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Lieux d'histoire : l'Isle-Adam (Val-d'Oise), plage artificielle

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Lieux d’Histoire
Origine, histoire de nos villes, villages, bourgs, régions, châteaux, chapelles, moulins, abbayes, églises. Richesses historiques de France
Isle-Adam (L’) accueille une plage
artificielle en 1895
Publié / Mis à jour le jeudi 6 août 2015, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 5 mn
 
 
 
Un journaliste du Petit Parisien partage avec ses lecteurs l’enthousiasme éprouvé à la découverte le dimanche 29 juin 1913 de la plage artificielle fluviale de l’Isle-Adam, créée en 1895 sans autre ambition initiale que de proposer aux peu nombreuses personnes qui le souhaitent, de pratiquer la natation. Mais bientôt, petits et grands y affluent, émerveillés de goûter aux joies de la « mer » à quelques kilomètres de Paris.

On voit sur tous les murs de belles affiches, devant lesquelles les passants s’arrêtent et demeurent songeurs, surtout quand le soleil est ardent, et lorsqu’on peut compter à l’ombre un nombre invraisemblable de degrés. C’est qu’elles sont très jolies, et surtout pleines d’éloquence, ces affiches ! On y aperçoit la mer immense, toute bleue, des voiles un peu partout, et un gros navire, avec son panache de fumée, disparaissant à l’horizon. Sur la plage se dressent des tentes, des cabines, de gigantesques parasols ; des jeunes personnes d’une rare élégance se promènent le long du rivage, l’ombrelle à la main ; d’autres, vêtues de costumes sommaires, semblent, par leur sourire, inviter les citadins à venir les rejoindre dans ce paradis balnéaire ; des centaines d’enfants jouent sur le sable ; ailleurs, des messieurs bien mis, mais un peu calamistrés, forment sur les rochers des groupes sympathiques, tout en lorgnant les baigneuses.

La plage. Ensemble des pavillons
La plage. Ensemble des pavillons

En un mot, c’est le spectacle du bonheur, et les pauvres gens empêchés d’aller aux bains de mer par l’état de leur bourse ou leurs occupations, soupirent avec amertume, en se disant qu’ils ne connaîtront peut-être jamais ces joies exquises. Il est exact que, pour beaucoup de Parisiens, par exemple, la mer est trop loin. Il y a bien tes trains de plaisirs, mis à la portée du public avec un bon marché incroyable, mais les trains de plaisir ne peuvent pas emporter toute la capitale, et, d’ailleurs, ces voyages, bons pour les grandes personnes, sont rudes pour les enfants. Pauvres gamins ! Quand donc auront-ils l’ivresse du sable et des coquillages, des trous qui se remplissent d’eau, et des petites lames, douces comme des caresses, venant effleurer leurs pieds potelés et nus. Oui ! décidément, la mer est trop loin, et cette idée là fait soupirer mélancoliquement les mamans.

Une plage sur les bords de l’Oise
Eh bien, c’est une erreur ! La mer n’est pas aussi éloignée qu’on le suppose. Le hasard nous l’a fait rencontrer, pendant une promenade, aux portes de la capitale, et durant un moment, tant cette scène était surprenante, nous nous sommes demandé si nous ne faisions pas un rêve. Mais non ! c’était la réalité ! Nous étions sur une véritable plage, avec des flots, des cabines, des parasols, des tentes, du sable, des cailloux et jusqu’à des coquillages ! Une plage avec ses élégantes et ses élégants, ses baigneuses, ses embarcations, et la masse animée et joyeuse des petits enfants, armés de pelles, remuant le sol, et se faisant des confidences, à l’exemple de Lolo et de Lulu, les deux petits amoureux de la chanson populaire. Une plage auprès de Paris, avec un capitaine du port et un canon qui, par bonheur, n’est pas un canon d’alarme, mais un canon de réjouissance et de gaîté ! Tout ceci semble imaginaire et paradoxal, et pourtant rien n’est plus vrai, et chacun peut rendre visite à cette station balnéaire, au moins imprévue, qu’une heureuse initiative a fait surgir du néant.

