LA FRANCE PITTORESQUE
Jardin extraordinaire de Nantes :
101e de la ville
(Source : Le Figaro)
Publié le mardi 22 octobre 2019, par Redaction
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La cité de Jules Verne a inauguré en septembre dernier la première tranche de ce grandiose parc paysager directement inspiré de l’univers féerique de l’écrivain
 

Extraordinaire, ce jardin l’est de par le choix du site d’abord : une ancienne carrière de granite désaffectée dont les imposantes falaises offrent l’un des plus beaux points de vue sur la Loire, tout en servant, en contrebas, d’écrin à ce nouveau parc paysager luxuriant, peuplé de trésors botaniques (25 000 plantes dont un millier de rares), qui plonge le visiteur dans un ailleurs, à la frontière entre le réel et l’imaginaire.

Comment croire en effet, lorsqu’on se trouve au pied de l’impressionnante cascade qui chute de 25 m de haut, au milieu des fougères arborescentes, des papyrus, des lotus et des gunneras, que l’on est en pleine ville, à deux pas seulement du centre historique ? « Pour que la magie opère, il fallait que le lieu soit unique » souligne Johanna Rolland, maire de Nantes, qui a lancé ce projet pharaonique en juillet 2016 pour donner une illustration concrète de ce que doit être, selon elle, la ville de demain : « Une ville verte, végétale et pas seulement minérale, où l’on respire. »

La cascade de 25 m de haut aménagée au sein du Jardin extraordinaire de Nantes

La cascade de 25 m de haut aménagée au sein du Jardin extraordinaire
de Nantes. © Crédit photo : Ouest France

Un microclimat exceptionnel
Unique, la carrière Chantenay l’est par sa géographie. « Nous sommes à l’extrémité orientale du sillon de Bretagne, une longue bande de granit qui part de la pointe du Raz pour arriver jusqu’à la Loire », explique le paysagiste Loïc Mareschal, chef de l’agence nantaise Phytolab qui a conçu ce projet en collaboration avec l’urbaniste Bernard Reichen.

« Le dénivelé, l’exposition plein sud et cet immense cirque de pierre créent un microclimat exceptionnel avec des températures supérieures de 4°C par rapport au reste de la ville. Ce qui nous a permis d’implanter des espèces végétales exotiques pour tenter de recréer, au travers de différentes ambiances végétales, l’univers des Voyages extraordinaires de Jules Verne. » L’empreinte du célèbre écrivain, dont la maison natale transformée en musée se trouve à deux pas du site, est omniprésente. Au point de se demander si la carrière de Chantenay n’a pas inspiré la description fantastique qu’il fait de L’Île mystérieuse, l’un de ses plus célèbre romans.

Histoire mouvementée
Car le Jardin extraordinaire l’est aussi par son histoire mouvementée. Pendant 400 ans, les pierres extraites de la carrière ont servi à paver nombre de rues de la ville et à bâtir quantité de maisons et d’édifices jusqu’à son abandon au XIXe siècle. Le site est alors investi par les Brasseries de la Meuse qui installent leur plus grosse unité de production (jusqu’à 500 000 canettes produites par jour) avant de fermer au milieu des années 1980. Racheté par la Ville, qui projette un temps d’y construire des logements, le site se transforme en friche urbaine et va le rester pendant plus de trente ans. Jusqu’à la mise en route de ce projet monumental, quasi haussmannien.

« Nous avons voulu garder des traces de ce passé et notamment de la végétation spontanée qui a prospéré pendant la phase d’abandon », explique Romaric Perrocheau, responsable du projet à la mairie de Nantes, en montrant le bosquet de ronces, de genêts d’Espagne et de buddléias aujourd’hui traversé par un maillage d’allées en copeaux de bois. Mais il y a surtout ce lierre centenaire parti à l’assaut des 25 m de la falaise qui a donné, aux concepteurs, l’idée de créer la fameuse cascade dont le bruit cristallin et apaisant recouvre ceux de la circulation automobile toute proche.

Sans oublier le laurier-palme monumental de 15 m de haut pour autant de large qui a pris racine au pied de l’à-pic. « Même s’ils appartiennent à des espèces végétales très communes, ces sujets exceptionnels devaient à tout prix être conservés, comme Gilles Clément, qui parle à leur sujet de biodiversité comportementale, nous avait incités à le faire lorsqu’il a visité le site il y a trois ans », souligne Jacques Soignon, directeur du service des espaces verts et de l’environnement de Nantes.

L’ « Arbre aux hérons »
« Dans quelques années, on ne fera plus vraiment la différence entre ces morceaux de friches et les nouveaux massifs composés de plantes exotiques et rares », assure Loïc Mareschal, animé du souci constant de « respecter l’âme et l’histoire de ce lieu exceptionnel tout en apportant une dimension de rêve et de voyage ». Le projet, du reste, est loin d’être achevé puisque seul le tiers du Jardin extraordinaire, qui doit s’étendre, au final, sur plus 3,5 ha, a été aménagé.

Le Jardin extraordinaire de Nantes

Le Jardin extraordinaire de Nantes. © Crédit photo : Ville de Nantes

Début 2020, un escalier monumental, imaginé par François Delarozière et Pierre Oréfice, de la Compagnie La Machine, permettra aux visiteurs de rejoindre « la promenade des sept belvédères » qui serpente le long de la falaise en cheminant sur le front rocheux jusqu’à la guérite du square Maurice-Schwob. Surtout, l’ancienne carrière accueillera, en 2023, dans sa partie est, le gigantesque Arbre aux hérons, également conçu par la Compagnie La Machine qui a déjà à son actif le célèbre éléphant mécanique ainsi que le Carrousel des fonds marins installés sur l’emplacement des anciens Chantiers navals de Nantes.

« Avec 1,4 km de branches, 40 m de hauteur, pour un poids de 1 700 tonnes, ce sera le plus grand jardin suspendu jamais construit depuis ceux de Babylone », s’enthousiasme Jacques Soignon. Deux hérons mécaniques de 15 m d’envergure accueilleront les visiteurs pour un vol circulaire de quelques minutes avec une vue imprenable sur ce quartier en pleine évolution.

Le Jardin extraordinaire, cirque de pierre dont l’accès est gratuit et dont l’une des fonctions sera aussi de créer du lien à l’échelle du quartier et de la ville, est en effet partie intégrante de l’Étoile verte. Ce grand parcours permet de relier à pied ou à vélo par une coulée verte tous les parcs et jardins publics nantais dont la superficie a doublé entre 1985 et aujourd’hui, sous la houlette de Jacques Soignon. Un modèle à suivre pour les villes du futur.

Marc Mennessier
Le Figaro

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