LA FRANCE PITTORESQUE
Coiffer sainte Catherine
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Publié le jeudi 24 novembre 2016, par Redaction
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Pour désigner une jeune femme ayant atteint l’âge de 25 ans sans être mariée
 

Dans certaines églises se trouvait une statue de sainte Catherine à laquelle on mettait, le jour de sa fête, une nouvelle coiffure, et l’on chargeait de ce soin les filles de 25 à 35 ans qui n’avaient pas pu ou pas voulu se marier. C’est ce qu’on appelait : Coiffer sainte Catherine.

Littré dit que c’est de 25 à 35 ans qu’une fille peut coiffer sainte Catherine ; mais ce n’est en réalité que de 25 à 30 : on met la première épingle à 26 ans, la seconde à 27, la troisième à 28, la quatrième à 29, la cinquième à 30 ; puis, la coiffure étant complète, on passe au rang de vieille fille, c’est-à-dire que l’on cesse, en quelque sorte, de compter sur la place.

Voyons pour l’origine de l’expression. D’après la Vie des Saints du P. Giry, sainte Catherine, qui naquit à Alexandrie (Egypte), d’une famille noble et éclatante, que Siméon Métaphraste appelle royale, fut décapitée dans cette même ville le 25 novembre 307, par ordre de l’empereur Maximin II, qui, charmé de sa beauté, et de sa science, l’avait longtemps mais inutilement sollicitée de consentir à l’épouser.

Sa mémoire a toujours été fort célèbre parmi les Grecs (qui l’appelaient Æchaterine), et elle l’est devenue en Orient par les secours miraculeux que les princes et seigneurs de l’Europe, passés en Asie pour délivrer la Terre-Sainte, ont reçus de sa puissante protection. C’est en reconnaissance de ses bienfaits que saint Louis, revenu d’outre-mer, fit construire à Paris la célèbre église de Sainte-Catherine-du-Val.

Tous les martyrologes parlent honorablement de sainte Catherine, cette illustre vierge dont Eusèbe de Césarée loue si hautement la constance et la chasteté, et pour laquelle Jeanne d’Arc avait une dévotion toute particulière ; aussi sainte Catherine a-t-elle été et est-elle encore la patronne des demoiselles.

Dans beaucoup d’églises, on coiffait autrefois la mère du Sauveur le jour de sa fête. Il en fut probablement de même pour sainte Catherine ; et comme on n’aura choisi que des vierges pour lui attacher sa coiffure, à la question : Pourquoi telle demoiselle ne se marie-t-elle pas ? il était naturellement répondu par ces mots : elle reste pour coiffer sainte Catherine, lesquels, quand l’usage se perdit de mettre une coiffure à la sainte, signifièrent le plus souvent, c’est parce qu’elle ne trouve pas, et quelquefois, c’est parce qu’elle ne veut pas.

Mais, attendu qu’à raison de l’âge où sainte Catherine subit le martyre, on feint que les vierges ne sont admises qu’à 25 ans à l’honneur de la coiffer, et que, grâce à une autre fiction, ce privilège cesse à 30, on dit familièrement, en parlant d’une personne du sexe qui se trouve entre ces deux limites d’âge, sans avoir été mariée, qu’elle coiffe sainte Catherine.

Cette phrase proverbiale ne semble pas remonter au-delà de la seconde moitié du XVIIe siècle, parce qu’elle ne se trouve pas dans les Curiositez françoises d’Antoine Oudin (1656), ouvrage renfermant entre autres locutions vulgaires celle de coiffer Robine (s’enivrer), qui aurait dû rappeler coiffer sainte Catherine à l’auteur si cette expression eût existé quand il a composé son livre.

Aux XIIIe, XIVe et XVe siècles, on employait une locution analogue : Porter la crosse de saint Nicolas, pour désigner le célibat des hommes.

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Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.

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