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7 mars 1618 : incendie du Palais de Justice de Paris

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Éphéméride, événements
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7 mars 1618 : incendie du Palais
de Justice de Paris
(D’après « Les grands incendies » (par Maxime Petit) paru en 1882
et « Le Palais de Justice et la Sainte-Chapelle de Paris. Notice historique
et archéologique » (par Henri Stein) paru en 1912)
Publié / Mis à jour le jeudi 7 mars 2024, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 5 mn
 
 
 
Les premiers arrivés trouvèrent les combles de la Grand-Salle et une partie des boutiques en feu, les flammes, alimentées par le bois sec et vernissé des combles, gagnant bientôt la Chambre des Requêtes, le greffe du Trésor puis une tourelle près de la Conciergerie, les prisonniers en danger étant évacués tandis que des flammèches ardentes tombaient sur la tour de l’horloge et sur le quai

On a souvent cité le quatrain que fit à cette occasion le poète et académicien Marc-Antoine Girard de Saint-Amant (1594-1661) :

Certes ce fut un triste jeu,
Quand à Paris Dame Justice
Se mit le Palais tout en feu,
Pour avoir mangé trop d’épice.

Précisons que les épices des juges étaient des dragées ou des confitures que donnaient au juge ou au rapporteur ceux qui gagnaient un procès, ces épices étant plus tard converties en argent, et de volontaires devenant une taxe due.

Quelle fut la cause de l’incendie survenue la nuit ? Faut-il en accuser « la chambrière du concierge, qui aurait incurieusement laissé un bout de flambeau sur un banc d’un marchand, dont le feu s’était pris à une corde, qui l’avait porté aussitôt aux hauts étalages, faits de bois sec, de papier et de toile cirée, et de là avait gagné le toit » ? Ne vaut-il pas mieux voir dans cet incendie l’œuvre de quelques hauts personnages compromis dans le procès Ravaillac, dont les pièces étaient déposées au greffe ?

Intérieur de la Grand-Salle du Palais de Justice de Paris avant l'incendie de 1618. Gravure de Jacques Ier Androuet du Cerceau réalisée vers 1580
Intérieur de la Grand-Salle du Palais de Justice de Paris avant l’incendie de 1618. Gravure
de Jacques Ier Androuet du Cerceau réalisée vers 1580

Les historiographes contemporains ne nous donnent aucun détail à ce sujet, et plusieurs attribuent la catastrophe au hasard, à la fatalité. Le 7 mars 1618, vers deux heures du matin, le feu prit à la charpente de la Grand-Salle du Palais de Justice de Paris. Cette salle se divisait en deux nefs parallèles, soutenues par des piliers de bois richement décorés et surmontés d’un lambris d’or et d’azur. Elle était entourée des statues de tous les rois de France jusqu’à Charles IX, et éclairée par des fenêtres en ogive garnies de vitraux de couleur.

À l’extrémité occidentale se trouvait la fameuse table de marbre sur laquelle les clercs de la basoche élevaient leur théâtre pour jouer les mystères, soties, farces ou moralités. Le roi et sa famille y prenaient place comme convives les jours de grande cérémonie. À l’autre extrémité, on voyait la chapelle élevée par Louis XI, qui s’y était fait représenter agenouillé aux pieds de la vierge. Cette chapelle était en bois, dédiée à saint Nicolas, et l’on y célébrait chaque année la messe rouge à la rentrée du parlement. La Grand-Salle contenait en outre des boutiques adossées aux quatre premiers piliers, des bancs pour les procureurs, les avocats, les clercs et les solliciteurs.

Suivant Étienne Richer qui s’exprime dans Le Mercure Français, la sentinelle de garde au Louvre, du côté de la Seine, aperçut comme un cercle de feu sur la couverture du monument. « Peu après, des chantres de la Sainte-Chapelle, qui avaient leurs logements du côté qui regarde (la rue) Saint-Barthélemy, et quelques voisins, à un cri qui se fit, au feu ! au feu ! aperçurent ce cercle qui s’agrandissait peu à peu, et était de la grosseur d’un tonneau, justement sur la pointe proche des Consultations — chambre où les avocats s’assemblaient pour consulter —, logis du concierge. Le guet, qui garde d’ordinaire la grande porte de la cour du Palais, s’était levé dès la minuit. On heurtait aux portes de la Grand-Salle, on criait au feu par le dehors ; mais le premier somme où étaient le concierge et ses domestiques fut la cause qu’ils n’en entendirent rien. »

