LA FRANCE PITTORESQUE
12 juillet 1733 : mort
de madame de Lambert
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Publié le mercredi 11 juillet 2012, par Redaction
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Anne-Thérèse de Marguenat de Courcelles, marquise de Lambert, naquit à Paris d’un maître d’escomptes. Elle perdit son père à l’âge de trois ans. Sa mère épousa en secondes noces le facile et ingénieux Bachaumont, qui se fit un devoir et un amusement de cultiver les heureuses dispositions qu’il dé couvrit dans sa belle-fille. Cette aimable enfant s’accoutuma dès lors à faire de petits extraits de ses lectures. Elle se forma peu à peu un trésor littéraire, propre à assaisonner ses plaisirs, et à la consoler dans ses peines.

Après la mort de son mari, Henri de Lambert, marquis de Saint-Bris, qu’elle avait épousé en 1666, et qu’elle perdit en 1686, elle essuya de longs et cruels procès, où il s’agissait de toute sa fortune. Elle les conduisit, et les termina avec toute la capacité d’une personne qui n’aurait point eu d’autre talent. Libre enfin, et maîtresse d’un bien considérable qu’elle avait presque conquis, elle établit dans Paris une maison où il était honorable d’être reçu : c’était la seule, à un petit nombre d’exceptions près, qui se fût préservée de la maladie épidémique du jeu, et où l’on se rassemblât pour parler raisonnablement. Aussi les gens frivoles lançaient, quand ils pouvaient, quelques traits malins contre la maison de madame de Lambert, qui, très délicate sur les discours et sur l’opinion du public, craignait quelquefois de donner trop à son goût.

Elle avait le soin de se rassurer, en faisant réflexion que, dans cette même maison, si accusée d’esprit, elle y faisait une dépense très noble, et y recevait beaucoup plus de gens du monde et de condition, que de gens illustres dans les lettres. Les qualités de l’âme surpassaient encore en elle les qualités de l’esprit. Elle était née courageuse, peu susceptible d’aucune crainte, si ce n’était sur la gloire ; incapable d’être arrêtée par les obstacles dans une entreprise nécessaire ou vertueuse. « Elle n’était pas seulement » ardente (dit Fontenelle) à servir ses amis, sans attendre leurs prières, ni l’exposition humiliante de leurs besoins ; mais une bonne action à faire, même en faveur des personnes indifférentes, la tentait toujours vivement, et il fallait que les circonstances fussent bien contraires, si elle n’y succombait pas. » Quelques mauvais succès de ses générosités ne l’avoient point corrigée, et elle était toujours également prête à hasarder de faire le bien. »

Ses ouvrages ont été réunis en deux volumes. Les principaux sont : 1° les Avis d’une mère à son fils, et d’une mère à sa fille. Ce ne sont point des leçons sèches, qui sentent l’autorité d’une mère ; ce sont des préceptes donnés par une amie, et qui partent du cœur. C’est une institutrice aimable, qui sème de fleurs la route dans laquelle elle veut faire marcher ses disciples ; qui s’attache moins aux frivoles définitions des vertus, qu’à les inspirer en les faisant connaître par leurs agréments.

Tout ce qu’elle prescrit porte l’empreinte d’une âme noble et délicate, qui possède, sans faste et sans effort, les qualités qu’elle exige dans les autres. On sent partout cette chaleur du cœur, qui seule donne du prix aux productions de l’esprit. 2° Nouvelles Réflexions sur les Femmes, ou Métaphysique d’Amour : elles sont pleines d’imagination, de finesse et d’agrément.

Madame de Lambert a fait aussi pour les femmes, un Traité de la Vieillesse, comme Cicéron en avait fait un pour les hommes. Elle a été en cela plus utile à son sexe que Cicéron au sien : car ce n’est pas aux femmes qu’il est le moins dur de vieillir.

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