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Coutumes et traditions. Origine du blason féodal. Sceau, signature et authentification des actes. Représentation sans témoins

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Coutumes, Traditions
Origine, histoire des coutumes, traditions populaires et régionales, fêtes locales, jeux d’antan, moeurs, art de vivre de nos ancêtres
Blason féodal : né au XIIe siècle de la
nécessité d’authentifier les actes
(D’après « Comptes-rendus des séances de l’Académie
des Inscriptions et Belles-Lettres », paru en 1896)
Publié / Mis à jour le dimanche 15 juillet 2018, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 5 mn
 
 
 
Apparaissant en France à la fin du XIIe siècle sous le roi Louis le Jeune et ne tardant pas à faire des émules en Angleterre et en Allemagne, le blason féodal, dont l’avènement le doit à la nécessité d’authentifier des actes par un sceau à défaut d’être représenté par des témoins, est initialement attaché au fief, à la terre, cependant que par commodité, il est bientôt lié à une descendance familiale

À toute époque et partout l’homme a été porté à adopter un signe qui désigne sa personnalité. Sur les vases grecs, nous voyons des guerriers portant sur leurs boucliers des emblèmes particuliers ; la numismatique antique nous révèle des symboles adoptés par des villes, par des familles, par des personnages.

Cette coutume d’adopter un signe qui, le plus souvent, était une allusion parlante au nom ou l’image d’une idée, d’un souvenir d’origine, d’un fait personnel, donna naissance aux types des sceaux religieux. Elle se continua à travers les siècles jusqu’à des temps rapprochés de nous. De là procèdent ces emblèmes gravés sur les sceaux et les cachets des bourgeois, des artisans, des représentants riches de la classe rurale, des nouveaux anoblis comme nous l’établirons plus loin, et, dans les derniers temps de l’Ancien Régime, de tout individu ayant acquis une certaine situation dans la société.

Blason d'Alphonse, comte de Poitiers et de Toulouse, fils de Louis VIII le Lion et de Blanche de Castille (XIIIe siècle)

Blason d’Alphonse, comte de Poitiers
et de Toulouse, fils de Louis VIII
le Lion et de Blanche de Castille (XIIIe siècle)

À la fin du XVIIIe siècle, nombre de gens se qualifiaient chevaliers sans l’être ; tout le monde se disait écuyer et s’attribuait des armoiries ; profitant de cette tendance générale à se donner des apparences aristocratiques, les gouvernants, voyant qu’ils ne pouvaient arrêter le mouvement, se contentèrent habilement d’en tirer profit au point de vue fiscal. Telle est l’origine de l’Armoriai officiel dressé par d’Hozier, dans l’ordre des circonscriptions financières appelées Généralités. On y trouve un peu de tout, même des enseignes d’hôteliers. Ne sourions que discrètement de nos prédécesseurs, cependant que jamais les titres nobiliaires ne sont éclos plus spontanément depuis, de tous côtés, et sans qu’on puisse deviner d’où ils sortent.

Ces marques, ces symboles ont été l’origine des signes héraldiques ; mais ils ne constituent pas le véritable blason féodal. Sur celui-ci, l’imagination des chercheurs s’est exercée avec autant de zèle que d’insuccès. Les théories les plus étranges ont été proposées. Vico, dans la Science nouvelle, ne disait-il pas que les lis d’or de France procédaient de trois grenouilles plutôt que de trois crapauds, parce que le nombre trois étant le superlatif de la langue française, trois grenouilles signifient une très grande grenouille, c’est-à-dire un très grand enfant de la terre ou un très grand seigneur. Jadis le Père Ménestrier et Le Laboureur ne ménageaient pas ceux qui « philosophent inutilement sur les couleurs, métaux et pennes des armoiries, et s’alambiquent la cervelle pour deviner le langage des animaux, le ramage des oiseaux et la signification d’une mouche, d’un papillon, d’une billette, etc. »

On peut fixer le commencement du blason féodal d’une manière à peu près exacte, à quelques années près. Parmi les sceaux armoriés que de Barthélemy, membre de l’Académie des inscriptions et Belles-Lettres a pu étudier, il n’en a pas rencontré antérieurement à 1170 (Philippe d’Alsace-Flandre), et entre cette date et 1199 un certain nombre de feudataires ont à quelques années de distance, un sceau sans armoiries, et plus tard un sceau armorié.

