers les capitales des provinces en tissant un premier réseau de circulation.

Les itinéraires suivent les grands fleuves La Seine, la Loire, le Rhône et leurs affluents et conduisent vers les capitales des Provinces : Rouen, Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux... Le réseau des routes se densifie peu à peu, et les cartes deviennent plus précises.

Au tout début du XVII^e siècle, le Guide des chemins de France de Charles Estienne devient le premier guide de voyage français : il est publié de 1552 à 1658 et propose une liste de lieux avec quelques détails sur les « curiosités » à voir. Très vite des Itinéraires de France sont à leur tour publiés et apportent des informations plus complètes. Dans ces ouvrages, on cherche à instruire et à conseiller le voyageur, ce dernier n’étant plus supposé aller simplement d’un lieu à l’autre, mais invité à faire quelques haltes pour découvrir des curiosités. Les guides de voyages brossent ainsi indirectement le portrait du voyageur : cultivé, amateur d’églises, de monuments et de belles demeures et doté d’un esprit curieux.

Le véhicule privilégié pour voyager est jusqu’au XIX^e siècle le carrosse, le voyage par voie fluviale restant relativement anecdotique. L’amélioration des routes au XVIII^e siècle, ainsi que l’arrivée des suspensions pour les roues des calèches qui absorbent un peu les cahots apportent un peu plus de confort du voyageur. Cependant ces progrès restent très relatifs. Au XIX^e siècle, l’on s’amuse encore de la promiscuité qu’imposent les diligences comme de la variété des corpulences des voyageurs. Cependant les voyageurs craignent plus d’autres dangers.

Apollon et les muses. Peinture de Nicolas Bertin (1667-1736)

En effet, ces derniers traversent souvent un pays en guerre, et craignent d’être rançonnés par des soldats laissés sans solde. Les accidents sont également une crainte partagée par de nombreux voyageurs : la diligence peut très facilement se renverser dans un fossé suite à un cahot ou se retrouver bloquée dans une ornière. Sans compter l’intrépidité de certains cochers qui roulent à trop grande vitesse : ainsi, Roger de Bussy-Rabutin doit venir en aide à sa cousine, Madame de Sévigné lorsque le carrosse de cette dernière se renverse à quelques lieux du château de Bussy-Rabutin car son cocher a pris à trop grande vitesse les virages de la route de Lucenay !

Tous ses péripéties ne freinent cependant pas l’attrait qu’exerce le voyage : si jusqu’à l’époque du comte de Roger de Bussy-Rabutin, on voyage plutôt par nécessité (pour rendre visite à de la famille ou des amis, pour effectuer un pèlerinage ou pour se rendre sur le champ de guerre), à partir du milieu du XVIII^e siècle, un nouveau type de voyageur apparaît : l’artiste-archéologue. Amoureux d’histoire et d’art, il parcoure la France avec ses carnets de croquis ; il marche à la découverte des châteaux isolés, des églises de village, goûtant en chemin le pittoresque d’un paysage, la beauté d’un panorama.

Ainsi apparaît Le Grand Tour : voyage à visée éducative réalisé par les jeunes gens issus d’une élite sociale et intellectuelle. Très vite des collectionneurs d’art, des artistes peintres et des écrivains leur emboîtent le pas et visitent la France, l’Italie, l’Allemagne, et la Suisse. Munis de catalogues, ils inventorient et décrivent les lieux incontournables : cathédrale, hôtel de ville, monuments, édifices militaires et bien sûr paysages.

Renseignements pratiques
Exposition Voyages en France
Château de Bussy-Rabutin — 12 rue du Château — 21150 Bussy-le-Grand
Jusqu’au 7 septembre 2025
Site Internet : https://www.chateau-bussy-rabutin.fr
Page Facebook : https://www.facebook.com/ChateaudeBussyRabutin/