LA FRANCE PITTORESQUE
Semer l’argent
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Publié le jeudi 13 décembre 2012, par Redaction
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Employé à l’égard des prodigues et des dissipateurs
 

On croirait que cette expression qui s’explique d’elle-même n’a d’autre cause que le bon sens public qui a dû la produire. Mais on se trompe ; elle a pour origine un fait historique, et c’est à ce fait qu’elle doit d’être devenue proverbe, car c’en est un des plus ordinaires et des plus communément employés.

En 1474, au temps où les tournois et carrousels étaient en si grand honneur, que les seigneurs et les princes accouraient de toutes parts pour y rivaliser de richesse et de magnificence, il y eut à Beaucaire un tournoi célèbre. On l’annonça d’avance, ainsi qu’il était dans les coutumes, à son de trompe dans tous les environs ; et dans tous les castels de la Provence, on s’y prépara avec une ardeur qui devait produire des merveilles dignes des mille et une nuits.

On y vint en foule, et jamais à aucune cour, on ne fit parade d’autant de luxe et de magnificence. Un seigneur du temps, fort riche, Bertrand Raibaux, ne sachant que faire pour l’emporter en somptuosité sur tous ceux qui devaient se présenter pour ce tournoi, imagina un moyen qui devait faire parler de sa richesse à cent lieues à la ronde. Il fit atteler douze paires de bœufs à douze charrues, fit creuser de larges sillons sur l’emplacement désigné pour la fête, et ordonna qu’on l’ensemençât de pièces de monnaie pour une somme considérable alors : trente mille sols de l’époque.

Depuis ce temps, le proverbe s’empara du fait, et l’on dit en France : « Semer l’argent comme Bertrand Raibaux. » De la langue romane, cette expression est passée dans la langue française ; seulement le nom de Bertrand Raibaux étant maintenant trop éloigné de nous, on dit simplement : « Semer l’argent. »

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Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.

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