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Histoire du costume, costumes anciens : toilette des élégantes du XVIIIe siècle. Femmes : coiffure, souliers, mouches

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Mode, Costumes
Variations des costumes depuis les Gaulois jusqu’au XIXe siècle. Histoire du costume, vêtement, coiffures, chaussures. Mode vestimentaire
Toilette des élégantes du XVIIIe siècle :
renouveau des coiffures, souliers et mouches
(D’après « Mode et beauté », paru en 1901)
Publié / Mis à jour le jeudi 7 janvier 2016, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 4 mn
 
 
 
Mouches, souliers souples en maroquin de couleurs tranchantes, et surtout coiffures changeant de mode plus souvent encore que les chaussures, aux formes surprenantes, aux proportions démesurées et à la composition bigarrée : tels étaient les atours dont se paraient les femmes du monde au XVIIIe siècle, le temps passé pour élaborer quotidiennement leur parure du jour rivalisant avec celui de la toilette de nuit.

Le XVIIIe siècle fut le siècle du luxe non seulement en France, mais dans presque toute l’Europe et en Angleterre notamment où les artifices de la toilette avaient pris un tel développement que le grave Parlement anglais rendit le singulier arrêt suivant :

« Toute femme de tout âge, de tout rang, de toute profession ou condition, vierge, fille ou veuve, qui, à dater du dit acte, trompera, séduira ou entraînera au mariage quelqu’un des sujets de Sa Majesté, à l’aide de parfums, faux cheveux, crépon d’Espagne (sorte d’étoffe de laine imprégnée de carmin et encore employée aujourd’hui comme rouge sous le nom de fard en crépon) et autres cosmétique, buses d’acier, paniers, souliers à talons et fausses anches, encourra les peines établies par la loi actuellement en vigueur contre la sorcellerie et autres manœuvres ; et le mariage sera déclaré nul et de nul effet. »

Caricature sur la mode au XVIIIe siècle

Caricature sur la mode au XVIIIe siècle

Les législateurs français n’eurent pas le mauvais goût de se montrer aussi barbares et cependant quel luxe et quels artifices de toilette chez les femmes du XVIIIe siècle. Un écrivain de l’époque, Dufresny, comparait les femmes à des oiseaux amusants qui changent de plumage deux ou trois fois par jour. Il ne disait pas assez. Au XVIIIe siècle, une femme à la mode essayait tous les jours quatre ou cinq espèces de toilette : toilette du matin, ou négligé galant, toilette pour la promenade, toilette pour le spectacle, toilette pour le souper, toilette de nuit, et cette dernière toilette n’était pas la moins riche, ni la moins compliquée.

L’invention la plus étrange que la mode ait jamais imaginée, dit le bibliophile Jacob, celle des mouches, fut remise en faveur avec une telle exagération que le visage des femmes, suivant l’expression d’un critique de mauvaise humeur, rassemblait tous les signes du zodiaque. Les mouches de taffetas noir gommé, en effet, étaient taillées en lune, en soleil, en croissant, en étoile et en comète. Elles avaient existé à la cour de Louis XIV pour faire ressortir la blancheur de la peau, mais on n’en faisait pas abus et même les femmes brunes de teint se gardaient bien d’en mettre.

On n’en portait presque plus quand la duchesse du Maine leur rendit la vogue ; ce fut alors, pour ainsi dire, le cachet d’une belle peau et l’accessoire indispensable du jeu de la physionomie. Il y avait un art particulier pour placer ces mouches aux endroits les plus favorables du visage : sur les tempes, près des yeux, au coin de la bouche, au front. Une femme du grand monde en avait toujours sept ou huit et ne sortait jamais sans emporter sa boîte à mouches pour remplacer celles qui viendraient à se détacher et pour en ajouter de nouvelles selon la circonstance. Chacune de ces mouches avait un nom caractéristique : au coin de l’œil, la passionnée ; au milieu de la joue, la galante ; sur le nez, l’effrontée ; près des lèvres, la coquette ; sur un bouton la receleuse.

Qui nous rendra ce piquant artifice des mouches ! Qui sait tout le charme imprévu que ce petit ornement peut donner à la physionomie d’une femme. Revenir aux mouches serait, assurément moins ridicule et infiniment plus gracieux que le retour aux paniers, sous le nom de crinolines.

Le XVIIIe siècle donna surtout un merveilleux essor à deux industries de toilette qui furent considérées comme des arts véritables : la chaussure et la coiffure. Le cordonnier pour femmes était devenu presque un artiste qui fabriquait des souliers si mignons et si souples, en cuir mordoré, en maroquin de couleurs tranchantes et surtout en étoffes d’or et d’argent et toujours à talons pointus rehaussés de trois ou quatre ponces, que la chaussure formait une des pièces les plus raffinées de l’habillement.

Coiffure à la Belle Poule

Coiffure à la Belle Poule

Le prix de ces souliers de grand luxe, fermés par des boucles d’or ou d’acier à facettes, égalait celui des bijoux. Le roi des cordonniers d’alors, grâce à la protection de la célèbre Mme du Barry, était un Allemand nommé Efftein, auquel succéda un Français nommé Bourbon.