On peut donc affirmer que le blason féodal fut employé à partir de la seconde moitié du XIIe siècle, sous le règne de Louis VII et par ce roi dont l’exemple fut aussitôt suivi par les grands seigneurs de France, puis passa à l’étranger. En Allemagne et en Angleterre, les premiers sceaux armoriés ne commencent à paraître que dans les premières années du XIIIe siècle.

Aucun texte, aucun règlement ne fait allusion à cette innovation, et cependant il n’est pas impossible d’en expliquer l’origine. A la fin du XIIe siècle, on renonça peu à peu à l’intervention des témoins, quelquefois très nombreux, qui assistaient à la rédaction d’un acte. Les seigneurs laïques y substituèrent un sceau qui était le signe de leur haute justice ; mais comme à ce moment, et depuis longtemps, le haut justicier se contentait de se faire représenter armé et à cheval et que tous les sceaux se ressemblaient, ne différant que par la légende, on dut graver sur le bouclier du cavalier et plus tard sur le caparaçon de son cheval un signe particulier qui fut le blason féodal.

Signe de la justice, c’est-à-dire du fief, le blason féodal fut dès lors attaché au fief et se transmit avec lui aux possesseurs qui s’y succédaient, même quand ils étaient étrangers à la famille qui l’avait d’abord détenu. C’était la conséquence de l’adage : la terre ennoblit. Un traité manuscrit de blason, du XVe siècle, conservé aux Archives nationales, confirme cette assertion : « Tout gentilhomme peut porter aultres armes que les siennes et changer quant se remonste d’hostel et seigneurie par heritiere. »

Blason du futur Charles V le Sage (XIVe siècle)

Blason du futur Charles V
le Sage (XIVe siècle)

C’est ainsi que l’on peut expliquer ces changements d’armoiries dans une même famille. Ils n’étaient pas motivés par le caprice, mais justifiés par des changements de possession territoriale. On pourrait faire une longue énumération des seigneurs de la haute noblesse qui abandonnèrent les armoiries de leurs ancêtres pour prendre celles des fiefs dont ils devenaient possesseurs. Il en fut ainsi jusqu’au jour où les rois de France donnèrent des lettres d’anoblissement : les armoiries des nouveaux nobles leur devinrent dès lors personnelles, et, comme elles n’étaient pas attachées à la terre, elles se conservèrent héréditairement et sans changement dans leurs familles.

Le premier anoblissement connu jusqu’ici est celui de l’orfèvre de Philippe le Hardi, en 1270 ; il est permis de penser que, depuis cette date jusqu’à la fin de la monarchie, les armoiries vraiment féodales restèrent attachées au fief, tandis que celles des nouveaux nobles devinrent personnelles. Les armoiries féodales continuèrent à exister dans les anciens fiefs possédant une juridiction ; elles étaient immobilisées dans les terres que les rois érigeaient en baronnies, comtés ou duchés.

L’établissement du blason féodal eut pour conséquence de modifier la forme du bouclier. Jusqu’au milieu du XIIe siècle, assez haut pour couvrir le cavalier, il était arrondi dans sa partie supérieure et terminé en pointe ; façonné en bois et recouvert d’un cuir qui cachait les bandes de métal destinées à amortir les coups, il portait au centre un umbo de volume assez considérable qui maintenait les bandes métalliques, mais faisait obstacle à ornementer la surface de l’écu. A partir du milieu du XIIe siècle, l’umbo disparaît, les bandes de métal sont disposées sur le cuir, la forme générale de l’écu est modifiée : il est tout prêt à recevoir des figures peintes. Ces bandes de métal, dorées, argentées ou peintes, donnent naissance aux plus anciennes pièces héraldiques.

