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26 juin 1599 : arrêt du Parlement contre les duels

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26 juin 1599 : arrêt du
Parlement contre les duels
(D’après « Essai sur le duel » (par le Comte de Chatauvillard), paru en 1836
et « Histoire des duels anciens et modernes » (Tome 1), paru en 1835)
Publié / Mis à jour le lundi 26 juin 2023, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 4 mn
 
 
 
Après les guerres civiles qui désolèrent la France vers la fin du XVIe siècle, les duels devinrent si communs que le parlement de Paris, usant de ses prérogatives, rendit un arrêt en forme de règlement dont on ne peut trop admirer la sagesse, et le premier d’une série d’édits prévoyant des peines sévères pour les contrevenants

En 1599, un procès fut instruit au parlement de Paris contre deux duellistes, et le 26 juin suivant intervint un arrêt de règlement ainsi conçu :

« La Cour procédant au jugement du procès criminel fait à Hector Durandi et Barthélemy Jully, mémorative de plusieurs procès criminels jugés en icelle pour raison des meurtres et homicides commis et perpétrés en duel, tant en cette ville de Paris, qu’autres lieux et endroits de ce ressort, pour obvier à la fréquence desdits meurtres et homicides, qui se commettent ordinairement par ceux qui prétendent être outragés et tellement intéressés en l’honneur, de paroles, ou de fait, qu’ils s’estimeraient indignes de toutes charges publiques et honorables, desquelles ils se sont rendus capables, s’ils n’avaient tenté les moyens de venger leurs querelles par combats en duel, contrevenant aux commandements de Dieu, n’étant loisible par les lois divines ni humaines, rechercher ni poursuivre aucune vengeance que par les voies ordinaires de la justice : ouï sur ce le procureur général du roi.

Duel judiciaire du 20 mai 1455 sur la place du Grand Marché de Valenciennes

Duel judiciaire du 20 mai 1455 sur la place du Grand Marché de Valenciennes

« Ladite Cour a fait inhibitions et défenses à tous sujets du roi, de quelque qualité et condition qu’ils soient, prendre de leur autorité privée par duels la réparation des injures et outrages qu’ils prétendent avoir reçus ; ains [mais, en vieux français] leur enjoint se pourvoir par-devant les juges ordinaires, sur peine de crime de lèse-majesté, confiscation de corps et de biens tant contre les vivants que les morts : ensemble contre tous gentilshommes et autres qui auront appelé et favorisé lesdits combats, assisté aux assemblées faites à l’occasion desdites querelles, comme transgresseurs des commandements de Dieu, rebelles au roi, infracteurs des ordonnances, violateurs de la justice, perturbateurs du repos et tranquillité publique.

« Enjoint ladite Cour à tous gouverneurs de provinces, baillis, sénéchaux, prévôts des maréchaux, vice-baillis et vice-sénéchaux, et autres officiers dudit seigneur ; empêcher lesdits duels, se saisir de ceux qui se trouveront aux assemblées, informer des causes et occasions d’icelles ; et aux substituts du procureur général desdits bailliages et sénéchaussées ; faire diligences qu’il soit procédé à leur requête contre eux comme criminels de lèse-majesté ; envoyer au greffe de la Cour les procès-verbaux et informations sur ce faites.

« Sera le présent arrêt lu et publié à son de trompe et cri public par les carrefours de cette ville de Paris, et faubourgs d’icelle, et envoyé aux bailliages et sénéchaussées de ce ressort, pour y être lu et publié. Enjoint aux substituts dudit procureur général faire procéder à ladite publication, informer des contraventions, et certifier la Cour de leurs diligences au mois.

« Fait en Parlement, et lu en l’audience de la Tournelle, le vingt-sixième jour de juin mil cinq cent nonante-neuf, et publié par les carrefours de cette ville et faubourgs le troisième juillet suivant. »

Cet arrêt fut bientôt suivi d’un édit du roi Henri IV, du mois d’avril 1602, qui confirma ces prohibitions et ordonna à la partie offensée d’adresser sa plainte au gouverneur de la province, pour être soumise au jugement des connétables et maréchaux de France. Ce fut là l’origine de la juridiction du point d’honneur, dont on trouve les premières traces dans l’édit de Charles IX, du 10 février 1566. Mais elle ne reçut une organisation définitive que sous Louis XIV.

L’édit de 1602 fut renouvelé par un autre du mois de juin 1609, précédé comme le premier d’un long préambule, et contenant un grand nombre de dispositions assez sagement concertées ; mais auxquelles ne manqua qu’une seule chose : l’exécution. On remarque dans ce préambule le passage suivant : « Davantage plusieurs aussi malins que téméraires, très mal informés du vrai jugement que nus faisons de semblables actions, s’y engagent et précipitent de propos délibéré, au péril de leurs âmes comme de leurs personnes, etc. » Les articles 5 et 6 de l’édit laissaient aux parties offensées la faculté de s’adresser au roi directement, ou par l’entremise des maréchaux de France, pour en obtenir le combat, quand le différend ne pourrait se terminer autrement.

