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Histoire de France par Jacques Bainville. Les guerres civiles et religieuses remettent la France au bord de la ruine. Guerres de religion. Partie 1

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Histoire de France
L’Histoire de France par Jacques Bainville : 2000 ans d’Histoire de notre pays, des Gaulois jusqu’au début du XXe siècle. Événements, contexte historique.
Les guerres civiles et religieuses
remettent la France au bord de la ruine
(Chapitre 9 - Partie 1/2)
(par Jacques Bainville)
Publié / Mis à jour le dimanche 10 juillet 2011, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 8 mn
 
 
 
La mort d’Henri II précipita les choses : le « grabuge », comme il disait, passait d’Allemagne en France. Son fils François II n’avait que seize ans et il était maladif. Son règne d’une année fut celui où les catholiques et les protestants prirent position, tandis que se dessinait un « tiers parti » qui, redressé par l’expérience de la Ligue et devenu le parti des « politiques », aurait la victoire à la longue

Ce tiers parti était en réalité celui de la couronne. S’il était représenté par le chancelier L’Hospital, libéral vénérable et verbeux, il avait pour cerveau calculateur la reine mère, Catherine de Médicis, car Henri II avait épousé cette descendante des banquiers florentins.

Le chef incontesté des catholiques était le duc de Guise. Son immense popularité, sa gloire militaire le servaient. Quant aux protestants, ils cherchaient un chef sans le trouver. Il y avait bien, en face de la maison de Lorraine, celle de Châtillon : Coligny et Dandelot. Coligny, soldat, se dérobait encore et se contentait de plaider pour la tolérance. Un prince du sang eût d’ailleurs mieux convenu aux calvinistes. Ils portèrent leurs vues sur le roi de Navarre, Antoine de Bourbon, que sa femme Jeanne d’Albret entraînait vers la Réforme, mais que ses intérêts et son caractère rendaient hésitant, et sur son frère le prince de Condé, plus résolu et que l’ambition tenta.

Nous avons ainsi le thème général des guerres de religion. « Il y a deux grands camps par la France », disait Pasquier. La monarchie, fidèle, même sous des princes débiles, a son rôle national, s’efforcera de maintenir l’équilibre et de rester au-dessus des factions. Ces événements extrêmement troubles ont encore été obscurcis par la passion qui se mêle aux récits qu’on en a fait jusqu’à nos jours. Chacun des partis accuse l’autre d’avoir commencé. Ce qui est certain, c’est que le duc de Guise, qu’il le voulût ou non, se trouvait à la tête des catholiques. Il était l’homme le plus haï des protestants et conduit par cela même, et pour se défendre, à désirer le pouvoir. Oncle du jeune roi puisque Marie Stuart était sa propre nièce, l’avènement de François II lui donna dans le gouvernement une influence d’autant plus grande que son frère, le cardinal de Lorraine, occupait ce qui correspondrait aujourd’hui aux ministères de l’Intérieur et des Finances.

Les protestants, jusque-là, avaient pu se montrer hardis en paroles et violents dans leurs pamphlets. Ils n’avaient pas encore passé à l’action. Ce grand pas fut franchi par un homme de coup de main, La Renaudie, que ses coreligionnaires semblent bien avoir approuvé tout en se réservant de le désavouer. La Renaudie, ayant réuni un certain nombre de gentilshommes réformés, leur proposa d’enlever les Guise et d’obtenir ensuite la liberté de la religion protestante, en promettant, pour ne pas les effaroucher, de ne toucher ni au roi ni à « l’état légitime du royaume ». En réalité son plan consistait à se saisir du roi en même temps que des Guise, à convoquer les états généraux et à proclamer les Bourbons. Ce fut la conspiration d’Amboise (1560). Elle fut éventée par le cardinal de Lorraine et le duc de Guise devança La Renaudie qui fut tué au moment où il rassemblait ses bandes. Par cette aventure, le parti protestant s’était mis dans un tort grave. Déjà trop fort pour s’incliner, il se jetait dans la rébellion. Il prit les armes sur divers points, à Lyon, en Dauphiné, en Provence.

Le service que les Guise ont rendu à ce moment-là a été de voir la nécessité da la répression et de se charger des responsabilités. Il leur fallait cependant, pour résister aux protestants factieux, une sorte d’approbation nationale, le chancelier L’Hospital, soutenu par la reine mère, étant pour les mesures de conciliation. C’est ainsi que, du consentement de tous, furent réunis des états généraux, le dangereux remède des temps troublés.

