LA FRANCE PITTORESQUE
L’Acadie, pays idyllique
baptisé en 1524 ?
(D’après « Journal de la Société des Américanistes », paru en 1920)
Publié le jeudi 29 septembre 2016, par Redaction
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Ancienne colonie française fondée en 1604 et peuplée principalement par des personnes originaires de l’Ouest de la France avant d’être conquise un siècle plus tard par les Britanniques, l’Acadie désigne aujourd’hui un territoire constitué des localités francophones du Canada atlantique
 

On a beaucoup discuté sur l’origine du mot Acadie. Ceux-ci ont voulu y voir un mot micmac — peuple amérindien de la côte nord-est de l’Amérique —, et parfois ceux-là un mot européen... Les tenants de cette dernière opinion sont ceux qui auraient vu juste, si l’on se fie à la lettre écrite à François Ier par Giovanni Verrazano (1485-1528) à la suite de son voyage d’exploration de 1524 que contient le manuscrit Celleri.

Au cours de ce voyage, Verrazano découvrit une terre « quale batezamo Archadia per la belleza de li arbori », raconte-t-il. C’est donc pour la beauté de ses arbres que cette partie des rivages orientaux du continent américain du Nord a reçu de Verrazano, sans doute en souvenir de l’antique Arcadie — région grecque présentée par les poètes comme un pays idyllique —, le nom ďArchadia.

Giovanni Verrazano

Giovanni Verrazano. Gravure de 1767, d’après l’oeuvre de Giuseppe Zocchi

Mais la partie du littoral de l’Amérique du Nord décrite par Verrazano est située bien au sud de la ci-devant Acadie, probablement au sud de New-York. Comment peut-on s’expliquer le déplacement de cette dénomination ? Et est-ce bien le même nom qui figure sur les cartes canadiennes ? Il semble que oui.

Sur la première carte connue qui porte cette dénomination — la carte de Gastaldi de 1548 —, Larcadia se trouve exactement dans le même rapport, avec les autres noms donnés par Verrazano (Angoulême et Refuge, par exemple) que dans le manuscrit Celleri. En outre, la carte de Gastaldi est une carte de la Nouvelle-France (elle est intitulée Tierra Nueva) et elle porte Larcadia dans sa partie ouest, dont la topographie tout entière est si résumée entre ce nom et le Cap Breton que la dénomination Larcadia semble englober toutes les côtes de la Nouvelle-Ecosse.

Dans les cartes qui procèdent du type Gastaldi — et nombre d’entre elles adoptent la forme Larcadia ou Arcadia — , ce nom se trouve à peu de distance dans l’ouest du Cap Breton ; parmi elles, une carte très détaillée de 1560 environ appelle Arcadia une péninsule parallèle à la côte, exactement à l’Ouest du golfe du Saint-Laurent. Il faut en outre tenir compte d’une autre carte, d’un type différent du travail de Gastaldi, qui est datée de 1580 et signée F. Simon ; les mots Larcadia Provincia s’y étalent en grands caractères sur les territoires du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Ecosse d’aujourd’hui.

C’est sans aucun doute de quelques-unes de ces cartes que Champlain a tiré le terme Arcadie, dont il se sert dans son traité Des Sauvages, écrit en 1603. C’est là aussi que le rédacteur de la commission destinée au sieur de Monts (cette commission date de la même année 1603) a pris, en omettant l’R, le nom La Cadie, qui figure dans ce document. Et de là, par la chute de l’L initiale, au mot Acadie, le pas est très aisé à franchir.

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