LA FRANCE PITTORESQUE
Locomotives à vapeur : pourquoi
avaient-elles un sifflet ?
(D’après Le Journal de la jeunesse paru en 1896)
Publié le lundi 29 septembre 2014, par Redaction
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A la fin du XIXe siècle, près de 75 ans après l’avènement du chemin de fer et de la locomotive à vapeur, l’usage du sifflet, remplaçant la corne à main, est répandu. Comment s’imposa ce « cri » qui, fendant l’air et présentant le grand avantage d’annoncer de très loin l’arrivée du train, fendait également les oreilles avec une grande facilité ?
 

On peut dire qu’actuellement il n’est pas une locomotive, en aucun pays du globe, qui ne soit munie d’un sifflet, et qui n’en use et même n’en abuse, lit-on dans Le Journal de la jeunesse en 1896 : c’est une caractéristique du voisinage d’une voie ferrée, caractéristique qui n’est pas très agréable, que ces sortes de cris stridents que pousse la bête de fer et d’acier. A tout propos elle s’annonce à l’aide de ces cris ; qu’elle arrive, qu’elle parte, qu’elle roule à toute vitesse en traversant une gare, elle siffle toujours. D’ailleurs ces coups de sifflet ne se ressemblent pas, parce que chacun d’eux a un sens particulier pour les employés de la ligne auxquels ils s’adressent.


Chemin de fer du Vivarais

Et cependant on ne l’avait point adopté, on n’y avait pas songé quand on a établi les premiers chemins de fer et qu’on a fait rouler les premières locomotives. On sait que c’est en Angleterre qu’on a construit ces premiers chemins de fer, grâce au célèbre George Stephenson, lequel avait imaginé une locomotive qui nous semblerait ridicule aujourd’hui, mais qui, en 1829, était et devait être regardée comme une invention de génie. Le chemin de fer traversant des routes, il fallait bien un moyen pour avertir à l’avance piétons, charrettes et voitures d’avoir à se garer du passage. Pour cela, sur chaque locomotive, il y avait un homme armé d’une corne à main, analogue à celle qu’on emploie encore sur certaines lignes de tramways [nous sommes en 1896].

Or, un beau jour de l’année 1855, un bon fermier s’en allait au marché de la ville de Leicester vendre du beurre et des œufs dont sa charrette était pleine, chargement fragile s’il en est. Il arrive au point où la route croise la voie ferrée qui réunissait Leicester à Swannington, et il se met à traverser le chemin de fer, sans regarder si un train n’arrive pas. Précisément un train s’avançait et le mécanicien faisait jouer un petit air de corne bien senti pour avertir l’imprudent. Notre fermier n’entend pas (sans doute faisait-il comme Perrette et supputait-il les beaux bénéfices qu’il ferait en vendant son beurre et ses œufs) ; toujours est-il que le train ne peut pas s’arrêter, et qu’il vient renverser cheval, charrette et fermier, en faisant une immense omelette à laquelle le beurre ne manquait point.

Heureusement l’homme n’eut pas de mal ; mais le cheval était tué, la charrette démolie, et la compagnie dut payer tout cela, en même temps que 25 kilogrammes de beurre et 80 douzaines d’œufs. Cela suffit pour la faire réfléchir et la convaincre qu’une trompette était insuffisante pour avertir les passants. Stephenson imagina donc un sifflet à vapeur pour les locomotives ; ce sifflet a été modifié dans sa forme, mais depuis lors toutes les locomotives de tous les pays ont toujours eu et ont toujours un sifflet. A grand effet, petite cause !

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