LA FRANCE PITTORESQUE
21 février 1513 : mort du pape
Jules II qui s’opposa vivement au
roi de France Louis XII
()
Publié le mercredi 20 février 2013, par Redaction
Imprimer cet article

Giuliano della Rovere (Julien de la Rovère), Jules II, un des papes les plus célèbres qui aient occupé le Saint-Siège, fut le successeur de Pie III. Son histoire est plutôt celle d’un guerrier que d’un pontife. Il employa, pour relever la puissance temporelle du Saint-Siège, les moyens les plus propres à lui faire perdre, s’il était possible, sa puissance spirituelle, en quoi consiste sa véritable grandeur.

Jules II

Jules II

Le premier événement qui signala son pontificat fut la construction de l’église de Saint-Pierre, ce chef-d’œuvre d’architecture, que tant de curieux vont admirer à Rome ; il en posa la première pierre en 1506. Cet édifice, un des plus beaux et le plus vaste que les hommes aient élevé à la divinité, fut bâti sur le Vatican, à la place de l’église construite par Constantin.

Jules II qui, comme ses prédécesseurs, aurait voulu chasser tous les étrangers de l’Italie, cherchait à renvoyer les Français au-delà des Alpes ; mais il voulait auparavant que les Vénitiens lui remissent les villes qu’Alexandre VI avaient prises sur eux, et dont ils s’étaient ressaisis après la mort de ce pontife. Ces républicains voulurent garder leurs conquêtes ; Jules II s’en vengea, en liguant toute l’Europe contre Venise. Cette ligue, connue sous le nom de Ligue de Cambrai, fut signée en 1508, entre le pape, l’empereur Maximilien, le roi de France, Louis XII, et le roi d’Aragon, Ferdinand le Catholique. Les Vénitiens, réduits à l’extrémité, excommuniés parle pontife romain, et battus par les autres puissances, demandèrent grâce, et l’obtinrent à des conditions assez dures. Jules II leur donna l’absolution, le 20 février 1510 ; absolution qui leur coûta une partie de la Romagne.

Ce pontife n’ayant plus besoin des Français, qu’il n’aimait pas d’ailleurs, parce qu’ils avaient traversé son élection au pontificat, se ligua contre eux la même année avec les Suisses, le roi d’Aragon et Henri VIII, roi d’Angleterre. Il n’était pas de l’intérêt des Anglais de faire la guerre à la France ; ils y furent entraînés par une galéasse chargée de vins grecs, de fromages et de jambons, que le pape envoya à Londres, précisément à l’ouverture du parlement. Le roi et les membres des Communes et de la Chambre haute, à qui l’on distribua ces présents, furent si charmés de l’attention généreuse de Jules II, qu’ils s’empressèrent tous de servir son ressentiment. Le pape ne trouvant aucun prétexte de rupture ouverte avec Louis XII, fit demander à ce prince quelques villes sur lesquelles le Saint-Siège prétendait avoir des droits : Louis les refusa, et fut excommunié.

La guerre commença vers Bologne et vers le Ferrarois. Le pape assiégea la Mirandole en personne, pour donner de l’émulation à ses troupes. On vit ce pontife septuagénaire, le casque en tète et la cuirasse sur le dos, visiter les ouvrages, presser les travaux, et entrer en vainqueur par la brèche, le 20 janvier 1511.

Sa fortune changea tout-à-coup. Trivulce, général des troupes françaises, s’empara de Bologne. L’armée papale et celle des Vénitiens furent mises en déroute. Jules II, obligé de se retirer à Rome, eut le chagrin de voir, en passant à Rimini, les placards affichés pour intimer l’interdiction du concile général de Pise. Louis XII, excommunié, en avait appelé à cette assemblée qui inquiéta beaucoup le pape. Après diverses citations, il fut déclaré suspens par contumace, dans la huitième session, tenue le 21 avril 1512. Ce fut alors que Jules, ne gardant plus aucune mesure, mit le royaume de France en interdit, et délia les sujets du serment de fidélité. Louis XII, irrité, fit excommunier à son tour Jules II, et fit battre des pièces de monnaie qui portaient au revers : Perdam Babylonis nomen : « Je détruirai jusqu’au nom de Babylone. »

Jules opposa au concile de Pise celui de Latran. C’est dans ce concile qu’il donna ce fameux décret par lequel il transférait la couronne de France et le titre de roi très chrétien, au roi d’Angleterre. Son ressentiment éclatait tous les jours par de nouvelles violences, quand il fut emporte par une fièvre causée (dit-on) par toutes les contrariétés qu’il essuyait. On a conservé une médaille que Jules II fit frapper pour transmettre à la postérité les principaux événements de son administration ; il y est représenté en habits pontificaux, la tiare en tête et le fouet à la main, chassant les Français, et foulant aux pieds l’écu de France.

Il avait ordonné au célèbre Michel-Ange de jeter en fonte sa statue. L’artiste ne sachant que mettre dans la main gauche du pontife, lui dit : « Voulez-vous, Saint-Père, que je vous fasse tenir un livre ? — Non, répond Jules, une épée ; je la sais mieux manier. » Il se glorifiait d’avoir affranchi l’Italie du joug des étrangers, en les détruisant les uns par les autres, « et de l’avoir, disait-il, purgée de ces Barbares qui l’infestaient. »

Ce pape fut le premier qui laissa croître sa barbe, pour inspirer aux peuples plus de respect. François Ier, Charles-Quint, et tous les autres rois suivirent cet exemple, qui fut adopté à l’instant par tous les courtisans, et ensuite par le peuple.

Copyright © LA FRANCE PITTORESQUE
Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.

Imprimer cet article

LA FRANCE PITTORESQUE