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Des champs de Waterloo aux routes de l'exil pour Napoléon

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Histoire des Français
L’Histoire des Français : systèmes politiques, contexte social, population, économie, gouvernements à travers les âges, évolution des institutions.
Waterloo (Des champs de) aux
routes de l’exil pour Napoléon
(D’après « Le Dimanche illustré » du 19 octobre 1924)
Publié / Mis à jour le mardi 18 juin 2019, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 9 mn
 
 
 
Comment Napoléon vécut-il les heures sombres qui, après la bataille de Waterloo, marquèrent la fin de son épopée magnifique ? Le récit de cet épisode montre le désarroi de l’adversaire malheureux, mais jusque là invincible, de Wellington.

À sept heures du soir, le 18 juin 1815, Napoléon est encore « l’Empereur » tel qu’on le conçoit à ses jours les plus glorieux. La gravité de l’action excite au paroxysme son imagination prête à parer tous les coups et son énergie qui ne cesse d’animer l’armée entière. Il se sent encore maître du destin.

D’un coup de boutoir de la Vieille Garde, il a refoulé les premières troupes prussiennes qui ont débouché sur notre flanc droit pour y livrer une seconde bataille, et les Anglais massés sur les hauteurs dominant la Haie-Sainte commencent à fléchir après nos attaques répétées de tout un jour. Si ses régiments, au milieu desquels il chevauche sous la mitraille, sont déjà dans un furieux désarroi, ses ordres restent précis et clairs, et bien qu’il les jette maintenant, improvisant pour le détail, aux chefs de corps vers lesquels il accourt, il conserve une exacte conception de la situation générale ; mieux encore, la vigueur avec laquelle il mène l’action paraît détourner de cette intelligence merveilleusement limpide, toute frayeur à l’égard des deux heures qui vont suivre et amener, avec la nuit, dans un héroïque désastre, l’écroulement d’une immense fortune et tant de jours d’amertume.

Napoléon lors de la bataille de Waterloo

Napoléon lors de la bataille de Waterloo

À peine, jusqu’alors, lui a-t-on entendu prononcer une phrase qui trahit chez le chef quasi-infaillible une impression d’impuissance. Ney ayant réclamé de l’infanterie pour achever l’ébranlement de l’armée anglaise : « De l’infanterie ! s’écrie Napoléon. Où veut-il que j’en prenne ? Veut-il que j’en fasse ? » En réalité, il possède encore quatorze bataillons de sa Garde, qu’il tient à conserver comme suprême ressource, mais la minute critique où il faut les utiliser ne tarde pas. Les masses de l’armée de Blücher, que Grouchy, dont on reste sans nouvelles, n’a pas retenu hors de Waterloo, arrivent et ont déjà permis aux Anglais de dégarnir leur flanc pour mieux résister au centre.

À cet instant terrible, Napoléon, pour la dernière fois, se montre égal à lui-même, l’homme de génie qui a l’intuition immédiate de la seule décision possible, et la prend avec audace et vigueur. Pour redresser les courages, il fait dire partout que le corps de Grouchy est en vue, et sans disperser ses efforts contre les Prussiens qui accourent, lance ses dernières réserves sur les Anglais qui défaillent. Tandis que la Garde monte vers les armées de Wellington, que tant de magnifiques charges n’ont pu qu’ébranler depuis le début de l’action, l’empereur s’avance lui-même avec trois bataillons, au pied de la Haie-Sainte. C’est là que moins d’une heure après il entend, comme le premier glas de la Grande Armée, ces mots redoutables et jamais encore prononcés : « La Garde recule ! »

La Garde recule et le front de bataille est rompu. Sous la poussée hurlante des Anglais et des Prussiens, des divisions entières ne sont plus que des flots de fuyards éperdus. Napoléon juge l’immensité du désastre, mais avec sang-froid forme en carré les éléments de la Garde qu’il a sous la main, trois carrés, incapables, certes, d’endiguer la fuite de la Grande Armée, mais impassibles en face de la panique et de la mort, et qui, bientôt assaillis par les hordes victorieuses, entourés d’un cercle de feu et de fer, prolongent le sacrifice jusqu’aux dernières lueurs du crépuscule.