La plage. Le bain de soleil
La plage. Le bain de soleil

Cette amusante merveille a été réalisée à l’Isle-Adam, en Seine-et-Oise (Val-d’Oise). Naturellement, la Société de Sauvetage et de Natation du canton de l’Isle-Adam, qui a fondé cette plage inattendue, n’a pas poussé l’audace jusqu’à transporter l’océan à quelques kilomètres de Paris, ce qui eût été exagéré, mais elle a pensé que l’Oise pourrait parfaitement remplacer l’Atlantique ou la Manche. La seule différence est que les eaux de cette rivière ne sont pas salées.

Il est certain qu’il ne serait pas impossible de combler cette lacune, mais cela n’est pas indispensable, et les nageurs novices estiment qu’il est préférable de boire un coup d’eau douce plutôt que d’avaler cinq ou six gorgées d’eau salée. Réellement, ce liquide n’est bon que dans les huîtres. A part ce détail, tout est parfait, et les photographies qui accompagnent notre texte démontreront aux incrédules qu’une plage, une rade, des embarcadères et une jetée ne sont point des choses qu’on ne puisse rencontrer qu’en Bretagne et en Normandie, ou encore à Dunkerque ou à Biarritz, et aussi à Nice et à Arcachon.

Il v avait foule à l’Isle-Adam-Parmain, le jour où nous avons découvert ce petit monde balnéaire et maritime Les toilettes fraîches et gracieuses abondaient ; on déjeunait gaîment en plein air ; des touristes campaient résolument non loin du rivage ; parfois le canon tonnait, et de délicieuses Parisiennes défilaient hardiment sous les indiscrets appareils d’une nuée de photographes. C’était le dimanche 29 juin 1913, jour destiné à demeurer fameux dans les annales de l’Isle-Adam, attendu qu’on inaugurait en grande pompe les trois débarcadères du Touring-Club, lequel, avec raison, s’est intéressé à cette oeuvre, d’une si rare originalité, qui jouit aussi du concours d’une douzaine d’associations vouées à la voile, à l’hélice et à l’aviron, divinités fluviales comptant beaucoup d’adorateurs et de fidèles fanatiques, les servant durant tout l’été.

La plage. Un peu de sport
La plage. Un peu de sport

Oui, ce fut une belle journée, où l’on vit apparaître sur la rade – car l’Isle-Adam ne se refuse rien, et pas plus une rade qu’autre chose de nombreux yachts de fine allure, accompagnés, précédés et suivis par une multitude d’embarcations ou de vigoureux rameurs maniaient l’aviron avec une adresse surprenante. Si les orgueilleuses équipes de Cambridge et d’Oxford s’avisaient jamais de venir sur l’Oise, elles y trouveraient à qui parler, et peut-être apprendraient-elles que des « nageurs » comme ceux de l’Isle-Adam, « ils n’en ont pas en Angleterre ».

Il y eut exposition de camping, inauguration des débarcadères, déjeuner par petites tables et concert symphonique jusqu’à deux heures. Le programme se continua par un concours de bateaux décorés, par un imposant défilé de yachts et d’embarcations à avirons, par les exercices d’un étonnant bateau glisseur, etc. Pour finir, une terrible bataille de fleurs s’engagea entre la flotte et les spectateurs, qui se pressaient par centaines sur les bords de la rivière. Oui ! Ce fut une charmante journée, répétons-le, et tous ceux qui y prirent part en gardèrent un aimable souvenir. Il leur aurait fallu aller bien loin, en effet, pour rencontrer l’équivalent.