Mais les Guise ne livraient rien au hasard. Leur plan était de frapper tout de suite un grand coup et de placer les députés devant un fait accompli. Les états convoqués à Orléans, le roi de Navarre et Condé furent invités à s’y rendre. S’ils refusaient, ils s’avouaient coupables et se mettaient hors la loi. S’ils venaient avec des troupes, ils trahissaient une mauvaise conscience. S’ils venaient seuls, ils se livraient à leurs adversaires. C’est ce qui eut lieu. Le roi de Navarre, que son irrésolution rendait inoffensif, fut intimidé par un accueil glacial et une étroite surveillance. Quant à Condé, sommé par le roi d’expliquer sa conduite, il répondit qu’il était calomnié par les Guise. Arrêté, jugé, il fut condamné pour trahison. Les Guise avaient obtenu ce qu’ils voulaient. En frappant les princes de Bourbon, ils avaient frappé le parti protestant à la tête.

La mort de François II, dans la même année 1560, atteignit les Guise au milieu de ce succès. Cette mort changeait tout, car le nouveau roi, Charles IX, étant mineur, la reine mère et L’Hospital prenaient la haute main. On peut croire que, de ce moment, l’idée d’un changement de dynastie hanta les Guise, comme elle était dans l’esprit des protestants. Et du changement de dynastie à la suppression du régime monarchique, il n’y a qu’un pas. Un état d’esprit révolutionnaire se répandait.

Apaisement, réconciliation : c’était le programme de Catherine et de L’Hospital. Programme chimérique : les positions étaient trop nettes, les passions trop brûlantes. L’habileté de l’Italienne, le libéralisme du chancelier réussirent quelque temps à écarter les questions qui irritaient, les questions de personnes d’abord. Mais il n’était pas possible d’être si impartial que la balance ne penchât de quelque côté. Les Guise écartés du pouvoir, le roi de Navarre au conseil, Condé gracié, l’amnistie pour les calvinistes : la balance penchait du côté des protestants qui s’enhardirent, tandis que les catholiques s’alarmaient. L’Hospital s’était trompé sur la nature du problème ou plutôt il ne l’avait pas vue. Il n’avait pas distingué ce que Sainte-Beuve appelle « l’esprit républicain primitif des Églises réformées et leur dessein exprès de former un État dans l’État ». L’Hospital ne crut pas seulement contenter les calvinistes par des concessions et des édits de tolérance. Ne distinguant pas le cours des événements, il affaiblit l’État au moment le plus mauvais. Il a ainsi une lourde responsabilité dans les massacres et les guerres civiles. L’ordonnance qu’il rendit, selon l’usage, après les états généraux d’Orléans, répondait aux réformes demandées par les députés bourgeois, effrayés surtout de la dépense et du déficit qui atteignait 43 millions, chiffre énorme alors. Le chancelier fit des économies, mais de l’espèce des économies ruineuses. Il diminua la force publique, licencia la garde écossaise. Les pensions réduites firent des mécontents et des « demi-solde ». Ce n’était pas tout. Les pouvoirs des municipalités furent accrus : c’est comme si, dans des temps troublés, la police intérieure était abandonnée aux communes. L’Hospital pensait que la liberté arrangerait tout : il désarmait le gouvernement, et il armait les partis. Michelet, presque malgré lui, traite ce libéral comme un imbécile : « Aux flots de la mer soulevée, aux éléments furieux, au chaos il dit : « Soyez rois. »

Ces circonstances expliquent comment, presque d’un seul coup, la France flamba. En vain le chancelier multipliait les édits ; personne ne les observait. Les calvinistes ne trouvaient pas qu’il leur donnât assez et le parti catholique trouvait qu’il leur donnait trop. Les uns troublaient la messe, les autres le prêche sans qu’on sût jamais qui avait commencé. La singulière idée qu’eut L’Hospital de convoquer à Poissy un colloque d’évêques et de ministres pour rapprocher les deux religions s’acheva par une violente querelle et laissa penser aux catholiques que le pouvoir était prêt à sacrifier leur foi. Dans son rôle de conciliatrice, Catherine de Médicis se rendait suspecte. Déjà, le duc de Guise, le vieux connétable de Montmorency et le maréchal de Saint-André avaient formé une sorte de gouvernement à côté du gouvernement, le triumvirat. Un incident plus grave que les autres, où le duc de Guise fut personnellement mêlé, donna le signal de la guerre civile. Les protestants, dont les coreligionnaires avaient eu le dessous dans la sanglante échauffourée qu’on a appelée le massacre de Vassy, crièrent à la persécution et prirent les armes. On était en mars 1562 : la véritable guerre civile commençait et un manifeste du prince de Condé l’ouvrit.