À la tombée de la nuit, un peu en arrière, il reste encore deux bataillons intacts, le 1er et le 2e du 1er régiment de grenadiers de la Garde. Napoléon se trouve à cheval au milieu du carré du 1er bataillon, composé de grognards, dont le moindre porte deux chevrons et la moitié la Légion d’honneur. Ce sont les braves des braves. Le général Petit est à leur tête. Il rallie les débris du reste de la Garde et l’empereur pense avec cette élite, mais si minime, couvrir la retraite.

Autour d’eux, les fuyards s’écoulent comme un fleuve autour d’un roc ; puis, voici les hussards ennemis se ruant pêle-mêle avec ceux des nôtres qu’ils poursuivent le sabre aux reins. Les grognards tirent sur tous et dressent devant eux un effroyable rempart de cadavres. Anglais et Prussiens précipitent leurs charges ; toutes viennent mourir sous les baïonnettes des derniers grenadiers qui, plus que tout, défendent leur empereur.

Celui-ci donne enfin l’ordre de la retraite. Les deux bataillons, sans hâte, à l’alignement, quittent le terrain. Tous les cinquante mètres, ils se retournent pour arrêter la poursuite de l’ennemi et protéger le groupe sombre qui lentement s’achemine vers la France : Napoléon, vaincu, qu’entourent quatre de ses généraux, Soult, Drouot, Bertrand, Lobau, et que suit une escorte de six chasseurs à cheval. À une heure du matin, l’empereur met pied à terre dans un petit bois, aux Quatre-Bras, devant un feu de bivouac. Autour de lui, passe une affreuse cohue de fuyards épuisés, qui ne retrouvent de force que pour courir, quand l’un d’eux a crié : « Les Prussiens ! »

L'arrivée de Blücher lors de la bataille de Waterloo

L’arrivée de Blücher lors de la bataille de Waterloo

Napoléon songe, sans doute, à la possibilité de rétablir un peu d’ordre et à rallier les corps qui n’ont pas pris part à la bataille. Mais ce chef, hier encore, extraordinaire d’activité et d’énergie, qui, l’an d’avant, a prouvé magnifiquement que l’adversité ne mordait point sur un cœur d’acier, doute maintenant de son pouvoir et de son génie. Il n’apparaît plus capable que de velléités. Ce maître de l’autorité n’a plus un geste pour retenir un voltigeur qui détale, et l’on aperçoit, à la lueur du feu de bivouac, le plus grand animateur de héros qui ait vécu, blême, les bras croisés, la face tournée du côté de Waterloo, laisser couler ses larmes en écoutant le trépignement du troupeau apeuré qu’est devenue la Grande Armée.

Il remonte à cheval, gagne Charleroi où règne la plus grande confusion et, à neuf heures du matin, arrive à Philippeville. Depuis quatre-vingt-seize heures, il n’a pris que vingt heures de repos ; cependant, dans une auberge où il s’affale, il écrit deux lettres à son frère Joseph, l’une personnelle, dans laquelle il annonce la vérité sur le désastre ; l’autre, officielle, pour être lue aux ministres, car après le sinistre crépuscule de Waterloo, en face des Anglais et des Prussiens, Napoléon s’apprête, mais sans force de réaction, à l’autre crépuscule sans gloire, en face de ses Chambres et de son gouvernement.

En passant à Laon, il donne quelques ordres pour rassembler l’armée, puis maintenant dans la calèche qui l’emporte vers Paris, il somnole, entendant comme dans un rêve, dans les villes que l’on traverse, les foules qui l’acclament.

