Ce jour-là, la Convention consacrait l’établissement d’un régime de Terreur, déclarant : « Le gouvernement provisoire de la France sera révolutionnaire jusqu’à la paix. »
Pour offrir aux départements insurgés une occasion de rentrer dans l’obéissance due à l’assemblée nationale, et pour répondre aux reproches d’usurpation de pouvoir, la Convention s’était hâtée, après le 21 mai et le 2 juin 1793, de faire rédiger, de décréter et de soumettre à l’approbation de la France, une constitution nouvelle.
Cette étrange conception d’Hérault de Séchelles ne pouvait pas être réalisée ; la pensée secrète de la Convention se révéla dans la rapidité avec laquelle elle vota cette loi fondamentale ; elle en discuta à peine les dispositions, et ne les approfondit pas, parce que c’était pour elle une œuvre morte, qui n’agirait jamais : c’était un moyen politique accidentel, qu’elle songeait à laisser de côté, dès qu’elle en aurait obtenu les effets qu’elle en attendait.
Aussi en ajourna-t-elle la mise en activité, sans s’expliquer sur le mode de gouvernement qui la remplacerait, parce qu’elle avait besoin de ménager encore les départements émus. Le gouvernement révolutionnaire existait donc de fait, avant qu’un décret ne lui eût donné une sorte d’existence légale, puisque la constitution, de laquelle la Convention tenait ses pouvoirs, était abrogée par la constitution nouvelle, et que cette constitution nouvelle était considérée comme non avenue.
Il est plus facile d’accoutumer les esprits aux choses qu’aux mots. Lorsque les immenses dangers de la république à l’intérieur et aux frontières, lorsque les mesures extraordinaires, adoptées pendant les mois d’août et de septembre, eurent mis tout le peuple français dans cet état d’exaltation où les propositions les plus énergiques sont accueillies avec transport ; lorsque la France (pour traduire en paroles la statue du Champ-de-Mars) eut étouffé le fédéralisme dans la fange d’un marais, et qu’il n’y eut plus de soulèvement à redouter des provinces, quelque chose qu’ôsât Paris, alors la Convention ne craignit pas, sur un rapport du sombre Saint-Just, de décréter le gouvernement révolutionnaire, c’est-à-dire, selon l’heureuse expression de Thiers, de mettre la révolution en état de siège, et de s’attribuer, à elle-même, une dictature souveraine, qu’elle devait exercer par le Comité de Salut public, par le Comité de Sûreté générale et par le tribunal extraordinaire, qui, plus tard, prit le titre de Tribunal Révolutionnaire, quand il l’eut mérité, et quand Robespierre voulut lui faire entendre ce qu’il attendait de lui.
Créé le 6 avril 1793, le Comité de Salut public est le siège des décisions du gouvernement révolutionnaire, la même équipe étant réélue tous les mois jusqu’à l’été 1794 et la chute de la Terreur. Estampe du temps |
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Par cette institution du gouvernement révolutionnaire, non seulement la constitution nouvelle, mais toutes autres lois politiques ou civiles, étaient abrogées. Ce fut en vertu de ce décret que la Convention abusa, avec une frénésie délirante, de la vie et de la fortune des citoyens français, que lui livraient les lois des suspects, de la levée en masse, des réquisitions et du maximum. Les lettres de cachet et les confiscations donnaient à l’ancien gouvernement des pouvoirs moins étendus.
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