LA FRANCE PITTORESQUE
Potter à toute vapeur au XVIIIe siècle !
(D’après « Le Journal de la jeunesse » paru en 1877)
Publié le lundi 28 février 2011, par Redaction
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Si l’Histoire retient le nom de Denis Papin en matière de mise au point de la machine à vapeur moderne, on oublie la petite pierre apportée à l’édifice par un certain Humphrey Potter, astucieux enfant de 10 ans dont le nom ne peut que résonner singulièrement de nos jours
 

La machine à vapeur doit à un enfant de dix ans un de ses principaux perfectionnements. C’était dans un temps où elle ne servait encore qu’à épuiser l’eau des mines. La machine en usage était celle à laquelle un ouvrier serrurier de Darmouth, Thomas Newcomen – qui s’était inspiré des travaux de Papin pour élaborer sa machine –, a donné son nom. C’était la machine atmosphérique. Le piston montait sous la poussée de la vapeur et descendait sous la pression de l’air. Pour le faire monter, il fallait ouvrir le robinet de vapeur et fermer le robinet d’eau de condensation ; pour le faire descendre, c’est le contraire qu’il fallait faire. Or, telle était l’imperfection du futur moteur universel, que toutes ces manœuvres s’opéraient à la main.


La machine à vapeur de Newcomen en action

En 1713, un enfant, du nom de Humphrey Potter, était chargé de cette triste besogne. C’était un dur maître à servir qu’une telle machine. Impossible de s’en éloigner pendant une minute ; à peine était-il permis d’en détacher les yeux. « Allons, vite, petit Potter, ouvre ce robinet et ferme celui-ci. Allons, allons, petit Potter, dépêche-toi d’ouvrir celui que tu as fermé, et de fermer celui que tu as ouvert. Vite, vite, vite, petit Potter, recommence ce que tu viens de faire et continue toujours, toujours, toujours, et ne va pas t’endormir car si tu t’endors, la machine éclatera, et tu seras tué, mon petit ! » Et le malheureux enfant ouvrait et fermait, fermait et ouvrait les robinets, sans relâche, dix à douze fois par minute, six cents fois par heure, six mille fois par journée de dix heures.

Tout en faisant ce travail abrutissant, Humphrey Potter se disait : « Voyez-vous cette grande machine qui a besoin qu’on lui ouvre et qu’on lui ferme ses robinets ! Est-ce qu’elle ne pas se servir elle-même ? » Et comme il s’était rendu un compte très exact du jeu de la machine, un jour la réponse lui vint : « Oui elle pourrait se servir elle-même au moyen de ficelles de longueur convenable attachées aux robinets et au balancier qui, en s’élevant et en s’abaissant, tirerait tantôt l’une, tantôt l’autre. » Ce ne fut sans doute pas du premier coup qu’il réussit à donner leur vraie longueur aux ficelles et à trouver leur point d’attache. Enfin, victoire la machine allait toute seule et Potter pouvait aller jouer.

Dès que cette jolie invention fut connue, tous les mécaniciens la mirent à profit, car non seulement la machine marchait seule, mais encore elle marchait plus vite que par le passé, et le piston montait quinze fois par minute, au lieu de dix ou douze fois. Le principe en resta, les ficelles de Humphrey Potter étant par la suite seulement remplacées par ce qu’on nomme les tiroirs.

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