L’article 9 portait même que « celui qui demanderait le combat et serait jugé non recevable, pour s’être offensé trop légèrement, serait renvoyé avec honte. » Mais, comme l’a remarqué d’Audiguier, il n’y eut, sous le règne de Henri IV, aucun exemple d’une semblable autorisation. « Ne l’ayant, dit cet auteur, accordé à personne et l’ayant même refusé à plusieurs, il donna sujet de croire qu’il n’en octroierait point du tout, et que ceux qui le demanderaient, auraient plus d’envie de s’accorder que de se battre ; ce qui fit qu’on aimât mieux se passer de permission ».

Ces édits contre les duels furent portés à la sollicitation de Sully, qui s’était sérieusement occupé de ce sujet, ainsi qu’on en peut juger par plusieurs passages remarquables de ses Mémoires : « Il est vrai, dit-il, que les duels sont fort anciens, mais seulement dans cette partie de l’Europe où l’inondation des barbares qui sert d’époque à cette odieuse coutume, prouve en même temps leur méprisable source. (...) Le roi, je suis fâché de le dire, tenait si mal la main aux édits que quelques-uns de ses prédécesseurs avaient déjà donnés contre cet usage barbare, qu’on voyait tous les jours répandre beaucoup de sang pour des sujets très légers. (...) La facilité du roi à pardonner les duels, dit-il encore, les multiplia tellement, que ces funestes exemples perdirent la cour, la ville et tout le royaume. »

L’empire du préjugé était si puissant alors, que ce sage ministre fut en quelque sorte forcé lui-même de lui payer tribut. Il raconte fort ingénument, à la fin du livre Premier de ses Mémoires, comment il fut sur le point de se brouiller sérieusement avec Henri IV, « pour avoir eu l’imprudence de consentir à être le témoin d’un duel. » Il y eut pour cela de gros mots entre le roi et lui. Henri IV alla même jusqu’à le menacer « de lui faire couper la tête pour s’être avisé, disait-il, de trancher ainsi du souverain jusques dans sa cour. » L’affaire heureusement fut arrangée par l’intervention des princesses.

Henri IV, d'après la peinture de Frans Pourbus le jeune (1569-1622)

Henri IV, d’après la peinture de Frans Pourbus le jeune (1569-1622)

Du reste, dans les deux édits de Henri IV (1602 et 1609), comme dans l’arrêt du parlement qui leur avait servi de base (26 juin 1599), le but a été dépassé. Aussi ne fut-il pas atteint. La sévérité des peines rendit toutes les défenses illusoires. Cette faute se perpétua dans toutes les lois subséquentes, et en neutralisa toujours l’effet. Sully n’avait pourtant pas, même sur ce sujet, épargné les représentations à son maître.

Mais elles furent perdues pour Henri IV comme pour ses successeurs. « De tous ces différents édits, disait ce grand homme d’état, aucun ne fit tant de bruit que celui qui fut donné contre les duels. Le roi s’y porta jusqu’à ordonner la peine de mort contre les coupables ; en quoi il ne suivit pas mon avis. J’ai assez donné à connaître ce que je pense de ce cruel et barbare abus, pour n’être pas accusé d’avoir cherché à le tolérer. C’est que je prévoyais au contraire que l’excès de sévérité dans les moyens, serait cela même d’où naîtrait le principal obstacle à l’exécution. (...) Souvent les peines qui font le plus d’impression, sont celles pour lesquelles on n’ose ou l’on ne peut demander grâce. »

« Il est sûr, ajoute-t-il encore, qu’une réputation décidée sur le chapitre de la valeur personnelle, était capable de donner aux ordres de Henri IV contre les duels, le double de l’autorité attachée à la volonté des rois ; mais celle du maître des rois supérieure à la leur, n’avait pas réservé cet abus à extirper au règne de Henri le Grand. » (Mémoires de Sully, livre XIII et XXII).

Le temps n’était pas encore venu. Les mœurs étaient toujours plus puissantes que les lois : la redoutable main de Richelieu lui-même ne suffit pas à cette tâche difficile. En effet, plusieurs édits de Louis XIII, datés de 1611 jusqu’en 1634, ne purent rien contre cette fureur. Louis XIV renouvela ces défenses, par une foule d’édits de 1643 à 1679, et régla les formes de la procédure contre les duellistes.

Ces arrêts produisirent eux aussi peu d’effet ; cependant, le dernier portant des peines plus sévères contint pour un temps les suites de cette habitude féodale qui, bientôt, après la mort du roi, reprit son cours avec plus de fureur que jamais. Louis XV, à son sacre, fit serment de n’exempter personne de la rigueur des peines ordonnées contre les duels. De nos jours, le duel n’étant pas reconnu par nos lois, elles le jugent comme si c’était une rixe, et le punissent comme un assassinat.

 
 
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