LA FRANCE PITTORESQUE
Adèle ou Adélaïde de Champagne
(née vers 1140, morte le 4 juin 1206)
(Épouse Louis VII le 13 novembre 1160)
Publié le lundi 1er février 2010, par LA RÉDACTION
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Après la mort de Constance en couches survenue le 4 octobre 1160, Louis, qui n’avait pas encore de fils, contracta une troisième alliance. Adèle, ou Alix, ou Adélaïde de Champagne, fille de Thibault IV dit le Grand, comte de Champagne et de Blois, et de Mahaut de Carinthie, avait une vingtaine d’années ; mais Louis n’était plus jeune : ses chagrins, l’austérité de ses goûts lui faisaient préférer une femme d’un esprit solide.

Il trouva en Adélaïde la raison, la grâce et l’enjouement ; à la cour de Thibault, qui se distinguait par son amour pour la poésie et par ses manières courtoises, Adèle faisait admirer sa générosité, sa politesse et son goût pour les travaux de l’esprit. C’était cependant ce Thibault dont la révolte, au commencement du règne de Louis le Jeune, avait amené le siège et le sac de Vitry ; mais, les ressentiments mutuels étant effacés par les années, l’alliance avec la Champagne devenait de bonne politique, et Louis chercha à se rattacher par de triples liens, cette puissante maison ; car, en épousant Adèle, fille de Thibault, il maria ses deux premières filles, Marie et Alix qu’il avait eues en 1145 et 1150 d’Aliénor d’Aquitaine, respectivement à Henri le Libéral et à Thibault le Bon, tous deux fils de Thibault IV. Le premier de ces princes, déjà comte de Blois, hérita aussi de la Champagne ; le second était comte de Chartres. Un autre frère d’Adèle, Guillaume aux Blanches Mains obtint l’évêché de Chartres.

Le mariage eut lieu le 13 novembre 1160, et Hugues, archevêque de Sens, sacra le jour même la nouvelle reine à Paris. Toute la France désirait un héritier du trône ; mais cinq ans passèrent sans que la reine eût le bonheur de se voir mère. Enfin, tant de prières, de pèlerinages, d’aumônes que le roi fit pour obtenir un fils portèrent leur fruit. Louis VII put enfin presser sur son cœur paternel un fils que, dans l’effusion de sa joie et de sa reconnaissance, il nomma Dieudonné ; ce fut Philippe-Auguste : Philippe, à cause de l’aïeul de Louis VII ; Auguste parce qu’il naquit au mois d’août de l’année 1165, le 21. Jamais enfant ne fut chéri avec plus de tendresse. Une maladie qu’il fit à l’âge de quinze ans, et qui fit craindre pour ses jours, engagea le roi à faire un pèlerinage au tombeau de saint Thomas de Cantorbéry ; on attribua la guérison du prince à l’intercession du saint.

En 1179, respectant la tradition des premiers Capétiens, Louis VII fit sacrer son fils Philippe. Adèle, qui souhaitait la régence pour elle et ses frères, compte tenu de l’état de santé de son époux, n’obtint pas gain de cause : prenant les devants, le jeune Philippe négocia en effet le soutien du comte de Flandre, Philippe d’Alsace, dont il épousa la nièce Isabelle de Hainaut, âgée de dix ans le 28 avril 1180 et qu’il fit sacrer le 29 mai suivant. Adèle tenta en vain de dresser Henri II d’Angleterre contre le futur Philippe-Auguste, qui possédait déjà l’entier pouvoir à la mort de Louis VII survenue le 18 septembre 1180.

Si la reine mère se retira alors auprès de son frère le comte de Champagne, on prétend que, ne s’estimant pas vaincue, elle usa de maints artifices pour tenter d’écarte sa bru dans l’esprit du roi, et qu’elle fut près d’y parvenir. Mais en 1187 naquit un héritier, le futur Louis VIII, et lorsque la jeune Isabelle de Hainaut mourut trois ans plus tard, au moment où Phillippe-Auguste mena de concert avec Richard Cœur de Lion la IIIe croisade, il confia la régence à sa mère ; les chroniqueurs la nomment l’illustre reine des Français, et parlent d’elle avec respect ; mais ils ne donnent aucun détail sur sa régence, qui dura trois ans, s’achevant lorsque Philippe II épousa en secondes noces Ingeburge de Danemark : les reliques des saints Denis et Éleuthère, qu’elle fit exposer à la vue du peuple afin d’exciter la ferveur et de faire prier pour son fils ; d’autres reliques qu’elle fit porter processionnellement pour obtenir la guérison du jeune Louis, atteint d’une maladie grave, voilà les seuls événements dont les chroniques du temps nous entretiennent.

Adèle mourut en 1206. Elle avait préparé le lieu de sa sépulture auprès de celle de son époux, faisant ériger un monument que l’admiration des contemporains exalte en ces termes : « Elle fit élever un tombeau où l’art le plus exquis avait fait un heureux mélange de brillants d’or et d’argent, de pierres précieuses. Jamais chef-d’œuvre si étonnant n’avait paru dans aucun royaume depuis le règne de Salomon », écrit Rigord. Adèle fut inhumée près d’Auxerre, dans l’abbaye de Pontigny.

Elle eut trois enfants avec Louis VII : Philippe, né en 1165, qui devint roi sous le nom de Philippe-Auguste ; Alix ou Adélaïde, née en 1170 et morte vers 1220 (à ne pas confondre avec Adélaïde, fille de Louis VII et de Constance de Castille, née et morte en 1160) ; Agnès, née en 1171. Adèle de Champagne laissait son fils sur un trône dont il avait augmenté la puissance ; sa fille Alix, fiancée d’abord à Richard Cœur de Lion, et renvoyée ensuite en France, avant que Philippe-Auguste ne tentât de la marier à Jean sans Terre, épousa en 1195 Guillaume II, comte de Ponthieu, devenant comtesse de Vexin. Agnès, seconde fille d’Adèle, épousa en premières noces Alexis Comnène, empereur de Byzance ; en deuxièmes noces et contre son gré, Andronic Comnène, assassin du premier et tué en 1185 ; elle se remaria plus tard avec un seigneur grec du nom de Branas.

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