LA FRANCE PITTORESQUE
14 décembre 1649 : naissance officielle
de la prasline, bonbon aux amandes
(D’après « Bonbons de toujours » (par l’association OuYenA)
paru en 2015 et « Dictionnaire de la
gourmandise » (par Annie Perrier-Robert) paru en 2012)
Publié le jeudi 14 décembre 2023, par Redaction
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Ce jour-là, lors d’un festin qu’il offre aux jurats de Bordeaux, le maréchal du Plessis-Praslin sert une friandise aux amandes et au sucre dont il se déclare l’inventeur
 

Selon le Dictionnaire français contenant les mots et les choses, plusieurs nouvelles remarques sur la langue française (1680) de Richelet, les praslines « sont des amandes rissolées dans du sucre, amandes qu’on fait bouillir dans du sucre jusqu’à ce qu’elles soient un peu sèches et qu’elles croquent sous la dent ». Au milieu du XVIIIe siècle, les amandes à la prasline se faisaient à la poêle, « grises » (non mondées), « blanches » (mondées) ou « rouges » (alors colorées avec de la cochenille). De la même façon étaient confectionnées les avelines pralinées.

L’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert en livre la recette : « Si vous prenez pour deux livres d’amandes, une livre ou cinq quarterons de sucre ; que vous le fassiez cuire à la plume ; que vous y jetiez vos amandes ; que vous remuiez bien, pour les empêcher de prendre au fond ; que vous continuiez jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de sucre ; que vous les mettiez ensuite sur un petit feu ; que vous les y teniez jusqu’à ce qu’elles pètent ; que vous les remettiez dans la poêle, et les y teniez couvertes jusqu’à ce qu’elles soient essuyées : vous aurez des amandes à la praline grises. Si quand vos amandes ont pris sucre, vous les laissez égoutter dans un poêlon, et qu’à cette égoutture vous ajoutiez un peu d’eau, de cochenille, d’alun et de crème de tartre ; que vous fassiez bien cuire le tout, et que vous y jetiez vos amandes, vous les aurez pralines rouges. »

Les praslines de Montargis, par Mazet Confiseur

Les praslines de Montargis, par Mazet Confiseur

La prasline de Montargis est un plaisir de bouche qui n’est autre qu’une délicieuse amande enveloppée dans du sucre cuit, se présentant sous l’apparence d’une petite coque de sucre caramélisé, biscornue et granuleuse, d’une belle couleur brune et brillante, enveloppant une amande de haute qualité. Ces amandes sont triées avec soin, mondées et légèrement grillées, puis mélangées dans un sirop de sucre qui, une fois chauffé, cristallise en enrobant chaque amande. La prasline prend alors une forme oblongue, irrégulière et rocailleuse, que l’on recouvre de gomme arabique pour lui donner sa brillance et améliorer sa conservation. Cette prasline peut être concassée et mélangée avec du chocolat pour obtenir du « pralin », très souvent utilisé en pâtisserie.

Cette prasline doit son nom au duc César de Choiseul (1598-1675), comte du Plessis-Praslin, maréchal et pair de France. La date de son invention ainsi que ses circonstances restent sujettes à polémiques. Elle aurait été créée dans la maison ducale, vers 1636, par son officier de bouche Clément Jaluzot, qui se serait lui-même inspiré de la gourmandise de son marmiton raclant le caramel du fond des marmites, tout en dégustant des amandes. La preuve d’une existence de la friandise bien antérieure à 1650 est apportée par le témoignage du lexicographe et grammairien Gilles Ménage, qui écrit cette année-là dans Les origines de la langue française : « On appelle depuis quelques années amandes à la Prasline, des amandes fricassées au sucre en conserve avec la peau. D’un sommelier du maréchal du Plessis-Praslin, lequel le premier les a préparées de la sorte. »

Quoi qu’il en soit, en 1649, durant la Fronde, des troubles ayant éclaté à Bordeaux en raison de l’impopularité de Bernard de Nogaret de La Valette, duc d’Épernon et gouverneur de la Guyenne, la ville accepta d’envoyer des plénipotentiaires à Blaye, afin de discuter avec les représentants du roi d’un accord de paix. L’émissaire du roi qu’envoya Mazarin n’était autre que le maréchal de Plessis-Praslin, réputé pour ses qualités de négociateur et qui avait pris soin de demander à son cuisinier Clément Jaluzot de se surpasser, afin d’acquérir la faveur des jurats qu’il invita à dîner le 14 décembre 1649.

César de Choiseul, comte du Plessis-Praslin, maréchal de France

César de Choiseul, comte du Plessis-Praslin, maréchal de France. Dessin du XIXe siècle
de Léopold Massard, d’après Gillot Saint-Evre

C’est à cette occasion que le maréchal lui-même, faisant servir au dessert du repas des négociations, la friandise aux amandes et au sucre, s’en serait déclaré l’inventeur. Le bonbon connut un grand succès et les honneurs d’un poème :

Quand le bonbon fut fait, il n’était point commun,
Bosselé de tous sens et coloré de brun,
D’un fumet délicat qui flattait les narines,
On eût cru le produit d’une essence divine.

César du Plessis-Praslin sut conquérir le cœur des dames de la cour, lier des amitiés et avancer en politique, tout ceci contribuant à la renommée d’un bonbon dont la pérennité revient cependant à Clément Jaluzot. Prenant en effet sa retraite du maréchal, l’officier de bouche dit « La Fleur » s’installa à Montargis, sa ville natale, pour y ouvrir une boutique sous le nom de Maison de la Prasline, « en l’hôtel proche de l’église devant la porte latérale gauche », y commercialisant ses praslines.

Le comte du Plessis-Praslin disposait d’un château à Nogent-sur-Vernisson, près de cette petite cité, et son chef de cuisine avait eu l’occasion d’y faire connaître son talent lors des riches réceptions qui s’y déroulaient, notamment au moment de la chasse : la clientèle de la confiserie était donc, en partie, trouvée. L’échoppe sera rebaptisée Confiserie du Roy puis Confiserie du Château. En 1903, Léon Mazet, confiseur formé par son oncle Georges Forest, inventeur à Bourges de la célèbre forestine, et gendre du grand chocolatier Veillard de Clermont-Ferrand, racheta le commerce et l’installa dans un autre hôtel ancien sous le nom d’Au Duc de Praslin, aujourd’hui Mazet Confiseur.

En savoir plus sur Mazet Confiseur :
Site Internet : http://www.mazetconfiseur.com
Page Facebook : https://www.facebook.com/Mazetconfiseur/

En savoir plus sur les confiseries de nos régions :
Bonbons de toujours, par l’association OuYenA. Paru en 2015
>> RÉSUMÉ DE L’OUVRAGE
Dictionnaire de la gourmandise, par Annie Perrier-Robert. Paru en 2012
>> RÉSUMÉ DE L’OUVRAGE

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