Le 21 juin, à huit heures du matin, l’empereur arrive à l’Élysée où le général de Caulaincourt le reçoit à sa descente de voiture. Fatigué, vieilli, pâle, les traits tirés, l’œil vide de ces magnifiques regards qui dominaient les hommes, Napoléon, après un soupir profond, déclare d’une voix haletante : « Tout a été perdu... Ney s’est conduit comme un fou ; il m’a fait massacrer toute ma cavalerie... Je n’en puis plus... il me faut deux heures de repos pour être à mes affaires... » et portant sa main à la poitrine : « J’étouffe là. »

Cependant que l’empereur attend le bain qu’il a commandé au premier serviteur rencontré, Caulaincourt lui explique l’hostilité de la Chambre à son égard. N’importe, Napoléon, reprenant presque courage, déclare qu’il lui demandera les moyens de sauver la patrie ; puis, désespérant de nouveau, affirme : « Je n’ai plus d’armée, je n’ai plus que des fuyards. » Ces mots à peine prononcés, des velléités de résistance reviennent à son esprit : « Les députés me seconderont, je n’ai contre moi que La Fayette et quelques autres. Je les gêne, ils voudraient travailler pour eux. Mais je ne les laisserai pas faire. Ma présence ici les contiendra. »

Charge de la cavalerie anglaise lors de la bataille de Waterloo

Charge de la cavalerie anglaise lors de la bataille de Waterloo

Il se met au bain. Davout est annoncé. « Qu ’il entre ! » dit l’empereur et, à la vue de ce vieux compagnon d’armes, il ne peut prononcer une parole, lève dans un geste désespéré ses deux bras, puis les laisse retomber dans l’eau, sans même s’apercevoir qu’il éclabousse l’uniforme du maréchal. Celui-ci affirme : « Rien n’est perdu si Votre Majesté prend promptement des mesures énergiques. La plus urgente est de proroger les Chambres ; car, avec son hostilité passionnée, la Chambre des représentants paralysera tous les dévouements. »

Mais Napoléon n’est plus l’homme des décisions énergiques et il va se laisser prendre dans la toile qu’a tissée, dans l’ombre, Fouché, ennemi plus redoutable à Paris que Wellington sur les hauteurs du Mont Saint-Jean. Cependant les ministres sont réunis et attendent l’empereur. Il y a là les princes Joseph et Lucien, Bassano, Cambacérès, Caulaincourt, Carnot, Gaudin, Mollien, Davout, Decrès, Defernion, Regnaud, Boulay, Merlin de Douai, Berlier et Fouché, duc d’Otrante.

Celui-ci a déjà fait courir le bruit d’une dissolution prochaine parmi les députés, afin de les exciter contre Napoléon ; cette dissolution, on en parle aussitôt au Conseil. Carnot pense à déclarer la patrie en danger. Lucien, soutenu par Davout et mollement par le reste des ministres, contrecarré par Fouché qui, mielleux et faux, parle de l’appui que donnera sûrement la Chambre à l’empereur, Lucien voudrait que son frère se déclarât dictateur et prît tous, les pouvoirs en main, le parlement étant prorogé.

Napoléon ne possède plus l’âme du 18 brumaire. II ne soutient pas l’opinion de Lucien, il se contente d’exposer qu’il reste le seul chef capable de défendre la France contre l’invasion, et il finit, néanmoins, par dire son espoir avec une telle chaleur que, le soir même, Fouché déclarera à un ami : « Ce diable d’homme ! Il m’a fait peur ce matin. En l’écoutant, je croyais qu’il allait recommencer. Heureusement, on ne recommence pas. »

Discourant avec ses ministres, Napoléon n’agit pas. La Chambre, par contre, agit, vote la motion de La Fayette qui déclare l’indépendance de la nation menacée et traître au pays qui voudra dissoudre l’Assemblée. Toute la journée, on parlementera entre elle et l’Élysée ou plutôt l’empereur hésitera entre des velléités de coup de force, son désir de persuader les députés de s’unir à lui pour la défense du pays et sa lassitude profonde qui le dispose à s’abandonner au destin. En réalité, il est encore le maître, car si Fouché poursuit sa trame en vue de l’abdication, si ses ministres un à un l’abandonnent, il lui reste la garnison de Paris imperturbablement fidèle et tout le peuple, la foule immense qui cerne l’Élysée et hurle sous ses fenêtres comme aux beaux jours : « Vive l’empereur ! »

