Jean Boullard nous fait partager sa parfaite connaissance des habitants du pays d’Auge, avec une profonde tendresse, teintée d’une complaisance certaine pour les traits les plus noirs de leur caractère, qu’il n’hésite cependant pas à nous dévoiler. Il les définit ainsi : « Le Normand a un sens inné de son intérêt. C’est à croire qu’il possède des antennes pour l’avertir du danger ou le mettre sur la piste de quelque bonne affaire () L’Augeron, en particulier, est réaliste, férocement réaliste quand il s’agit d’acquérir un champ au meilleur compte ».
Son désir de tirer son épingle du jeu l’amène parfois, à rivaliser de « roublardise » face à un adversaire qui n’est pas prêt à s’en laisser compter ; mais l’entêtement n’est jamais très loin, le poussant parfois à commettre l’irréparable, au détriment de ses proches, qu’il n’hésitera pas à sacrifier, à l’occasion. Sa cupidité est à la mesure de son avarice. À l’heure de l’agonie de sa femme, non seulement il marchande les honoraires du médecin mais il garde encore l’esprit assez clair pour duper le praticien. Loin de se laisser impressionner par ceux qui sont plus instruits que lui, il saura utiliser et détourner leurs conseils pour en tirer le plus grand bénéfice. Paresse, mauvaise foi, égoïsme et misogynie sont aussi au rendez-vous.
Mais malgré tous les défauts de ces protagonistes, le lecteur partagera très vite les sentiments de Jean Boullard à leur égard. Grâce à son humour, la sympathie s’installe dès les premières pages. Comment ne pas apprécier le simple bon sens qui annihilera en quelques secondes...
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