Ce que voyant, des marchands et quelques chantres défoncèrent une petite porte qui conduisait à la galerie aux Merciers, et arrivèrent dans la Grand-Salle : quatre boutiques étaient en feu ainsi que le comble, fait de bois sec et vernissé. Bientôt, les solives et les chevrons commencèrent à tomber sur les boutiques des marchands, sur les bancs des procureurs et sur la chapelle Saint-Nicolas, où se trouvaient une grande quantité de torches et de cierges : cette circonstance donna lieu à un embrasement général, qui mit en fuite les marchands et le concierge, réveillé enfin par les cris de la foule. La partie du comble contiguë aux Consultations tomba la première ; la partie médiane et celle qui touchait la Conciergerie s’effondrèrent peu de temps après.

Les boutiques de la galerie du Palais de Justice de Paris du temps de Louis XIII. Lithographie réalisée vers 1860
Les boutiques de la galerie du Palais de Justice de Paris
du temps de Louis XIII. Lithographie réalisée vers 1860

Le greffier Voisin parvint à entrer dans ses greffes, dont il emporta les registres. On sauva également ceux du greffe du Trésor et ceux du Parquet de messieurs les gens du roi ; mais presque aussitôt le feu embrasa les Requêtes de l’hôtel, le greffe du Trésor, la première Chambre des enquêtes, le Parquet des huissiers, la tourelle voisine de la Conciergerie et la porte du perron — cette dernière faisant communiquer la Grand-Salle avec la galerie aux Merciers ou Petite Salle. C’est alors qu’on entendit les cris des prisonniers de la Conciergerie, qui appelaient au secours, disant que la fumée les suffoquait : le procureur général donna l’ordre de conduire les détenus aux prisons du Châtelet et du For-l’Évêque ; mais plusieurs s’échappèrent à la faveur du tumulte.

À ce moment, « les couvreurs, les charpentiers et plusieurs autres personnes, montés sur le toit de la cour des Aides, découvraient en diligence le côté vers la Grand-Salle, sciant les solives et chevrons, et renversant de dessus les gros murs, dans ladite Grand-Salle, les bouts flambants des grosses poutres traversières, pour couper le chemin au feu. Ce fut lors qu’on commença à reconnaître que de ce côté-là, il ne passerait plus outre. » (Le Mercure Français)

De leur côté, le premier président, le procureur général, le lieutenant civil, le prévôt des marchands, l’avocat général, organisèrent des secours pour sauver la galerie aux Merciers. Le prévôt des marchands ordonna aux habitants des ponts les plus voisins et des rues de la Cité contiguës au Palais, de tirer de l’eau de la Seine et des puits, « et de la répandre dans le ruisseau pour la faire couler de là dans la cour du Palais, où il se forma en moins de rien un lac qui fournit abondamment toute l’eau dont on eut besoin. On se servit aussi de quantité de foin mouillé et de fumier », nous apprend Michel Félibien dans le tome II de son Histoire de la ville de Paris paru en 1725

Lorsque le reste du comble tomba, un brandon fut poussé par le vent sur la tour de l’Horloge et mit le feu à un nid d’oiseau ; mais on s’en aperçut à temps. La brise était si forte qu’elle emporta des ardoises jusque dans le quartier Saint-Eustache. On ne put sauver que les tours rondes de la Conciergerie, la tour de l’Horloge, la Grand-Chambre, la cour des Aides et la galerie aux Merciers ; mais l’incendie. consuma la table de marbre, la chapelle et les statues. On sait que Charles VII avait fait taillader au visage celle d’Henri V d’Angleterre, qui, proclamé roi de France, avait voulu figurer à côté des souverains français : ce fut à ces mutilations qu’on reconnut la statue de l’étranger, au milieu des décombres.

