LA FRANCE PITTORESQUE
10 mai 1794 : exécution de madame Elisabeth
(Philippine-Marie-Hélène de France),
soeur de Louis XVI
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Publié le jeudi 9 mai 2013, par Redaction
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La première enfance de cette princesse annonça quelques traits de ressemblance morale avec celle du célèbre duc de Bourgogne, son bisaïeul. L’éducation et la piété agirent sur elle comme elles l’avaient fait sur le prince ; et, en dégageant ses vertus d’une sorte d’impétuosité fougueuse, leur laissèrent cependant une admirable fermeté.


Madame Elisabeth, par Alexandre Kucharski

Dernier enfant du dauphin, fils de Louis XV, née le 3 mai 1764, madame Elisabeth se distingua de bonne heure, dans une cour brillante et corrompue, par la pureté de son âme et la maturité de sa raison. Ces précieuses qualités, jointes à une beauté peu commune, devaient lui susciter des prétendants nombreux parmi les princes de l’Europe : des raisons politiques ayant fait manquer diverses unions, madame Elisabeth se consacra, comme un ange gardien, au salut d’une famille que la foudre commençait à menacer ; mais, sans pouvoir l’en garantir, elle l’attira sur elle-même.

Lorsque l’embarras des finances nécessita des économies, madame Elisabeth voulut qu’à l’insu de son frère les premières réformes portassent sur sa propre maison, sur ses amusements favoris. Le long et rigoureux hiver de 1789 attesta son inépuisable bienfaisance, et dès le prélude des excès, son courage s’éleva jusqu’à l’héroïsme. Vainement son frère voulut-il la forcer à quitter la France , en même temps que ses tantes, les filles de Louis&nsp;XV ; plus le danger redoublait, plus madame Elisabeth s’attachait étroitement au destin du roi, de la reine et de leurs enfants.

Dans la journée du 20 juin, des furieux, la prenant pour Marie-Antoinette, levaient déjà le fer sur sa tête, quand un de ses écuyers, se jetant au-devant d’eux, s’écria : « Non, ce n’est pas la reine. — Pourquoi les détromper ? dit madame Elisabeth ; vous leur auriez épargné un plus grand crime. » Dans les autres journées, cette hauteur d’âme, cette sérénité d’esprit ne se démentirent pas un seul instant.

Séparée du roi pendant son procès, madame Elisabeth ne le revit que pour lui dire un éternel adieu. Quelques mois plus tard, les mêmes douleurs se renouvelèrent, quand la reine fut appelée au tribunal, et de là à l’échafaud. Des prétextes pouvaient couvrir l’injustice de ces deux arrêts ; mais quel prétexte alléguer contre madame Elisabeth ?

Après une captivité de vingt et un mois, on vint l’arracher des bras de sa nièce : traînée à la Conciergerie, elle fut dès le lendemain jugée, condamnée, exécutée. Les femmes que l’on conduisait avec elle au lieu fatal, et dont le supplice précéda le sien, la saluèrent toutes avec respect ; elle les embrassa avec affection, et ne cessa d’adresser ses prières à Dieu, que lorsque la mort lui eut ôté la voix.

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