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Légendes, croyances, superstitions : moines rouges, Templiers de Haute Bretagne

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Légendes, Superstitions
Légendes, superstitions, croyances populaires, rites singuliers, faits insolites et mystérieux, récits légendaires émaillant l’Histoire de France
Moines rouges,
Templiers de Haute Bretagne
(D’après « Légendes locales de la Haute-Bretagne » paru en 1899)
Publié / Mis à jour le mercredi 27 janvier 2010, par LA RÉDACTION
 
 
Temps de lecture estimé : 5 mn
 

En Haute-Bretagne, le nom de « moines rouges » s’applique en général aux Templiers ; cette couleur n’était pas celle du costume de ces religieux militaires, qui était blanc avec une croix rouge sur la poitrine, mais c’est celle dont les récits populaires affublent assez souvent le diable, et elle indique les accointances qu’on leur attribue avec l’esprit des ténèbres. Elle n’est pas, du reste, l’apanage exclusif des chevaliers du Temple : les moines rouges sont ceux, quel que soit leur ordre, qui ont laissé de mauvais souvenirs.

Vestiges de la tour octogone de Montbran

Vestiges de la tour
octogone de Montbran

Pour les Templiers, la tradition les représente comme de grands bâtisseurs ; elle leur rapporte l’origine de beaucoup de monuments. Ils avaient construit la tour octogone de Montbran en Pléboulle, une église à La Baussaine, des chapelles à Radenac, à Ferel, à Avessac ; à Saint-Aubin-des-Châteaux, des ruines s’appellent la Prison des Templiers. La chapelle du Temple en Pléboulle, qui est fort ancienne, est située dans un bas, au bord du ruisseau ; elle passe pour avoir appartenu aux Templiers ; la tour octogone de Montbran est du XIe ou XIIe siècle ; sur un tertre voisin se tenait au mois de septembre une foire très ancienne jadis importante. Le château de la Roche-Gouyon est appelé aujourd’hui le Fort La Latte, et les Gouyon de Matignon en furent les possesseurs jusqu’à la fin du XVIIe siècle.

Le Répertoire archéologique du Morbihan cite beaucoup d’autres constructions attribuées au Templiers dans le pays bretonnant. Les nombreux châteaux qu’ils possédaient aux environs de Moncontour, s’effondrèrent tous en une nuit ; à Yffiniac, un couvent appelé Sainte-Barbe, habité par les moines rouges, et dont on voit encore les ruines, fut entièrement détruit en une nuit ; à La Baussaine, les Templiers furent aussi exterminés de la même manière. Ces trois légendes, recueillies sur des points assez éloignés les uns des autres, semblent une traduction populaire d’un fait historique : les chevaliers du Temple furent en effet arrêtés le même jour par ordre de Philippe le Bel.

Comme beaucoup d’autres personnages dont la vie fut, affirme-t-on, souillée par des crimes, ils ne peuvent trouver de repos, même après leur mort. Dans quelques cantons, le peuple croit encore voir errer la nuit les Templiers ou Moines rouges, montés sur des squelettes de chevaux recouverts de draps mortuaires. Ils poursuivaient, dit-on, les voyageurs, s’attaquant de préférence aux jeunes gens et aux jeunes filles qu’ils enlevaient et conduisaient Dieu sait où, car ils ne les ramenaient point. Ils figurent dans plusieurs légendes d’Avessac. Sur l’un de ses coteaux les plus élevés, se dressait jadis l’antique chapelle de Trioubry, qui fut, dit la tradition, d’abord un oratoire bâti par des Templiers. Les gens du pays qui vont en pèlerinage aux ruines de la chapelle, n’osent guère s’y aventurer sans armes.

Un habitant du village voisin de Rambalay racontait qu’un soir, naguère, il s’était pour se préserver du vent, abrité dans les ruines de la chapelle. A peine entré, il la vit illuminée de toutes parts, remplie bientôt de squelettes, et un grand moine, tout vêtu de rouge, se mit à courir après lui en poussant des cris. L’homme se précipita hors du sanctuaire, mais s’étant retourné après quelques centaines de mètres, il vit le moine rouge revenir sur ses pas et disparaître sous les pierres du coteau. On dit que ce moine rouge, ancien Templier chargé de crimes, revient tous les soirs chercher des chrétiens en état de péché mortel, pour leur faire partager ses supplices en enfer.

Les moines rouges, qui passent, à tort du reste, pour avoir habité le château du Guildo, voisin d’un ancien couvent de Carmes, viennent errer la nuit autour de ses ruines ; ils marchent péniblement, courbés sous un pesant fardeau, et de temps en temps ils poussent des gémissements. Ils sont condamnés à porter pendant toute l’éternité, en punition de leurs crimes, le poids de tout ce qu’ils ont volé. Un fermier, ayant compté ses gerbes dans un de ses champs, en trouva une centaine de plus le lendemain quand il fut pour faire une charretée ; il crut que les moines rouges lui avaient rendu une partie de ce qu’ils avaient volé jadis à ses parents.

Dans l’avenue d’un ancien manoir, à Quévert, près de Dinan, erre, surtout aux environs d’un puits, un Templier ; d’abord, il se promène à pas lents, puis il se met à parcourir l’avenue en tous sens. On dit dans le pays que le puits cache un dépôt d’argent fait au Templier, qui est mort sans avoir pu le restituer.