Quelques personnes ont supposé qu’à leur retour d’Orient, les croisés avaient rapporté et conservé pieusement leurs écus, dont les plaques métalliques avaient été plus ou moins fondues et brisées dans les combats. Le meilleur argument à invoquer contre cette conjecture, c’est qu’aucun sceau de croisé, ayant pris part aux deux premières expéditions, ne porte d’armoiries.

Si on veut savoir d’où viennent les figures héraldiques du blason féodal, on se rapprochera probablement de la vérité en cherchant dans un ordre d’idées très simple. Ainsi les sautoirs, les chevrons, les fasces ne sont peut-être que des parties de l’armature métallique ; complétées par la réunion de toutes les bandes réunies à l’umbo, cet ensemble donna naissance à l’escarboucle et aux chaînes de Navarre.

Quant aux lions, aux léopards, aux aigles et autres animaux, que les seigneurs des XIIe et XIIIe siècles ne connaissaient guère que par les bestiaires et les récits des voyageurs, ils furent semble-t-il empruntés aux étoffes orientales employées dans les costumes d’apparat : leurs formes de convention sur les écussons font soupçonner cette origine, et la règle héraldique qui défendait de mettre métal sur métal et émail sur émail vient à l’appui de cette conjecture.

Blason de Jean sans Peur (XIVe siècle)

Blason de Jean sans Peur (XIVe siècle)

Il ne faut pas oublier que Philippe-Auguste, à son sacre, avait une dalmatique et des chaussures de couleur bleue, semées de fleurs de lis ; de même l’émail du Mans montre Geoffroi Plantagenêt revêtu et chaussé d’un semis de lions, reproduits sur son écu qui est pourvu de son umbo ; mais, dans ce dernier cas, il n’y a rien du blason féodal.

Cette solution permet de répondre aux personnes qui, persuadées que sur un écusson les figures héraldiques représentent une sorte de langage hiéroglyphique, en demandent souvent l’interprétation. Cette curiosité a quelque raison d’être en ce qui concerne les blasons des anoblis et ceux de la noblesse impériale. Le souverain voulait indiquer, dans les nouvelles armoiries, les motifs de l’anoblissement. Il n’en est pas de même en ce qui touche le blason féodal.

Dans celui-ci il n’y a rien à deviner ; il n’y a pas même de ces allusions symboliques qui étaient en grande faveur dans l’archéologie religieuse. Parce qu’un sceau féodal représentait un lion et que quelque trouvère en faisait le prétexte d’une flatterie visant le courage, virtus, du personnage dont il était le signe héraldique, il ne faut pas en conclure que, dans le principe, ce lion avait été pris comme synonyme de virtus.

Outre les indications que la science héraldique peut fournir à propos des alliances, de la transmission des grands fiefs, de la provenance et de la date de nombre de monuments, d’objets sculptés, peints, émaillés, de la détermination de monnaies et de médailles du Moyen Age, elle peut aussi venir en aide aux diplomatistes. En effet, il est permis d’affirmer que tout texte , tout poème contenant la description héraldique d’un écusson est le produit d’une transcription qui ne remonte pas au delà de l’an 1200.

En résumé, on doit vraisemblablement considérer comme fermement acquises les propositions suivantes :

1° Le blason féodal, inauguré sous Louis VII pour distinguer les sceaux d’un type jusque-là uniforme et destinés, en l’absence des témoins, à authentiquer les actes, commença à paraître, au milieu du XIIe siècle , au plus tôt ; les contre-sceaux, d’origine anglaise, reçurent des armoiries en France, à la même époque.

2° Les sceaux armoriés des personnages ayant droit de justice, étaient dès lors attachés au fief et se transmettaient avec celui-ci à ses possesseurs successifs.

3° Au milieu du XIIIe siècle, le droit d’anoblir, que s’attribua le roi, amena l’apparition d’armoiries attachées à la personne anoblie et non au fief. Mais l’ancien état de choses persista lorsqu’il y eut création de châtellenies, de baronnies, de comtés et de duchés.

 
 
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