LA FRANCE PITTORESQUE
Trésors cachés découverts
dans la bibliothèque d’Ajaccio
(Source : France Télévisions)
Publié le jeudi 3 mai 2018, par Redaction
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La modeste bibliothèque Fesch d’Ajaccio s’est avérée une caverne d’Ali Baba remplie de trésors oubliés qui ont été découverts par hasard ces derniers mois. Parmi ces pièces : un ouvrage rarissime sur l’égyptologie, des lettres inédites signées de Napoléon, un livre dédicacé par Gustave Eiffel sur la « tour de 300 mètres »...
 

C’est « entre le bottin de Corse et un Marc Levy », au milieu de « vieux dentiers et de blattes », que Vannina Schirinsky-Schikhmatoff, conservatrice missionnée par la mairie d’Ajaccio pour remettre de l’ordre dans la réserve de la bibliothèque, a découvert le Thesaurum Hyeroglyphicorum qui date de 1610.

« Il s’agit du premier livre d’égyptologie. Le Musée de l’Homme en a un exemplaire complet et la BNF (Bibliothèque nationale de France) en a un incomplet, au total il y en a sept recensés dans le monde dont trois complets », précise-t-elle à, regrettant qu’il manque deux pages dans l’exemplaire retrouvé à Ajaccio.

Au fil des pages recouvertes de gravures, on découvre la finesse et l’extraordinaire précision des hiéroglyphes de l’ouvrage issu de la prestigieuse collection de Jean-Baptiste Colbert, l’un des principaux ministres de Louis XIV. Pour l’égyptologue italien, Francesco Tiradritti, directeur de la mission d’archéologie italienne à Louxor, c’est « une découverte importante ».

Planches du Thesaurum Hyeroglyphicorum (1610), premier livre d'égyptologie

Planches du Thesaurum Hyeroglyphicorum (1610), premier livre d’égyptologie.
© Crédit photo : Pascal Pochard-Casabianca / AFP

« Nous sommes en train de monter un projet international autour de ce livre », confie l’expert, attendu à Ajaccio en septembre. Selon Mme Schirinsky-Schikhmatoff, celui-ci travaille à « une publication scientifique et à une exposition d’envergure ». « C’est un livre très important qui se pose à la racine de l’égyptologie moderne », renchérit Simone Martini, restaurateur italien d’art mandaté par la mairie ajaccienne pour intervenir sur cette pièce rare et une dizaine d’ouvrages anciens. Parmi eux, plusieurs incunables, des ouvrages imprimés avant 1500, notamment Les Chroniques de Nuremberg datant de 1493.

Mine d’or encore inexplorée
« La valeur artistique et historique de ces œuvres, comme de beaucoup d’autres conservées dans la bibliothèque est remarquable », insiste-t-il. Il a débuté « le lavage » de ces livres pour les débarrasser des moisissures et doit compléter leur restauration en septembre. C’est d’ailleurs en travaillant sur un Pétrarque datant de 1496 qu’il a lui-même exhumé, entre la couverture en bois et la page de garde, deux parchemins médiévaux.

Vannina Schirinsky-Schikhmatoff évoque également les éditions originales et complètes de la campagne d’Égypte de Napoléon, « une quinzaine de volumes retrouvés aux quatre coins de la bibliothèque », ou La tour de 300 mètres, « un double volume de Gustave Eiffel, signé de sa main » qui réunit les plans de la dame de fer de Paris.

Elisabeth Perie (à droite) directrice de Fesch bibliothèque d' Ajaccio, et Vannina Schirinsky-Schikhmatoff (à gauche), conservatrice

Elisabeth Perie (à droite) directrice de Fesch bibliothèque d’ Ajaccio,
et Vannina Schirinsky-Schikhmatoff (à gauche), conservatrice.
© Crédit photo : Pascal Pochard-Casabianca / AFP

« Je fais du sauvetage patrimonial, c’est comme une chasse aux trésors », résume-t-elle, insatiable, en présentant sa dernière trouvaille : des lettres écrites par plusieurs membres de la famille impériale dont neuf signées de Napoléon, qui ont échappé de peu à la poubelle. « Des lettres non répertoriées dans la correspondance de Napoléon que nous sommes les seuls à détenir » et qui datent de la campagne d’Allemagne de l’empereur en 1813, dit-elle, fulminant qu’une inédite soit manquante, « probablement volée ».

La responsable des bibliothèques d’Ajaccio, Elisabeth Perié, regrette d’ailleurs « qu’il manque beaucoup de livres, des prêts qui n’ont pas été rendus » mais souligne que la sécurité de la bibliothèque a désormais été renforcée. Elle conduit aujourd’hui des travaux pour offrir à cette « mine d’or » des conditions d’humidité et de température adéquates, en la protégeant notamment d’un tuyau d’eaux usées qui traverse la réserve de la bibliothèque.

Complices, Vannina Shirinsky-Schikhmatoff et Elisabeth Perié ne doutent pas que d’autres trésors dorment encore dans la salle patrimoniale de la bibliothèque dont l’inventaire reste à faire. « Il faudra plusieurs vies, je n’ai exploré que 5 % de la bibliothèque », note, amusée, la conservatrice qui rêve d’exposer ses trouvailles au public.

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