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Lettre de change. Origine

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Un mot sur l’origine de...
Aux origines des inventions, découvertes, traditions, institutions, coutumes. Leurs balbutiements, les circonstances dans lesquelles elles ont vu le jour.
Lettre de change
Publié / Mis à jour le mardi 1er mai 2018, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 4 mn
 
 
 
Si c’est à Athènes que l’on trouve les premiers exemples du trafic d’argent, la lettre de change, qui prend vie dans la Rome antique afin de faciliter les transactions commerciales des voyageurs se rendant au loin, est d’un usage courant au milieu du XIIIe siècle, avant de susciter nombre d’idées pour augmenter bénéfices et épargnes

C’est dans la ville d’Athènes que le change avait constitué le fonds primitif et la base du commerce d’argent, Rome lui emboîtant le pas lorsqu’elle eut des rapports plus intimes avec la Grèce. Mais, dans ces deux villes, et ensuite dans tous les grands centres commerciaux de l’Italie, vinrent se joindre des affaires spéciales d’argent, bientôt objet capital ; en sorte que le change de monnaies et de métaux précieux non monnayés ne fut conservé que comme accessoire.

Or, les changeurs ne s’occupant que de monnaies, ils acquirent une grande expérience dans les affaires concernant le calcul et les paiements, ainsi que dans la tenue des livres ; ils furent chargés par les personnes considérables de l’État, souvent absentes, du soin de leurs affaires financières et des paiements de ce qu’elles devaient. Pour ces peines, les changeurs recevaient une rétribution convenue entre eux (Voir Polybe, Histoire générale).

Maison de change florentine. Gravure (colorisée ultérieurement) extraite de Libro che tracta di mercantilie e usanze de' paesi (1490)

Maison de change florentine. Gravure (colorisée ultérieurement)
extraite de Libro che tracta di mercantilie e usanze de’ paesi (1490)

Mais il y avait encore une autre branche de commerce plus importante. Il était gênant et surtout dangereux pour les voyageurs qui se rendaient au loin, principalement au delà des mers, d’emporter beaucoup d’argent comptant. C’est pourquoi certains banquiers de Rome, qui était pour l’Italie ce qu’Athènes fut pour la Grèce, c’est-à-dire la place principale pour le change, étaient convenus réciproquement d’accepter des sommes des voyageurs et de les rembourser (Cicéron, lettre 24 du XIIe livre, à Atticus. Id., au même, lettre 15 du XVe livre).

On sait que le banquier auquel on faisait un dépôt délivrait un mandat pour la somme déposée, qui devait être remboursée. Ce trafic d’argent était surtout en usage chez les banquiers italiens, principalement chez ceux de la Toscane et de la Lombardie ; mais il établit encore d’autres rapports. Au moyen de ces relations, les banquiers procurèrent aux négociants la facilité d’opérer leurs paiements à l’étranger, ainsi que d’encaisser pour eux ce qui leur était dû.

Les sommes reçues pendant un marché étaient déposées chez un banquier du lieu, contre un reçu, ou échangées contre un simple mandat. Dans tous les cas, le débiteur adressait le créancier à la maison où il avait déposé de l’argent. Ce genre de paiement était en usage dès le milieu du XIIIe siècle.

Innocent IV, dans sa haine peu chrétienne pour l’empereur Frédéric II, pour lequel il manifesta son respect bien involontairement, en le nommant le Grand Dragon, comme le rapporte Mathieu Paris, soutenait Henri, surnommé Raspon, antiroi des Romains ; il lui envoya la somme de vingt-cinq mille marcs d’argent, qu’il lui fit parvenir en Allemagne par un banquier vénitien et qui fut payée à Francfort.

Il est probable que l’usage des mandats d’argent s’éleva dans les grandes villes commerciales de la Méditerranée ; une des principales dans l’espèce et des plus anciennes, fut Barcelone dès le XIIIe siècle. Mais cet usage se trouve aussi dans les Pays-Bas et en Angleterre, et, là, il fut facilité par les banquiers italiens. Ce fut de la sorte qu’en 1307, des sommes reçues en Angleterre pour l’évêque de Rome, furent envoyées en Italie.

Lors de la grande extension du commerce, au XIVe siècle, lors de la diversité croissante des relations entre négociants, cherchant à abréger les transactions, à augmenter les bénéfices et les épargnes, qui suscitèrent une infinité d’inventions et d’idées, les négociants firent incessamment un pas de plus dans les villes maritimes du sud de l’Europe et dans celles des Pays-Bas. Sans intermédiaires de banquiers, ils commencèrent à aviser, pour des paiements importants et à de grandes distances, réciproquement leurs débiteurs et créanciers, à échanger leurs demandes et leurs créances.