Histoire de cette station balnéaire
C’est vraiment une histoire amusante que cette de la plage de l’Isle-Adam, née d’une fantaisie curieuse, d’une sorte de caprice heureux, car, certainement, au début, ses fondateurs ne songeaient point à faire concurrence aux bains de mer ni à faire entrer l’Oise en lutte avec l’Océan. La Société de Sauvetage et de Natation du canton de l’Isle-Adam, en se livrant à quelques aménagements dans ce coin aimable du pays, n’avait qu’un but, excellent en soi, qui était de « faciliter le développement rationnel du sauvetage par la vulgarisation de la natation ».

Rien de plus humanitaire et de plus utile, car le nombre des personnes qui savent nager est infiniment restreint, alors que ce bon exercice devrait être obligatoire. Le succès répondit à ces premiers efforts et, peu à peu, le public commença à se rendre sur ce qui n’était encore qu’un embryon de plage. Les installations furent augmentées, et bientôt on vit s’élever en cet endroit une station balnéaire charmante dont on pourrait croire qu’elle est une plaisanterie, tandis qu’elle constitue réellement une œuvre de premier mérite que nulle idée de lucre ne met au rang d’une entreprise commerciale. Il est bon qu’on sache, en effet, que la Société de Sauvetage et de Natation, placée sous le régime de la loi du 1er juillet 1901 sur les associations, s’interdit tout bénéfice et ne distribue ni intérêts ni dividende.

La plage. Canotage
La plage. Canotage

Les recettes sont uniquement employées au développement de la « plage » et à l’amélioration des installations actuelles, déjà très remarquables, ainsi qu’on peut en juger par nos photographies et qui, comme le disent avec raison les organisateurs, forment « le plus bel aménagement de plage en rivière qui existe à ce jour ».

C’est assurément une joie pour les grandes personnes, mais comment peindre le ravissement des petites filles et des petits garçons qui trouvent là ce sable, objet de leurs ardentes convoitises ! Il serait d’un haut intérêt de savoir pourquoi les bambins aiment tant le sable et d’où leur est venue cette science des souterrains et des tunnels qu’ils possèdent tous à un si haut degré. Il est démontré qu’un bébé n’ayant jamais vu de sable se met à creuser ce dernier ou à en faire des petits pâtés aussitôt qu’on le dépose sur une plage ou dans un jardin. Pourquoi ? Quelle est la raison de cet étrange phénomène ? Ne devons-nous pas y voir la trace d’un atavisme séculaire et n’est-ce pas l’homme des cavernes qui s’éveille chez les jeunes enfants ? Quoi qu’il en soit, la plage de l’Isle-Adam est éminemment propice à ces importants travaux, et comme les organisateurs n’ont rien voulu faire à moitié, le capitaine du port, tout en chargeant son artillerie, n’a pas manqué de nous faire observer que le sable renfermait un grand nombre de très jolis coquillages.

Il n’est pas nécessaire d’insister sur le rôle considérable que joue l’art de la natation à l’Isle-Adam, puisque la plage a pris naissance dans le but de développer cette connaissance, utile entre toutes les connaissances utiles. On peut admirer là des équipes de jeunes nageurs qui s’ébattent dans les eaux de l’Oise avec l’aisance de joyeux dauphins et exécutent des prouesses merveilleuses, des plongeons étonnants sous les yeux d’une assistance ravie.

Mais il leur faut céder la place aux embarcations de course, aux canots rapides et aussi aux gracieux bateaux fleuris qui, tour à tour, viennent solliciter les applaudissements du public et la justice du jury. Les dimanches qu’on passe sur cette plage, au grand air, sont délicieux, et, d’ailleurs, il y a des tentes et des parasols pour les gens au teint frêle, qui craignent les ardeurs du soleil. Le succès de cette tentative nous prouve que les initiatives pratiques sont toujours couronnées de réussite. La Société de Sauvetage et de Natation du canton de l’Isle-Adam a donné un exemple qui devrait être suivi, car il y a ailleurs aussi des rivières sur lesquelles on peut établir aisément de semblables plages.

 
 
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