LA FRANCE PITTORESQUE
16 janvier 1632 : mort de
la marquise de Guercheville
qui éconduisit Henri IV
(D’après « Éphémérides universelles ou Tableau religieux, politique, littéraire,
scientifique et anecdotique présentant, pour chaque jour de l’année,
un extrait des annales de toutes les nations
et de tous les siècles » (Tome 1), paru en 1828)
Publié le dimanche 16 janvier 2022, par LA RÉDACTION
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On peut dire, sans malignité, que la gloire dont Antoinette de Pons, marquise de Guercheville (1560-1632) nous offre le modèle n’est pas vulgaire dans l’histoire : jeune, belle et libre, elle résista constamment aux désirs amoureux d’un roi. Les grâces de son esprit, de ses manières ; les charmes d’une figure et d’une taille enchanteresse avaient effacé dans le cœur de Henri IV la célèbre comtesse de Guiche, dite « la belle Corisande » ; mais en vain le monarque prodiguait-il les séductions : la marquise les repoussait avec une fierté respectueuse : « Je ne suis peut-être pas d’assez bonne maison, lui disait-elle un jour, pour être votre femme, et j’ai le cœur trop noble pour être votre maîtresse. »

Lorsque le roi l’aperçut pour la première fois pendant sa campagne de Normandie, elle était veuve de Henri de Silly, comte de La Rocheguyon. C’est dans la terre de ce nom qu’elle se confina pour éviter des sollicitations importunes. Un soir, le roi, qui avait exprès dirigé une partie de chasse de ce côté, fit demander asile pour la nuit à la belle marquise. Celle-ci répondit que cette demande l’honorait, et que le roi serait reçu comme il devait l’être.

Antoinette de Pons, marquise de Guercheville, en 1578. Dessin de François Quesnel (Henri IV n'était pas encore roi à l'époque où ce portrait fut réalisé)
Antoinette de Pons, marquise de Guercheville, en 1578. Dessin
de François Quesnel (Henri IV n’était pas encore roi à l’époque où ce portrait fut réalisé)

À l’instant le château s’illumine ; un souper magnifique se prépare ; la marquise elle-même, éblouissante d’attraits et de parure vient recevoir le roi, qui se flatte des plus douces chimères : à peine l’a-t-elle conduit jusqu’à la porte de son appartement, qu’elle se retire et demande à haute voix son coche. Henri descend tout éperdu, et lui dit : « Quoi, madame, je vous chasserais de votre maison ? — Sire, lui répond la marquise d’un ton ferme, un roi doit être le maître partout où il est ; et pour moi, je suis bien aise de conserver quelque pouvoir dans les lieux où je me trouve. » Sans rien dire, ni écouter de plus, elle va passer la nuit à deux lieues de là, chez une de ses amies.

Le monarque renouvela cette tentative, après que la marquise eut épousé en 1594 le duc de Plessis-Liancourt : il n’obtint pas plus de succès. Renonçant alors à ses projets galants, il dit à madame de Guercheville : « Puisque vous êtes réellement dame d’honneur, vous le serez de la reine ma femme. » La marquise alla recevoir Marie de Médicis à Marseille, en cette qualité. Ce fut elle qui, charmée des sermons de l’abbé, depuis cardinal de Richelieu, l’introduisit auprès de la reine, et lui ouvrit ainsi le chemin de la fortune.

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Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.

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