LA FRANCE PITTORESQUE
Un mauvais accommodement
vaut mieux qu’un bon procès
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Publié le mercredi 4 novembre 2015, par Redaction
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Mieux vaut s’accommoder avec un adversaire en se contentant d’un petit bénéfice
 

On dit aussi : Un maigre accord est préférable à un gros procès, ce qui signifie qu’il vaut mieux, dans une contestation, transiger que de soutenir ou même de gagner un procès qui coûte toujours fort cher et dont le résultat est souvent aussi funeste à celui qui remporte qu’à celui qui le perd.

On peut se ruiner à force de gagner des procès et le mieux est de les éviter ; car si, comme il est d’usage de le dire, la justice ne se vend pas, les frais à faire pour l’obtenir sont toujours considérables. Citons, en passant, ce vieux proverbe : Gagne assez qui sort de procès !

A propos du même sujet on trouve dans Hésiode un vers qui dit : La moitié vaut mieux que le tout. Chez les Romains on cite cette phrase : Quem licet fuqere, ne quaere litem, ce qui signifie : Puisque tu peux l’esquiver, évite le procès.

On rapporte qu’un peintre chargé de faire figurer deux plaideurs dans un tableau, représenta le perdant sans vêtement et le gagnant vêtu uniquement d’une chemise. Citons, à ce propos, ces cinq vers de Boileau (épître 2) :

N’imite point ces fous dont la sotte avarice
Va de ses revenus engraisser la justice,
Qui, toujours assignant et toujours assignés,
Souvent demeurent gueux de vingt procès gagnés.

La Fontaine dans sa fable du Chat, la Bellette et le Petit Lapin (livre IX, fable 10), a terminé par cette réflexion :

Ceci ressemble fort aux débats qu’ont parfois
Les petits souverains se rapportant aux rois.

Et dans celle de l’Huître et les Plaideurs (livre IX, fable 9), il a encore mieux fait sentir les résultats des mésintelligences des hommes. Voici cette fable :

Un jour deux pèlerins sur le sable rencontrent
Une huître que le flot y venait d’apporter :
Ils l’avalent des yeux, du doigt ils se la montrent ;
A l’égard de la dent il fallut contester.
L’un se baissait déjà pour ramasser la proie ;
L’autre le pousse et dit : Il est bon de savoir
Qui de nous en aura la joie.
Celui qui le premier a pu l’apercevoir
En sera le gobeur ; l’autre le verra faire.
Si par là l’on juge l’affaire,
Reprit son compagnon, j’ai l’œil bon, Dieu merci.
Je ne l’ai pas mauvais aussi,
Dit l’autre ; et je l’ai vue avant vous sur ma vie.
Eh bien ! vous l’avez vue et moi je l’ai sentie.
Pendant tout ce bel incident,
Perrin Dandin arrive [c’est le nom d’un juge] ; ils le prennent pour juge.
Perrin, fort gravement, ouvre l’huître et la gruge,
Nos deux messieurs le regardant.
Ce repas fait, il dit d’un ton de président :
Tenez, la cour vous donne à chacun une écaille
Sans dépens et qu’en paix chacun chez soi s’en aille.

Mettez ce qu’il en coûte à plaider aujourd’hui ;
Comptez ce qu’il en reste à beaucoup de familles :
Vous verrez que Perrin tire l’argent à lui,
Et ne laisse aux plaideurs que le sac et les quilles.

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Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.

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