LA FRANCE PITTORESQUE
Tombes à escargots pour
les chrétiens sous les Mérovingiens ?
(D’après « Bulletin de la Société d’anthropologie de Paris », paru en 1896)
Publié le samedi 10 novembre 2012, par Redaction
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En 1896, un membre de la Société d’anthropologie de Paris explique que si les sépultures païennes de la fin de l’Empire romain et du commencement des temps mérovingiens (Ve siècle) sont reconnaissables aux rares objets qu’on y rencontre et qui forment un très pauvre mobilier funéraire, les tombes chrétiennes ne renferment que les os du mort et d’assez nombreuses coquilles d’escargots
 

Les premiers chrétiens, toujours en quête de symboles, prirent l’escargot pour figurer l’immortalité de l’âme. Ce mollusque – et surtout celle de ses variétés qui est connue sous le nom d’Helix pomatia et qui est si abondamment répandue partout –, quand vient la mauvaise saison, s’enterre avec sa coquille après avoir pris soin de la fermer au moyen d’un opercule sécrété par lui-même. Il est donc, en quelque sorte, clos dans un tombeau. Au retour de la belle saison, l’animal brise la porte de son cercueil ; il renaît à la vie avec plus de force.

Sarcophages mérovingiens du Ve siècle découverts à Angers en 2008

Sarcophages mérovingiens du Ve siècle découverts à Angers en 2008

Arnould Locard, dans sa belle Histoire des mollusques dans l’antiquité (1884), nous donne les détails les plus probants sur ce symbole de l’escargot. Il nous dit qu’on a souvent observé « dans les tombeaux des chrétiens et des martyrs de la Gaule et de l’Italie, des Gastéropodes marins ou terrestres, entiers ou brisés, fixés à l’intérieur même des cercueils ou loculi, dans lesquels le cadavre était déposé lorsqu’il n’était pas soumis à la crémation. D’après M. Martigny [Dictionnaire des antiquités chrétiennes], placées dans de telles conditions, ces coquilles pouvaient être du nombre des objets que les premiers chrétiens fixaient dans la terre ou le mortier des loculi, comme signe de reconnaissance »

Locard cite des faits relevés en Gaule : « Des coquilles d’escargots, Helix pomatia et H. Aspersa, ont été trouvés dans les sarcophages. Dans la tombe de saint Eutrope, à Saintes, découverte en 1843, on a trouvé des coquilles, et M. Letronne prouve que leur introduction n’a pu être l’effet du hasard [Recueil de pièces relatives à la reconnaissance du corps de saint Eutrope]. On en a rencontré dans une sépulture mérovingienne du cimetière de Vicq, et M. l’abbé Cochet en a signalé [Normandie souterraine] un grand nombre d’exemples, dans ses fouilles, notamment près de Dieppe, à l’intérieur d’une tombe du temps de Charlemagne. Rappelons également qu’il était d’usage chez les peuples païens, de manger ces mêmes escargots sur la tombe des personnes chères ; à Pompéi, on a trouvé de nombreux amas d’escargots dans les cimetières romains. »

Ainsi, dès les temps les plus reculés, il existait un antagonisme entre les deux religions en présence. Leurs adeptes, qui ne frayaient guère ensemble durant le cours de leur vie, après la mort voulaient reposer loin de ceux qu’ils regardaient comme des ennemis.

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