Cette guerre, François de Guise, avec sa décision ordinaire, voulut l’entreprendre dans de bonnes conditions. Il avait pour lui Paris qui restera jusqu’au bout catholique, et la résistance passionnée de la capitale annonce l’échec de la nouvelle religion, car déjà la France ne peut plus être qu’à l’image de Paris. Guise voulut encore autre chose : être sûr du gouvernement. Par un coup aussi calculé et aussi hardi que celui d’Orléans, il s’empara, à Fontainebleau, de la reine mère et du jeune roi, les conduisit à Paris, et reprit le pouvoir.

La tutelle et la surveillance que les Guise imposaient à la royauté et que Catherine subissait impatiemment, contre lesquelles Charles IX et Henri III se défendront plus tard, étaient fort illégales. Toutefois, sans cette dictature, la France eût couru de bien plus grands périls. Le coup d’œil de Guise était prompt et sûr. Il avait vu tout de suite la marche que les événements devaient suivre. Toute guerre civile introduit l’étranger dans les affaires d’un pays. Quand une guerre civile a en outre un principe religieux, elle prend un caractère international. La crainte des Guise était que les protestants de France n’eussent recours aux protestants du dehors, Comme nous avions encore de bonnes relations avec ceux d’Allemagne, les Guise cherchèrent à les convaincre qu’il y avait bien moins. de différence entre luthériens et catholiques qu’entre luthériens et calvinistes. Le cardinal de Lorraine, par une politique qu’on lui a beaucoup reprochée, fit même, dans un entretien fameux sur la foi et le dogme, d’étonnantes concessions au duc de Wurtemberg. Cette politique réussit et les subsides aidant, on put voir les reîtres allemands combattre dans les rangs catholiques contre d’autres reîtres. Du côté de l’Angleterre, favorable au protestantisme, les Guise étaient sans moyens d’action. Mais une alliance s’offraient à eux, celle de l’Espagne. Philippe II avait pris position contre la Réforme en Europe. Élisabeth d’Angleterre était son ennemie. Ainsi, en France, chacun des deux camps trouvait des alliés.

Si les interventions étrangères étaient déplorables, celle de l’Espagne, semblait à ce moment la moins dangereuse. Catherine elle-même y avait recouru pour intimider le roi de Navarre, menacé dans son État, et la manœuvre avait été efficace. Ensuite l’entente du parti catholique avec l’Espagne se faisait par les voies régulières et diplomatiques, tandis que le parti protestant, parti rebelle, bien qu’il s’en défendît, était en mauvaise posture pour négocier. Élisabeth lui donna son appui moyennant des gages : la remise du Havre d’abord et plus tard la restitution de Calais. Condé et Coligny qui signèrent cette convention ont nié qu’ils eussent voulu trahir. Cependant ils livraient leur pays.

On a comparé l’année 1562 à 1793. Ce fut en effet une année de massacres et de terreur où aucun des partis n’épargna l’autre : Montluc et le baron des Adrets, dans le Midi, ont attaché leur nom à ces luttes impitoyables. Mais la Révolution a détruit moins de monuments, d’églises, de tombeaux et de statues, car les protestants s’en prenaient aux « images ». Beaucoup de lieux de France montrent encore les ruines de ce temps-là. Cependant la carte des opinions et des religions a sensiblement changé. Car si, au sud, catholiques et protestants, personnifiés par Montluc et des Adrets, sont toujours restés en présence, l’Ouest, en partie calviniste, au seizième siècle a vu la défaite de la Réforme. C’est en Normandie, où Condé et Coligny trouvaient leur appui principal, que la bataille se livra. Parti pour protéger le Havre contre les Anglais et reprendre Rouen, Guise rencontra Condé et Coligny près de Dreux et remporta une victoire difficile mais une victoire. Il lui restait à s’emparer d’Orléans, une des places du protestantisme, lorsqu’il fut assassiné par Poltrot de Méré (1563). À ce guet-apens, le fils de François de Guise répondra dans la nuit de la Saint-Barthélemy. À la guerre civile et religieuse, ce crime ajoutait la vendetta.

