LA FRANCE PITTORESQUE
2 septembre 1679 : mort de Jacques Bailly,
peintre en miniature
(D’après « Le peintre-graveur français » (Tome 2) paru en 1836,
et « Description de Paris, de Versailles, de Marly, de Saint-Cloud,
de Fontainebleau et de toutes les autres belles maisons
et châteaux des environs de Paris » (Tome 2) édition de 1742
et « Nouvelles archives de l’art français » (Tome 6) paru en 1890)
Publié le samedi 2 septembre 2023, par Redaction
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Peintre en miniature, Jacques Bailly naquit à Graçay, dans le Berry, vers 1629, et mourut à Paris le 2 septembre 1679. Membre distingué de l’Académie royale de peinture, il obtint du roi un logement aux galeries du Louvre. Il excellait à peindre les fleurs, les fruits et les ornements, qu’il inventait et dessinait avec beaucoup d’art. Il gravait très bien à l’eau-forte, et avait un secret particulier pour peindre sur les étoffes.

André Félibien nous fournit la majeure partie de ces renseignements ; mais Jean-Aymar Piganiol de la Force ajoute que notre artiste avait aussi le secret de rendre les couleurs mordantes au point de pénétrer le marbre si profondément, que, sciant sa première surface, le sujet peint était encore tellement apparent, qu’on pouvait obtenir plusieurs tableaux au lieu d’un.

Mais les drogues que Bailly mêlait à ses couleurs étaient si fortes, que, malgré le masque de verre dont il se précautionna dans ses essais, elles lui portèrent avec violence à la tête : il en fit l’essai sur un morceau de marbre épais de quatre doigts, et mourut vingt-quatre heures après qu’il eut fini cet ouvrage. Colbert, à qui il avait communiqué son secret, ayant appris sa mort, envoya prendre ce morceau de marbre où il avait peint un mascaron, dans la bouche duquel était une petite corne d’abondance d’où sortaient des fleurs et des fruits. On ne sait ce qu’est devenu ce petit tableau, et par la mort de ce lui qui l’avait peint, on a perdu son secret.

Enluminure de Jacques Bailly parue dans une édition spéciale du Labyrinthe de Versailles de Charles Perrault et Sébastien Leclerc (1675)

Enluminure de Jacques Bailly parue dans une édition spéciale du Labyrinthe de Versailles
de Charles Perrault et Sébastien Leclerc (1675). Le bosquet du Labyrinthe de Versailles
fut aménagé par André Le Notre à partir de 1668 dans
les jardins du château, et fut détruit en 1775

Nous devons à la pointe énergique et pleine d’esprit de Jacques Bailly un recueil de douze planches représentant des fleurs fort habilement gravées et portant le titre suivant gravé sur la première feuille : Diverses fleurs mises en bouquets, dessinées et gravées par J. Bailly, peintre du Roy, qui se vendent à Paris, aux galleries du Louvre, chez led. Bailly, avec privilège de Sa Maj. Les bouquets, amenés à l’effet par un seul jet de travaux simples, sans aucune contre-taille, se détachent sur un fond entièrement blanc. Ils sont traités avec une précision qui décèle une flexibilité de talent extrêmement remarquable. Il est d’autant plus difficile de rencontrer ces pièces, que les fabricants d’étoffes, curieux d’aussi beaux modèles, les retirèrent constamment de la circulation pour en enrichir leurs recueils.

Voici le texte du privilège visé sur ce titre, le recueil ayant paru en 1670 :

« Permission de faire imprimer un livre de fleurs pour Jacques Bailly, peintre ordinaire du roi.

« 29 juillet 1670.

« Louis, etc., à nos aimés et féaux conseillers les gens tenants nos cours de Parlement, maîtres des requêtes ordinaires de notre hôtel, prévôt de Paris, baillis, sénéchaux, leurs lieutenants civils et autres nos justiciers et officiers qu’il appartiendra, salut. Notre bien aimé Jaques Bailly, l’un de nos peintres ordinaires, nous a fait remontrer qu’il avait dessein de faire imprimer, vendre et débiter un livre de douze feuilles de fleurs mises en bouquet qu’il a dessinées et gravées, mais il craint qu’ayant fait la dépense, d’autres ne voulussent les imiter, contrefaire et débiter, s’il ne lui était pourvu de nos lettres de privilège sur ce nécessaires qu’il nous a très humblement fait supplier lui octroyer.

« A ces causes, voulant favorablement traiter l’exposant, nous lui avons permis et accordé, permettons et accordons par ces présentes signées de notre main de faire imprimer par telle personne que bon lui semblera ledit livre composé de douze feuilles de fleurs et celui vendre et distribuer par tout notre royaume, à commencer du jour qu’il sera achevé d’imprimer. Faisons défense à toutes personnes de quelque condition qu’elles soient d’imprimer, graver, contrefaire, imiter, vendre et distribuer ledit livre sur peine de confiscation des exemplaires contrefaits, amende arbitraire, dépens, dommages et intérêts dudit exposant. Si vous mandons que du contenu en ces présentes vous fassiez jouir l’exposant et ses ayants cause pleinement et paisiblement, cessant et faisant cesser tous troubles et empêchements au contraire. Mandons au premier notre huissier ou sergent faire pour l’exécution des présentes toutes significations, défenses, saisies et autres actes requis et nécessaires sans demander autre permission, car, etc.

« Donné à Saint-Germain-en-Laye, le XXIXe jour de juillet, l’an de grâce 1670, et de notre règne le XXVIIIe. Signé : Louis, et plus bas : Par le Roy, Colbert. »

La composition des douze bouquets peints par Bailly était la suivante :

N°1. Des roses, une tulipe, des iris, une anémone et une tige de rose trémière.
N°2. Des roses, une tulipe, des pavots et une branche de tubéreuse.
N°3. Une couronne impériale, des iris et une fritillaire.
N°4. Des anémones, des oreilles-d’ours, des pavots et une branche de fraxinelle.
N°5. Une touffe de lilas, un œillet, une narcisse, un zinnia et une branche de pied-d’alouette.
N°6. Jacinthe, anémones, aconit, etc.
N°7. Roses en fleurs et en boutons, et tige d’une variété de narcisse.
N°8. Des roses d’Inde, des pieds-d’alouette, des anémones, des campanules, un œillet, une tige de mauve en boutons.
N°9. Une rose, des fleurs d’ancolie, de digitale et de gros liseron.
N°10. Des tulipes, une anémone, des immortelles de Belleville.
N°11. Des narcisses, des fleurs d’oranger, des iris bulbeux.
N°12. Une tulipe, des jacinthes, des tubéreuses, etc.

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Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.

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