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14 mai 1610 : assassinat du roi Henri IV par François Ravaillac

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Événements marquants
Evénements ayant marqué le passé et la petite ou la grande Histoire de France. Faits marquants d’autrefois.
14 mai 1610 : le roi Henri IV
est assassiné par Ravaillac
(D’après « Histoire de France depuis les origines jusqu’à
nos jours » (Tome 4) par Cléophas Dareste de La Chavanne, paru en 1866)
Publié / Mis à jour le mardi 14 mai 2024, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 4 mn
 
 
 
Sur le point de partir pour la guerre et cependant que la régence devait être assurée par son épouse Marie de Médicis sacrée la veille, le roi Henri IV est assassiné le 14 mai 1610 par François Ravaillac : présenté comme un fanatique parmi d’autres agissant sans qu’il se soit tramé un quelconque complot, le régicide est bientôt roué et écartelé, en présence d’une foule irritée qui met en pièces son cadavre

Au mois d’avril 1610, Henri IV était prêt à entrer en campagne, avec un but déterminé, mais ayant prévu toute l’extension que la guerre pouvait prendre. Il ne s’était jamais vu si fort, disposait d’une armée de trente-cinq mille hommes destinée à l’Allemagne et dont il devait prendre le commandement ; quinze mille hommes devaient se tenir prêts à entrer eu Italie sous les ordres de Lesdiguières ; il avait aussi formé le plan d’une troisième armée, destinée à entrer en Espagne sous ceux de la Force, promu au maréchalat.

Tous les commandements étaient distribués, toutes les ressources prêtes. Ses finances étaient dans un état prospère ; outre de fortes réserves dans la Bastille, il pouvait employer une plus-value certaine sur les impôts et user de toutes les voies extraordinaires que Sully avait ménagées par sa grande économie. Sully estimait les ressources disponibles à quarante-trois millions et celles qu’il pouvait se procurer à cent douze. Au moment d’entrer en lice et de jouer les armes à la main ce rôle de maître et de modérateur qu’il avait uniquement rempli jusque-là par les voies diplomatiques, Henri IV se crut assuré du succès. Il disait, en parlant de son armée : « Qu’y a-t-il au monde qui puisse résister à cela ? Que ne feraient pas deux mille gentilshommes en présence de leur roi ? Ils ébranleraient des montagnes ! »

Assassinat du roi Henri IV. Peinture de Charles-Gustave Housez (1860)

Assassinat du roi Henri IV. Peinture de Charles-Gustave Housez (1860)

Cependant il voulait toujours éviter de paraître l’agresseur et d’effrayer l’Europe. Il offrit aux archiducs de reconnaître la neutralité de la Belgique s’ils lui accordaient le passage pour ses troupes. Avant de recevoir une réponse, qui fut d’ailleurs favorable, il fixa son départ au 19 mai, confia la régence à la reine et lui nomma un conseil pour l’assister. Marie de Médicis désirait depuis longtemps être sacrée. Elle insista pour que cette cérémonie eût lieu avant le départ du roi. Le sacre fut célébré le 13 mai à Saint-Denis avec une pompe extraordinaire. Tous les auteurs du temps se complaisent à en décrire la magnificence. « Jamais, dit Richelieu, assemblée de noblesse ne fut si grande qu’en ce sacre, jamais de princes mieux parés, jamais les dames et les princesses plus riches en pierreries ; les cardinaux et les évêques en troupe honorent l’assemblée, divers concerts remplissent les oreilles et les charment ; on fait largesse de pièces d’or et d’argent avec la satisfaction de tout le monde. »

Le 17, la reine devait faire à Paris une entrée solennelle ; on travaillait dans toute la ville aux préparatifs nécessaires. Le 14, Henri IV sortit du Louvre, et monta dans son carrosse pour se rendre à l’arsenal. En passant dans la rue très étroite de la Ferronnerie, un embarras de voiture arrêta les chevaux ; les gardes s’étaient écartés. Un assassin, Ravaillac, choisit ce moment pour monter sur la roue du carrosse et donner au roi deux coups de couteau. Henri IV s’affaissa sur lui-même, perdit la parole, et fut ramené évanoui au Louvre, où il expira presque aussitôt.