Joseph Fouché, duc d'Otrante. Peinture d'Édouard Dubufe

Joseph Fouché, duc d’Otrante. Peinture d’Édouard Dubufe

Mais il ne cède pas aux instances de Lucien, à l’idée d’un triomphe certain sur les parlementaires, et ayant laissé discuter au cours d’un conseil nocturne tenu aux Tuileries, entre ses ministres et les représentants des Chambres, son abdication ou sa déchéance, le lendemain, 22 juin, c’est Lucien lui-même qu’il oblige à écrire l’acte de renonciation au trône.

C’est trop peu pour Fouché d’avoir pareille signature, il lui faut l’éloignement de Napoléon que le peuple réclame à la tête des armées. Le duc d’Otrante délègue Davout pour dire au souverain déchu d’avoir à s’éloigner. Davout, au cours d’une scène douloureuse, y gagne le juste mépris de son ancien maître. Celui-ci décide de se retirer à la Malmaison qu’emplit le souvenir de sa glorieuse jeunesse. Au moment du départ, la foule d’anciens officiers et soldats, accrue du peuple des faubourgs, séjourne toujours devant l’Élysée, criant : « Ne nous quittez pas ! » Pour échapper au douloureux contraste de ces manifestations et de sa situation d’empereur déchu, Napoléon fait sortir son carrosse par la grande porte du palais et lui-même, traversant les jardins, monte avenue Marigny dans une simple calèche.

À Fouché devenu président de la Commission de gouvernement, il faut encore que Napoléon soit surveillé de près, et il nomme le général Becker, disgracié depuis longtemps, à la garde de la Malmaison. Mais ce général a le cœur noble, et Napoléon toujours le même ascendant sur un soldat. Becker, en abordant l’illustre banni, est ému aux larmes et s’écrie : « Sire, c’est uniquement pour vous protéger que j’ai accepté cette mission. Si elle ne devait pas obtenir l’entière approbation de Votre Majesté, je me retirerais à l’instant même. »

L’empereur-lui pince l’oreille comme au temps où il commandait, et termine une longue conversation avec lui par ces mots désabusés : « Si j’avais été l’homme du choix des Anglais, comme je l’étais du choix des Français, j’aurais pu perdre dix batailles de Waterloo, sans perdre une seule voix dans les Chambres. »

Il désirait se rendre en Amérique et avait fait demander au gouvernement deux frégates, stationnées à Rochefort, pour l’y conduire. Fouché répondit par un arrêté qui mettait les frégates à la disposition de Napoléon, mais leur interdisait de sortir du port avant d’avoir reçu des sauf-conduits britanniques, qu’il allait demander à Wellington. Le duc d’Otrante savait qu’il ne les obtiendrait pas et se proposait de faire de la personne de l’empereur l’objet de négociations avec l’ennemi.

Vers l'exil. Napoléon Ier abdique le 22 juin 1815 et proclame son fils Napoléon II (alors âgé de 4 ans) empereur des Français

Napoléon Ier abdique le 22 juin 1815 et proclame son fils
Napoléon II (alors âgé de 4 ans) empereur des Français

Napoléon flaira le piège et se refusa de quitter la Malmaison dans ces conditions. Il y était entouré de trois cents grenadiers à pied de la Vieille Garde pour lesquels il était toujours le demi-dieu. Dans les appartements, que des mains pieuses avaient conservés tels qu’aux plus belles heures du Consulat, une manière de cour, petite, mais composée des plus fidèles, le servait avec une affection respectueuse. Une foule de visiteurs le venaient voir de Paris. Il goûtait, là, l’ombre de sa gigantesque puissance et une infinité de souvenirs de gloire que lui rappelait chaque meuble, avec la chère figure, intimement liée à tout cela, de Joséphine, aimée et abandonnée, aujourd’hui morte, comme tout le reste.