Chapelle du Temple de Pléboulle

Chapelle du Temple de Pléboulle

La légende qui suit semble être la seule à peindre les Templiers sous un jour favorable. Au temps jadis, les habitants de Ploubalay étaient en mauvais renom dans tout le pays d’alentour ; on dit même que les recteurs des paroisses voisines avaient adopté une sonnerie spéciale qui conseillait aux gens de faire attention à leurs bêtes et à leurs filles, parce que, comme on disait, les Ploubalay étaient dehors. Parmi eux il y en avait cinq, plus méchants que les autres, qui partirent pour Matignon, se promettant d’y rançonner les gens.

L’un d’eux pourtant n’était pas entièrement corrompu et il avait plus d’une fois soigné ceux qu’avaient blessés ses compagnons, ou restitué la part du butin qui lui revenait. Comme ils passaient par Trégon, ils rencontrèrent un chevalier monté sur une maigre haridelle, et suivi d’un seul serviteur assez pauvrement vêtu. Il leur demanda quel chemin il fallait prendre pour arriver à Saint-Jacut-de-la-Mer. Au lieu de lui répondre, les quatre coquins l’attaquèrent à l’improviste, tuèrent son valet et s’acharnèrent à le frapper lui-même jusqu’au moment où il ne donna plus signe de vie. Après avoir pris au maître et à son serviteur ce qu’ils avaient d’argent, ils continuèrent leur route, sans s’occuper du cheval qui leur paraissait de trop peu de valeur.

Le voleur compatissant resta en arrière de ses compagnons pour rendre les derniers devoirs à ceux qui venaient d’être tués. Il creusa une fosse assez profonde pour contenir deux corps, et il y déposa d’abord le cadavre du serviteur ; mais comme il soulevait le chevalier, il s’aperçut qu’il respirait encore. Il courut à une source qui se trouvait dans les bois de la Villegueury, et en rapporta un peu d’eau, à l’aide de laquelle il fit revenir le chevalier. Quand celui-ci eut repris ses sens, il remercia l’homme qui l’avait secouru, et lui conseilla d’aller rejoindre ses compagnons.

 Non, dit le voleur ; je ne vous abandonnerai pas dans l’état où vous êtes ; laissez-moi vous remettre sur votre cheval, je le tiendrai par la bride, et vous conduirai à un endroit où l’on pourra vous soigner
- Bien grand merci, répondit le chevalier, et quand il se fut soulevé à l’aide du voleur, il se mit en selle aussi aisément que s’il n’avait eu que vingt ans, et que s’il n’eût jamais été blessé.

A peine l’homme de Ploubalay, qui se nommait Jean, eut-il pris la bride du maigre coursier, qu’il se sentit soulevé de terre et comme porté, et il put sans nulle fatigue suivre le galop rapide du cheval. En arrivant à Matignon il vit ses quatre compagnons que les soldats de M. de Gouyon emmenaient à la Roche-Gouyon pour y être pendus. « Mon fils, lui dit le chevalier, si vous n’aviez pas été charitable, vous auriez eu le sort de ces malheureux : que Dieu et la Vierge vous gardent ! »

Ils traversèrent Matignon sans s’y arrêter, et arrivèrent à la chapelle du Temple de Pléboulle lorsque la nuit était déjà close depuis longtemps. Jean fut bien étonné de voir qu’elle était splendidement éclairée ; la porte s’ouvrit d’elle-même, quand son compagnon se présenta, et il le suivit. Le chevalier se prosterna sur les dalles, et, après y être resté longtemps en prières, il se releva et dit à Jean : « Je suis le grand-Maître des Templiers, les chevaliers sans peur et sans reproche ; vous m’avez sauvé la vie sans savoir qui j’étais, et Dieu m’envoyait vers vous pour vous retirer de la voie que vous suiviez ; car si jusqu’ici votre bon cœur vous avait rendu moins méchant que vos compagnons, vous auriez fini par devenir comme eux. Vous avez beaucoup à expier ; mais votre charité vous a déjà fait obtenir un peu de miséricorde.
Voulez-vous retourner dans le monde où vous vous perdriez encore peut-être, ou rester ici à jamais ? » Jean répondit qu’il resterait avec le chevalier.

Gisant de bois appelé le Tombeau du Templier dans l'église de Carentoir

Gisant de bois appelé le Tombeau du Templier
dans l’église de Carentoir

Depuis il vit dans le souterrain qui conduit de la chapelle à la vieille tour dont on voit les ruines sur le tertre de Montbran. Quelques personnes l’ont aperçu lorsque, par les nuits sombres, il quitte sa retraite ignorée des hommes pour se promener parmi eux. Sa barbe est si longue que, pour pouvoir marcher, il lui faut la relever et la mettre sur son épaule, et elle est si touffue que l’on dirait qu’il porte un sac de grains. Souvent la chapelle semble entourée d’étranges clartés ; c’est alors que les spectres des compagnons de Jean viennent le supplier de les prendre en pitié et d’intercéder pour eux.

Quelques représentations qui subsistent encore sont rattachées par le peuple à ces moines guerriers : à Carentoir on voit une statue en bois assez fruste, dite le Tombeau des Templiers ou le Saint dormant ; elle est reproduite dans la monographie de l’abbé Le Claire. A la chapelle Sainte-Catherine en Lizio, que l’on disait avoir été construite avec les débris d’un prieuré de Templiers, deux moines rouges étaient peints sur un vieux tableau.

 
 
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