Cette manière d’acquittement était déjà parfaitement développée au commencement du XIVe siècle. Certains termes d’acquittement même étaient déjà traditionnels parmi les négociants des villes commerciales les plus importantes. Ces rescriptions étaient appelées lettres, parce qu’elles étaient rédigées dans la forme épistolaire, et, en effet, lettres de change, parce qu’elles constituaient effectivement un change, un change d’argent ; car il fallait nécessairement que la monnaie du lieu de la rescription, ainsi que celle du lieu de paiement, fussent calculées et portées en compte en proportion de leur différence.

Les plus anciennes lettres de change dont les copies aient été conservées datent du XIVe siècle et du commencement du XVe ; elles sont toutes des premières de change. La première est de l’année 1325, émise à Milan et payable à Lucques à cinq mois de date. La seconde est de l’année 1381, émise à Bologne, payable à Venise, selon l’usage (ad usanza). La troisième est de l’année 1404, émise à Bruges, payable à Barcelone, également selon la coutume.

Le mode de paiement par rescription ou par lettre de change est donc dû aux banquiers ou changeurs et leurs compagnies ; ils surent aussi s’immiscer dans les affaires de change des grandes maisons de commerce, et commencèrent enfin le trafic de ces lettres de change.

Il était d’usage, dans les grands marchés de la Champagne, que les vendeurs laissassent partir leurs clients sur parole avec les marchandises achetées, en en fixant le paiement au marché suivant, moyennant une reconnaissance, ou bien en se faisant remettre une reconnaissance, ou, enfin, en acceptant un mandat par lequel le débiteur promettait d’en payer le montant par une maison étrangère et indiquée, avec laquelle le créancier serait en relation d’affaires de commerce, comme, par exemple, pour l’Italie, à Florence et Gênes.

L’époque de paiement était convenue à l’amiable, ou bien on suivait dans ces marchés ou centres commerciaux, l’usage établi et suivi généralement. Quiconque ne faisait pas honneur à un mandat de paiement, perdait toute confiance publique et ne pouvait plus se présenter sur les marchés en question. Mais il existait aussi, pour favoriser les affaires dans ces marchés, entre les Pays-Bas, l’Italie et le sud de la France, dès le commencement du XIVe siècle , des dispositions légales en vertu desquelles de mauvais débiteurs étaient contraints à l’exécution de leurs engagements par des moyens rapides et sévères, appelés, dans l’ordonnance de Charles IV, de l’année 1327 : « Exécution par mandement de foire ».

Dans le dessein de profiter d’une manière également prompte des dispositions légales, de faux créanciers eurent l’idée de stipuler avec leurs débiteurs d’émettre leurs lettres de change comme s’ils avaient acheté leurs marchandises dans une foire champenoise, ce qui est prouvé par une ordonnance de Philippe IV de l’année 1311. Il est impossible de méconnaître que l’origine et la sévérité du droit de change datent de ces centres commerciaux, sévérité rendue nécessaire par les relations commerciales particulières de négociants de pays éloignés.

Le changeur Orazio Lago, sa femme et un client. Peinture de Leandro Bassano (vers 1590)

Le changeur Orazio Lago, sa femme et un client. Peinture de Leandro Bassano (vers 1590)

Dans le courant du XIVe siècle, on prit également soin, dans d’autres grands marchés, d’assurer par la législation, dans des modes différents, les paiements aux créanciers qui avaient droit de l’exiger, sur la présentation de lettres de change. Ce fut dans ce but que les villes de Gand, de Bruges et d’Ypres émirent l’ordonnance que, lorsque des négociants de la hanse allemande étaient avisés à des banquiers établis dans ces villes, et que ceux-ci ne payaient pas la lettre de change, l’ensemble de la bourgeoisie devait en être responsable.

Le conseil de Barcelone ordonna que quiconque recevait une lettre de change tirée sur lui, devait, à présentation, en déclarer dans les vingt-quatre heures l’acceptation et la promesse de paiement. Cette déclaration devait être écrite sur le verso de la lettre de change, en spécifiant le jour et l’heure de la présentation.

Par nécessité et la position géographique de Venise, où le colportage d’argent comptant était plus incommode qu’ailleurs, les négociants considérables de cette ville furent conduits à une constitution par laquelle les paiements de réciprocité étaient rendus beaucoup plus faciles. Ils établirent des compagnies financières, dont les membres déposèrent dans la caisse certaines sommes, surveillée pour en assurer l’administration et les dépôts qui s’y faisaient. C’est à cette caisse qu’ils adressaient leurs créanciers ; la somme payée par le débiteur était inscrite dans un livre tenu à cet effet : on y notait ensuite la somme que le créancier avait encore à sa disposition.

Ces compagnies vénitiennes sont l’origine des banques à virement. Mais elles ne datent assurément pas du XIIe siècle, et, en leur assignant cette date, on confond l’emprunt public fait par Venise en 1171, ainsi qu’il est arrivé à Daru dans son Histoire de Venise.

 
 
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