En attendant, les événements avaient travaillé pour Catherine de Médicis. Le duc de Guise, ce roi non couronné, et l’incertain roi de Navarre, tué au siège de Rouen, étaient morts. Le triumvirat cessait d’exister. Le prince de Condé et les protestants étaient vaincus. Catherine, qui avait compris la force du parti catholique, mit à profit ces circonstances. Le parti calviniste était découragé, fatigué de la lutte. Elle le divisa. Elle offrit la paix à Condé et aux gentilshommes protestants, leur accordant la liberté du culte qui était refusée à quiconque ne pouvait célébrer la Cène en privé et dans son château. Ainsi l’aristocratie protestante avait satisfait son point d’honneur et semblait abandonner la plèbe. Un coup était porté au parti, mais c’était loin d’être le coup de grâce.

À peu près en ce temps, Catherine de Médicis se comparait à Blanche de Castille qui avait dissous une révolte des grands par son habileté et qui n’avait pas voulu que la monarchie fût souillée du sang des Albigeois. Pendant cette accalmie, où Charles IX atteignit sa majorité, l’autorité et les traditions royales se relevèrent. La reine mère, qui gardait la haute direction, croyait avoir trouvé cette fois la vraie formule de l’équilibre : un gouvernement catholique avec le respect de la justice légale pour les huguenots. Catherine se flattait d’avoir rétabli la tranquillité du royaume et d’avoir su mieux s’y prendre que Philippe II qui ensanglantait les Pays-Bas. Catherine de Médicis était trop optimiste. La tranquillité était fort incertaine. Le parti protestant n’était pas assez vaincu pour se contenter de la place qui lui était faite et pour ne pas se redresser. Il comptait des fanatiques qui aspiraient a reprendre la lutte et qui, pour ranimer les énergies, exploitaient tous les incidents. Ils finirent par entraîner Coligny qui, s’inspirant à la fois de La Renaudie et de François de Guise, de la conjuration d’Amboise et du coup d’État de Fontainebleau, voulut, avant de recommencer la guerre, s’emparer de la personne du roi. Se proposait-il de dominer. Charles IX ou de le, remplacer par un Bourbon ? Avait-il les arrière-pensées républicaines que croit découvrir Michelet ? Son échec ne permet pas de le savoir. Malgré l’aveuglement de L’Hospital, qui ne voulait pas croire à tant d’audace, le coup de Coligny fut manqué et Charles IX, après avoir failli être pris à Meaux, put se réfugier à Paris.

Les protestants avaient commis une faute grave. Ils obligeaient la monarchie à les regarder comme des rebelles, et ils détournaient d’eux le tiers parti qui, avant tout, respectait la couronne. L’Hospital, rendu responsable de ce qui avait failli arriver, dut quitter le pouvoir. L’influence revint aux Guise et la répression commença. L’armée royale était si peu puissante qu’en deux ans, malgré des succès (à Jarnac, où le prince de Condé fut tué, et à Montcontour), elle ne parvint pas à écraser la sédition. Coligny avait pour point d’appui La Rochelle d’où il communiquait par mer avec ses alliés protestants d’Angleterre et des Pays-Bas. Parfois il réussissait à donner la main à d’autres forces calvinistes formées dans le Centre ou dans le Midi, venues de Hollande ou d’Allemagne, et il en parut jusqu’en Bourgogne. Cette troisième guerre civile finit encore par épuisement mutuel. Et puis Charles IX désirait se réconcilier avec les protestants pour des raisons de politique intérieure. Une transaction ne valait elle pas mieux que ces guerres qui ruinaient la France ? En outre, la maison de Lorraine redevenait bien puissante, bien exigeante, et le jeune Henri de Guise, le fils de François, commençait à porter ombrage à la couronne. Au-dehors, on avait à se méfier de Philippe II dont « l’alliance catholique » était peu sincère et qui n’était pas fâché que la France s’affaiblît par ses divisions. Toujours conseillé par sa mère, élevé dans la politique du tiers parti, Charles IX, qui avait même eu pour nourrice une protestante, n’avait pas de haine pour les calvinistes. Il désirait se réconcilier avec eux. Déjà il leur avait accordé la liberté de conscience. Par la paix de 1570, il leur donna encore la liberté du culte, sauf quelques restrictions en vue de l’ordre public, et quatre « places de sûreté », La Rochelle, Cognac, La Charité et Montauban.

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