La nouvelle de cet attentat, répandue avec la plus grande rapidité, causa une consternation générale. Si le roi n’avait pas réussi à imposer à la France toutes ses idées, il était personnellement aimé ; le sentiment public acceptait sa rare supériorité et rendait justice à la droiture de ses intentions. Il avait conquis à la longue une popularité du meilleur aloi. On sentait aussi qu’on devait à sa fermeté un calme et un repos rendus précieux par des souvenirs trop récents pour être oubliés. Le gouvernement était entièrement dans sa main ; lui mort, tout sembla remis en péril. On se demanda ce qui resterait de lui et d’une œuvre aussi personnelle que la sienne. Jamais peut-être le sentiment public n’éclata d’une manière plus sûre, plus unanime. Malherbe, Sully, Richelieu, Fontenay-Mareuil, l’Estoile et vingt autres témoins l’ont constaté à l’envi. Chose remarquable et que l’Estoile constate également, non sans surprise, il n’y eut de trouble et d’émotion populaire nulle part.

Le meurtrier inspira partout le même sentiment d’horreur. Ravaillac n’avait pas cherché à se sauver ; on eut peine à le soustraire à la fureur du peuple. Il importait que son procès fût instruit. On songea à un complot et on lui chercha des complices. Des bruits inévitables circulèrent ; on pensa qu’il avait pu être armé par le vieux parti ligueur dont on redoutait une résurrection, ou par l’Espagne, ou par quelque personnage de la cour. Ravaillac fut officiellement considéré comme un de ces fanatiques vulgaires que les guerres de religion avaient suscités, poursuivi de l’idée que Henri IV allait faire la guerre au Pape et que cette guerre devait être prévenue par un assassinat. Livré au bourreau, il fut roué et écartelé, en présence d’une foule irritée qui se précipita avec fureur sur son cadavre, le mit en pièces et traîna ses membres déchirés.

On ne manqua pas de citer certains pressentiments exprimés par le roi. Ces pressentiments, auxquels l’événement fit attacher une importance naturelle, n’avaient pourtant rien que de très simple, puisque Henri IV était au moment de partir pour une guerre dont il ne pouvait déterminer la durée et qu’il venait de constituer une régence pour le temps de son absence. Mais le soin qu’on mit à les recueillir prouve les dispositions où ce coup imprévu jeta les esprits et les alarmes qu’il inspira.

François Ravaillac, le couteau à la main. Estampe du XVIIe siècle de Crispin Van de Passe

François Ravaillac, le couteau à la main
Estampe du XVIIe siècle de Crispin Van de Passe

La mort de Henri IV ne produisit pas en Europe moins d’effet qu’en France. Son ascendant y avait sans cesse grandi ; sa supériorité y était partout reconnue. Il était aimé d’une partie des princes, redouté des autres, écouté et observé par tous. Le pape Paul V lui rendit un hommage public. On comprenait d’ailleurs que la scène du monde allait changer, dès que le principal acteur n’y était plus.

Sa popularité, déjà réelle de son vivant, agrandie sous Louis XIII, en déclin sous Louis XIV, refaite plus tard, mais altérée quelque peu, par Voltaire, est une des plus méritées qu’il y ait eu. Sully dit de lui qu’il fut la merveille des rois de son siècle. Il vante avec raison sa familiarité qui ne cessait pas d’inspirer le respect, sa clémence qui ne s’arrêta que devant les exigences d’État, sa valeur et son expérience au fait des armes, ce sens droit et juste, cette raison élevée, cet esprit pratique que les autres rois ont eus rarement à un tel degré, enfin ce tour heureux de langage et cette éloquence naturelle qui s’imposait à tout le monde.

Henri IV, en effet, voulait toujours convaincre ; son désir était que les peuples lui obéissent gaiement. Les étrangers admiraient comment il savait « donner pour compagnes aux armes les négociations, à la force l’affabilité et la clémence ». Il avait encore d’autres qualités : il respectait le droit, il comptait avec l’opinion, tout en s’efforçant de la diriger ; il évitait le bon plaisir. Il disait aux parlements : « Mes prédécesseurs vous craignaient et ne vous aimaient pas, moi, je ne vous crains pas et je vous aime. » Fontenay-Mareuil le loue du choix qu’il faisait pour les emplois. Il savait juger les hommes ; il ne se laissait pas circonvenir ; il arrêtait autour de lui ce torrent d’ambitions et de convoitises, qui, après avoir été si funeste sous Henri III, le redevint sous Louis XIII.

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