Cette forte personnalité n’en concevait aucune idée d’action ; mais un attendrissement mélancolique, singulier chez un homme de pareille trempe. Parcourant les pièces de la Malmaison, il aimait à rappeler à ses proches les moindres scènes qui s’y étaient passées, et un matin, devant un massif de roses, il dit à la reine Hortense : « Cette pauvre Joséphine, je ne puis m’accoutumer à habiter ici sans elle. Il me semble toujours la voir sortir d’une allée et cueillir une de ces fleurs qu’elle aimait tant... C’était bien la femme la plus remplie de grâce que j ai jamais connue. »

Cependant les négociations avec Paris n’aboutissaient pas. Fouché, partagé entre le désir d’éloigner le chef que l’armée réclamait à grands cris, et le désir de le livrer à l’ennemi contre un armistice favorable, hésitait à lui donner les deux frégates. Les émissaires de Napoléon étaient de plus en plus mal reçus. Davout eut même cette si triste parole : « Qu’il s’éloigne sur-le-champ ! sans quoi nous serons obligés de le faire arrêter... je l’arrêterai moi-même. »

Les ennemis approchaient de Paris. Notre armée refluait aux environs. Passant par la Malmaison, des régiments acclamaient longuement leur empereur. Ses soldats venaient le chercher. Il retrouva l’âme de Rivoli, se pencha sur ses cartes, étudia la situation, puis disparut quelques instants dans sa chambre et revint en uniforme de chasseur de la Garde, prêt à d’héroïques combats. Il appela le général Becker et lui donna l’ordre de se rendre auprès du gouvernement pour lui demander le commandement de l’armée, non comme empereur, mais comme « un général dont le nom et la réputation peuvent encore exercer une influence sur le sort de la nation ».

Napoléon à bord du vaisseau anglais le Bellephoron. Illustration de Damblans publiée dans Le Pèlerin du 1er mai 1921

Vers l’exil. Napoléon à bord du vaisseau anglais le Bellephoron.
Illustration de Damblans publiée dans Le Pèlerin du 1er mai 1921

Galvanisé par Napoléon redevenu empereur, Becker remplit cette nouvelle mission avec enthousiasme. « Est-ce qu’il se moque de nous ? » fut la réponse de Fouché, qui tança vertement le général d’avoir accepté pareil message. Quand Becker revint à la Malmaison, tout était préparé pour le départ aux armées, mais ce fut le départ pour l’exil que décida Napoléon, dont toute la fièvre tomba d’un coup. Il quitta l’épée et l’uniforme d’Austerlitz pour un frac de couleur brune et un chapeau rond. Il s’enferma, seul, quelques minutes dans la chambre de Joséphine, pour y éveiller de dernières ombres heureuses, puis il fit ses adieux aux officiers de sa Garde : « Nous voyons bien, dit l’un d’eux, que nous n’aurons pas le bonheur de mourir à votre service. » L’empereur l’embrassa ; il traversa le parc et alla monter dans une voiture jaune, sans armoiries, traînée par quatre .chevaux, qui stationnait sur le petit chemin menant à La Celle-Saint-Cloud.

Le 3 juillet, il était à Rochefort que bloquait une escadre anglaise. D’intrépides marins se proposèrent de le faire passer de vive force. Napoléon hésita encore ; puis dans la nuit du 13 au 14 juillet, décida de se livrer au capitaine Maitland, commandant la flotte britannique, après avoir écrit cette lettre au prince régent d’Angleterre :

« En butte aux factions qui divisent mon pays et à l’inimitié des plus grandes puissances de l’Europe, j’ai terminé ma carrière politique et je viens, comme Thémistocle, m’asseoir au foyer du peuple britannique. Je me mets sous la protection de ses lois, que je réclame de Votre Altesse comme du plus puissant, du plus constant et du plus généreux de mes ennemis. »

Le 15 juillet, au lever du soleil, Napoléon, revêtu de l’habit vert de colonel des chasseurs de la Garde et l’épée au côté, montait sur l’Épervier, dont une chaloupe devait le conduire au vaisseau anglais, le Bellerophon, où, l’attendaient, en grande tenue, les officiers de Sa Majesté britannique. Le sacrifice était consommé.

 
 
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