Palais de Justice de Paris à la fin du XVIIIe siècle. Peinture de Pierre-Antoine Demachy (1723-1807)
Palais de Justice de Paris à la fin du XVIIIe siècle. Peinture de Pierre-Antoine Demachy (1723-1807)

Le lendemain, le parlement rendit l’arrêt suivant : « Ce jour, la Cour, toutes les chambres assemblées, pour adviser sur l’incendie cette nuit arrivé au Palais, qui a embrasé et réduit en cendres la Grand-Salle, première des Enquêtes, Parquet des huissiers et autres commodités, après avoir ouy les gens du roy, la matière mise en délibération, A ARRESTÉ que présentement deux de messieurs les présidens et quatre conseillers se transporteront vers le roy pour luy faire entendre l’accident survenu, sçavoir s’il aura agréable que la Cour continue l’exercice de la justice en ce lieu, et le supplier de pourveoir au restablissement, et jusques à ce, trouver bon que les advocats et procureurs ayent les galleries et salles de la Chancellerie pour faire leurs charges. A ordonné et ordonne que pardevant MM. Guillaume Bernard et Guillaume Des Landes, conseillers du roy, visitation sera faite des dits lieux, et rapport de l’estat, et par eux (sera) informé à la requête du procureur général comme l’incendie est advenu... »

Le reste de l’arrêt enjoignait aux huissiers de la Cour et des Enquêtes, aux procureurs et aux avocats, de représenter les registres, pièces et titres qu’ils avaient pu sauver, sous peine de se voir interdire désormais l’accès du Palais. Ordre était donné à tous ceux qui avaient emporté quelques sacs, procès, minutes, ou autres papiers semblables, de les remettre entre les mains de Jean du Tillet, greffier de la Cour.

Six semaines s’étaient à peine écoulées depuis l’incendie, que des lettres patentes furent signées par le roi (18 avril), suivies d’un arrêt du Conseil du 19 juin 1619. Ce fut aussitôt le signal d’une série de travaux, payés par l’aliénation de terrains vagues des fossés Saint-Germain, et confiés à l’architecte Salomon de Brosse ; on les entreprit avec zèle, malgré quelques lenteurs inévitables et arrêts forcés : dès le 6 avril 1619, les gens des Enquêtes vinrent protester et se plaindre de l’incommodité résultant pour eux du voisinage des ouvriers qui élevaient un mur devant leur fenêtre ; la Cour décida de suspendre jusqu’à nouvel ordre, mais on peut supposer que ce ne fut pas pour longtemps.

Toutefois, nous ne trouvons plus trace de travaux importants, indépendamment de la reconstruction de la Grand-Salle, jusqu’en 1638. À cette époque, on songe sérieusement à agrandir le Palais qui n’est plus ni assez spacieux ni assez commode pour tous les services qu’il renferme. On possède plusieurs lettres du président Molé, très significatives à cet égard : il s’agit aussi de réparations à exécuter à la Cour des Aides, de dégagements à effectuer avec une nouvelle issue du côté du quai pour le passage des carrosses, de restaurations de toitures et de cheminées. Des lettres patentes du 29 avril 1639 autorisent cette nouvelle campagne.

Salle des pas perdus du Palais de Justice de Paris après l'incendie de 1871. Gravure de Gabrielle Niel (1831-1919)
Salle des pas perdus du Palais de Justice de Paris après l’incendie de 1871.
Gravure de Gabrielle Niel (1831-1919)

La nouvelle Grand-Salle, qui s’appela dès lors Salle des Pas-Perdus resta debout jusqu’en 1871. Huit piliers supportant des arcs en pierre la partageaient dans sa longueur en deux vaisseaux égaux. Mais l’architecte eut le tort de ne pas tenir compte du nouveau mode de construction substitué à l’ancien, ni des matériaux en pierre par lesquels il remplaçait le bois ; il plaça les piles de la nouvelle salle sur les vestiges de l’ancienne (qui n’en avait que sept), et ne s’aperçut pas que celles-ci étaient en porte à faux sur la partie inférieure.

Ce vice de construction amena des désordres constatés en 1812, et compromettants à ce point qu’il fallut dès 1817, tant la progression était effrayante, rétrécir les arcs de la salle basse au moyen d’autres arcs qui en doublaient l’épaisseur. Ce fut l’œuvre de Peyre. Bien qu’on eût ainsi remédié au mal, la Grand-Salle manquait de solidité lorsque survinrent les événements de la Commune.

 
 
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