Les coiffures changeaient de mode plus souvent encore que les chaussures, et le nombre des coiffeurs de dames n’avait pas cessé de s’augmenter depuis la Régence, tellement qu’on n’en comptait pas moins de douze cents à Paris, quand la communauté des perruquiers leur intenta un procès, en 1769, comme à des faux frères et à des concurrents déloyaux. Les coiffeurs de dames firent une belle défense ; leur avocat publia un mémoire tout à fait piquant où il rabaissait les prétentions des maîtres barbiers-perruquiers : « L’art du coiffeur des dames, disait-il, est un art qui tient au génie et, par conséquent, un art libéral et libre. L’arrangement des cheveux et des boucles ne remplit même pas tout notre objet. Nous avons sans cesse sous nos doigts les trésors de Golconde ; c’est à nous qu’appartient la disposition des diamants, des croissants, des sultanes, des aigrettes. »

Au portrait du coiffeur des dames, le factum opposait le portrait caricaturé du perruquier : « Le perruquier travaille avec les cheveux, le coiffeur sur les cheveux. Le perruquier fait des ouvrages de cheveux, tels que des perruques, des boucles ; le coiffeur ne fait que maniérer les naturels, leur donner une modification élégante et agréable. Le perruquier est un marchand qui vend la matière et son ouvrage ; le coiffeur ne vend que ses services. »

Les coiffeurs l’emportèrent et les perruquiers perdirent leur procès. On vit alors le coiffeur Legros instituer une Académie de coiffure et publier un gros livre à figures intitulé : l’Art de la coiffure des dames françaises. Un autre coiffeur, Léonard, le rival de Legros, imagina de remplacer le bonnet qui couronnait la coiffure des dames par des gazes et des chiffons artistement distribués dans les cheveux : il parvint ainsi à employer dans une seule coiffure quatorze aunes de gaze.

Ce fut Léonard qui créa les coiffures extraordinaires et magnifiques que la mode imposa pendant plus de dix ans à toutes les têtes : la coiffure à la dauphine dans laquelle les cheveux étaient relevés et roulés en boucles qui descendaient sur le cou ; la coiffure à la monte-au-ciel, remarquable par son élévation pyramidale ; la coiffure loge d’opéra qui donnait à la figure d’une femme soixante-douze pouces de hauteur depuis le bas du menton, jusqu’au sommet de la figure et qui divisait la chevelure en plusieurs zones, chacune ornée et agencée d’une manière différente, mais toujours avec un accompagnement de trois grandes plumes attachées au côté gauche de la tête dans un nœud de ruban rose chargé d’un gros rubis ; la coiffure à la quesaco avec trois plumes derrière la tête ; la coiffure en pouf c’est-à-dire n’ayant pas d’autre ordre que la confusion d’objets divers, plumes, bijoux, rubans, épingles qui entraient dans sa composition.

On accumulait, dans cette incroyable coiffure, des papillons, des oiseaux, des amours de carton peint, des branches d’arbres, des fruits et... et même des légumes ! Au mois d’avril, la duchesse de Chartres, fille du duc de Penthièvre, parut à l’opéra, coiffée d’un pouf à sentiment, sur lequel on voyait le duc de Beaujolais, son fils aîné, dans les bras de sa nourrice, un perroquet becquetant une cerise, un petit homme noir de peau, et des dessins à chiffres en cheveux, composés avec les cheveux mêmes des ducs d’Orléans, de Chartres et de Penthièvre.

Que d’autres coiffures non moins extraordinaires nous pourrions citer : les coiffures au temps présent, bonnets enjolivés d’épis de blé et surmontés de deux cornes d’abondance ; les coiffures au Colisée, à la Sylphide, au Hérisson, au Parterre galant, à la Belle-Poule, avec une vraie frégate sur la tête. « Les coiffures parvinrent à un tel degré de hauteur, dit Mme Campan, par l’échafaudage des gazes, des fleurs et des plumes, que les femmes ne trouvaient plus de voilures assez élevées pour s’y placer et qu’on leur voyait souvent pencher la tête à la portière. D’autres prirent le parti de s’agenouiller pour ménager d’une manière encore plus sûre le ridicule édifice dont elles étaient surchargées. »

Caricature sur la mode en 1775

Caricature sur la mode en 1775

La toilette d’une jolie femme était une espèce de réception intime dans le sanctuaire où s’élaborait la coiffure, la déesse du lieu recevait son petit monde d’habitués, vêtue d’un simple peignoir de mousseline brodée et les cheveux épars, lorsqu’elle se mettait dans les mains du coiffeur, qui passait une heure et davantage à l’accommoder. Si la toilette avait duré longtemps, dans la matinée et dans l’après-midi, la toilette de nuit était presque aussi longue que celle de jour, quoique personne n’y fût admis. C’est qu’il s’agissait de défaire tout l’attirail de la coiffure, de peigner et de dépoudrer les cheveux ; il s’agissait aussi de tenir conseil avec la femme de chambre pour savoir comment on s’habillerait le lendemain.

 
 
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