La langue française désigne par cet unique mot fort heureux la solennité collective de tous les saints. Cette fête ne remonte pas aux siècles primitifs du christianisme. Voici quelle en a été l’origine.
Gendre de l’empereur romain Auguste — qui régna de 27 av. J.-C à 14 ap. J.-C. —, Marc Agrippa fit élever à Rome, vingt-cinq ans environ avant la naissance du Christ, un temple superbe pour le dédier à son beau-père. Auguste n’ayant point accepté cet honneur, Agrippa dédia cet édifice à Mars et à Jupiter Vengeur, en mémoire de la victoire remportée par Auguste contre Marc-Antoine et Cléopâtre.
Plus tard, la déesse Cybèle et tous les dieux et déesses dont elle est la mère y eurent leurs statues en bronze, en argent, en or et même en pierres précieuses, selon l’importance de chacune de ces fausses divinités ; alors ce temple reçut, à juste titre, le nom de Panthéon, ou réunion de tous les dieux. Les décrets de l’empereur romain d’Orient Théodose le Jeune (408-450) contre les monuments de l’idolâtrie, avaient respecté ce magnifique édifice. On s’était contenté d’en extraire les impures idoles et d’en fermer les portes.
Mais plus tard, le pape Boniface IV (608-615) demanda à l’empereur byzantin Phocas (602-610) le Panthéon pour en faire une église. Sa demande fut accueillie, et en 610, le 13 mai, Boniface dédia le Panthéon au vrai Dieu, sous l’invocation de la sainte Vierge et des martyrs. Il y fit transporter vingt-huit chariots d’ossements des généreux confesseurs de la foi pris dans les divers cimetières de Rome, et dès ce moment le Panthéon prit le nom de Sanctæ-Mariæ ad Martyres. Par la suite cette église est nommée Notre-Dame de la Rotonde, à cause de sa forme ; en effet elle ressemble à un demi-globe dont la hauteur est presque égale à la largeur. Celle-ci est de cent cinquante-huit pieds de diamètre (près de cinquante-trois mètres). Le sommet de cette coupole ou dôme est percé d’une large ouverture qui éclaire seule l’intérieur du temple. Tout le pourtour de l’église est orné d’autels.
Vue du Panthéon de Rome. Peinture d’Ippolito Caffi |
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Le pape ordonna que tous les ans, à pareil jour, on célébrerait l’anniversaire de cette Dédicace. Néanmoins, comme on a vu, ce temple n’était pas destiné à y célébrer la mémoire de tous les saints. En 731, le fraîchement élu pape Grégoire III fit terminer dans l’église de Saint-Pierre, au Vatican, une chapelle en l’honneur du Christ Sauveur, de sa sainte Mère, des saints apôtres, martyrs, confesseurs et de tous les justes qui reposaient, pausantium, par toute la terre.
Cette chapelle serait donc le véritable berceau de la fête de la Toussaint. Un Office fut composé pour célébrer la nouvelle solennité. Insensiblement, à cause des rapports intimes de celle-ci avec la Dédicace de la Rotonde, ces deux fêtes n’en firent plus qu’une seule. Afin de donner aux fidèles plus de facilité pour la célébrer, on en fixa le jour à une époque où toutes les récoltes étaient terminées.
Ainsi du 13 mai assigné pour l’anniversaire de la Dédicace de la Rotonde, comme on le lit encore au Martyrologue romain, cette fête fut transportée au premier novembre, par le pape Grégoire IV (827-844). Ce pontife, se trouvant en France vers 835, engagea le roi de France et empereur d’Occident Louis le Débonnaire, fils de Charlemagne, à établir dans ses vastes états la fête qui jusqu’à ce moment était restée circonscrite dans Rome et ses environs. Elle s’étendit rapidement dans les autres royaumes, et, à dater du IXe siècle, l’Église latine solennisa, le même jour, le rite de la Toussaint. Il y avait néanmoins, avant ce temps-là, une fête de tous les apôtres, qui était célébrée le premier mai.
Le jeûne de la veille est prescrit dans un Concile depuis l’an 1022. Mais l’Octave (semaine de liturgie spéciale) ne fut établie qu’en l’année 1480 par le pape Sixte IV, qui plaça la Toussaint à un degré plus haut. La fête a toujours été chômée et le Concordat de 1802, en France, l’a retenue. Au dernier jour de l’Octave, à Paris et dans beaucoup d’églises, on célèbre la fête des Reliques. Le Rite de Rome n’en fait aucune mention. Le Missel de Noailles n’en parle pas davantage.
La vénération des reliques ne se trouve donc que dans le Rite de Vintimille. Le Canon de Prime, pour ce jour, y est extrait d’un Concile de Mayence, en 1549, qui parle du respect dû aux reliques des saints, mais ne fait aucune mention de la fête dont nous parlons. Elle se confond, il est vrai, avec le jour de l’Octave de la Toussaint, mais l’Office roule principalement sur les reliques. Nous trouvons dans le Missel de Noailles, pour le 4 décembre, une fête de la susception des saintes reliques, en 1194. La Messe en est à peu près la même que celle du 8 novembre, dans le nouveau Rite. C’est donc une simple translation, mais sous un titre plus général qui en fait une festivité nouvelle.
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