LA FRANCE PITTORESQUE
Fête des brandons à Régny (Loire)
(D’après « Les fêtes baladoires du siècle dernier », paru en 1890)
Publié le lundi 18 janvier 2010, par LA RÉDACTION
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Depuis longtemps, il existait dans la ville de Régny une sorte de réjouissance qui consiste en ce que tous les garçons de la ville et ceux de la campagne, au-dessus de l’âge de dix-huit ans, s’assemblent au son du tambour le jour du Mardi-Gras
 

Au XVIIIe siècle encore, ils se rendent dans une place de la ville, ayant chacun sur l’épaule une hache ou quelqu’autre instrument tranchant ; ils se rendent dans les bois taillis des environs, où ils coupent du bois et font des fagots dont ils chargent une charrette tant qu’il peut y en contenir.

Composition et dessin de Théophile Schuler

Composition et dessin de Théophile Schuler

Le dimanche suivant, qui est le premier dimanche de Carême et qu’on appelle le dimanche des Brandons, ces mêmes garçons s’assemblent au son du tambour et exigent que tous les hommes qui se sont mariés à Régny dans le courant de l’année, les suivent dans l’endroit où ils ont placé la charrette. Ils s’y attèlent deux à deux, ce qui se fait au moyen d’une grosse et longue corde qu’on attache au timon de la charrette à laquelle on met des bâtons en travers de distance en distance.

Lorsque tous les hommes mariés sont attelés, ils traînent la charrette chargée de fagots dans la ville ; ils sont escortés par les garçons qui ont chacun un gros bâton sur l’épaule et qui marchent à pas réglés au son du tambour ; ils arrivent presque toujours dans la ville au moment où l’on sort des Vêpres, et que les rues sont pleines de monde.

Quand on entre dans la ville, on double le pas, et comme les rues sont en pente, il arrive souvent que la charrette verse, ou qu’elle soit entraînée par la pente, en sorte que les personnes qui passent dans les rues, ainsi que ceux qui traînent la charrette, sont souvent blessés et estropiés, et courent les plus grands dangers pour la vie.

La charrette, nonobstant les événements qui peuvent arriver, est traînée dans une place appelée la place Notre-Dame ; les garçons en déchargent les fagots dont ils font une pyramide fort haute entremêlée de paille ; cette pyramide est appelée Fougan ; ils dansent autour et se retirent ensuite dans les cabarets, où ils boivent jusqu’à la nuit ; ils se rassemblent de nouveau pour mettre le feu à la pyramide ; la place de Notre-Dame où cette pyramide en bois est mise est fort étroite, et environnée de maisons fort basses et le toit de l’église de Notre-Dame avance sur cette place, en sorte que ceux qui habitent ces maisons sont toujours dans la crainte que leur maison et effets soient consumés par le feu.

En outre, lorsqu’un homme marié s’absente de la ville et s’en expatrie, pour ne courir aucun danger et ne pas s’atteler pour traîner la charrette, et qu’il reparaît dans la ville après quelque laps de temps que ce puisse être, ils se saisissent de lui, le promènent par toute la ville au son du tambour, le mènent à la place Notre-Dame, où il y a un grand puits auprès duquel ils le font asseoir sur une chaise, où ils l’attachent pour qu’il ne puisse pas se relever, lui découvrent la tête, chaque garçon tire un seau d’eau de puits qu’ils lui jettent sur la tête, le changent de chemise et d’habits, et le conduisent ensuite au cabaret où ils le contraignent de boire avec eux.

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