LA FRANCE PITTORESQUE
Croix de l’Ordre du Saint-Esprit
au futur Louis XV (Présentation de la)
(D’après un article paru en 1842)
Publié le lundi 11 janvier 2010, par LA RÉDACTION
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Le samedi 15 février 1710, au château de Fontainebleau, le roi Louis XIV fut réveillé à sept heures : c’était une heure plus tôt qu’à l’ordinaire. Quel événement grave nécessitait cette infraction aux règles sévères de l’étiquette ? Madame la duchesse de Bourgogne, Adélaïde de Savoie, princesse pleine de grâce et d’esprit, épouse du petit-fils du roi, l’enfant gâté, le charme et le bonheur du vieux monarque, allait être mère.

D'après un almanach orné de 1711

D’après un almanach orné de 1711

Louis XIV, d’après les détails minutieux que Saint-Simon a enregistrés dans ses Mémoires, s’habilla diligemment pour se rendre auprès de sa petite-fille. A huit heures trois minutes et trois secondes naquit un duc d’Anjou (devenu depuis le roi Louis XV, le 1er septembre 1715). Ce prince fut sur-le-champ ondoyé suivant l’usage, par le cardinal de Janson, dans la chambre même où il était né. Emporté ensuite sur les genoux de la duchesse de Ventadour dans la chaise à porteurs du roi, il fut accompagné jusqu’à son appartement par le maréchal de Boufflers et par des gardes du corps avec des officiers. Un peu après, le duc de La Vrillière lui porta le Cordon bleu, et toute la cour l’alla voir.

En moins d’une année le duc d’Anjou perdit son grand-père, sa mère, son père et son frère. Le 6 mars 1712, les deux enfants, fils de France, le duc de Bretagne et le duc d’Anjou, souffrants depuis quelques jours, furent très mal, et atteints des marques de rougeole qu’on avait vues au dauphin et à la dauphine. Le mardi 8 mars, le petit dauphin mourut un peu avant minuit. Le duc d’Anjou, âgé de deux ans, qui était destiné à un des plus longs règnes de la monarchie, fut lui-même en danger de mort. La duchesse de Ventadour, aidée des femmes de la chambre, s’en empara ; elles ne le laissèrent point saigner et proscrivirent tout remède. Grâce à leurs soins, le jeune dauphin se rétablit. On voulut voir une sorte de miracle dans sa conservation. On répandit en même temps le bruit que cet enfant, dont la convalescence fut pénible, avait été sauvé par un contrepoison apporté de Turin par madame de Verrue, et remis à madame de Ventadour.

Ces morts précipitées avaient jeté le roi, la cour, le royaume dans une profonde stupeur. Tout le monde crut à des empoisonnements, auxquels cependant l’existence et le long règne de Louis XV ont donné un démenti.

L’Ordre du Saint-Esprit, nommé aussi plus tard Cordon bleu, avait été institué par Henri III, au mois de décembre 1578, en mémoire de son élection au royaume de Pologne le jour de la Pentecôte de l’année 1573, et de sa succession au royaume de France à pareil jour de l’année suivante 1574, après la mort de Charles IX son frère. A cette époque, d’ailleurs, l’ordre de Saint-Michel se trouvait tellement avili par le grand nombre de ceux à qui on l’avait donné, qu’on l’appelait par dérision le collier à toutes bêtes.

L’an 1601, Henri IV, à la naissance du dauphin de France, qui lui succéda sous le nom de Louis XIII, lui donna la croix de l’ordre du Saint-Esprit et le cordon bleu. En 1607, il fit assembler les membres de l’Ordre, pour leur déclarer « qu’il voulait donner la croix et le cordon bleu à son petit-fils le duc d’Orléans, comme il avait fait au dauphin, et à l’avenir à tous ses enfants mâles étant en bas âge, pour les faire connaître à tout le monde par cette marque d’honneur » : usage que ses successeurs ont constamment suivi.

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