LA FRANCE PITTORESQUE
Documents historiques servant
de gargousses sous la Révolution
(Extrait de « Bibliothèque de l’Ecole des chartes », paru en 1909)
Publié le mardi 6 novembre 2012, par Redaction
Imprimer cet article
Conformément au décret de l’Assemblée nationale du 13 octobre 1790, sanctionné le 19, tous les titres que les particuliers, les associations et les établissements de tous genres conservaient depuis des siècles avec un soin religieux furent déposés dans les archives des chefs-lieux de département...
 

Le comte de Laborde a rappelé jadis, dans la Revue de Paris du 1er février 1854, comment ces documents, abandonnés à des soins mercenaires, devinrent bientôt la proie de toutes les passions destructives. Les actes transcrits sur parchemin semblaient avoir une chance d’échapper à ce malheureux sort ; mais, dans un moment de folie patriotique, on les employa à la confection de gargousses : c’est par charretées que les archives de l’Etat envoyèrent aux arsenaux de la République les chartes, les ordonnances royales et les documents les plus anciens de notre histoire.

Gaspard Monge, par Elzidor Naigeon (1842)

Gaspard Monge, par Elzidor Naigeon (1842)

Une lettre écrite par Monge, pendant son passage au ministère de la Marine (10 août 1792 - 10 avril 1793), confirme ces faits et montre que les arsenaux de la Marine, aussi bien que ceux de la Guerre, utilisèrent les chartes les plus vénérables pour servir d’enveloppes aux projectiles de l’artillerie. Beaucoup d’entre elles disparurent probablement dans les ateliers de nos ports.

Voici le texte de cette lettre à entête des Ports et Arsenaux et du ministre de la Marine à celui de la Guerre : « Paris, le 23 janvier 1793, l’an 2e de la République. Je vous ai informé, mon cher collègue, de l’étendue des besoins de mon département en parchemins propres à faire des gargousses et combien il serait à désirer que vous fissiez remettre à ma disposition ceux qui peuvent exister sans utilité dans vos bureaux.

« Comme il est important que je connaisse promptement les ressources en ce genre sur lesquelles je dois compter, afin de prendre des mesures pour parvenir à ce qui manque au complet de l’approvisionnement de nos ports, je vous renouvelle cette demande et vous prie de donner sans délai les ordres nécessaires pour la recherche de ces parchemins et de m’en faire connaître le résultat. MONGE. »

Cette lettre constitue un document précis pour l’historien tenté de retracer les vicissitudes par lesquelles ont passé les parchemins de nos archives.

Copyright © LA FRANCE PITTORESQUE
Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.

Imprimer cet article

LA FRANCE PITTORESQUE