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Gent(e) féminine :
ne faites plus la faute !
(Source : Le Figaro)
Publié le vendredi 21 janvier 2022, par Redaction
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« La gente féminine » ou « la gent féminine » ? Les formules se retrouvent souvent à l’écrit. L’une des deux est pourtant inexacte. Laquelle ? Le Figaro revient sur leur bon usage.
 

Est-ce sa prononciation qui est responsable de sa mauvaise graphie ? Sa liaison ou son genre féminin qui nous pousserait à l’orthographier comme n’importe quel autre mot assorti de l’article « la », avec un « e » ? Le mystère demeure. Si toutefois l’erreur est obscure, tâchons une fois pour toutes d’éclairer les règles qui se cachent derrière le mot « gent ». Faut-il écrire « gente » ou « gent » ? Existent-ils des exceptions ?

Pour comprendre le flou qui entoure l’orthographe de « gent », il est nécessaire de replonger aux origines de notre mot. Du latin gens, gentis signifiant « nation, race, peuple », le terme « gent » est dérivé de la formule latine jus gentium, qui signifie « droit des gens ». Il est étymologiquement lié au substantif masculin « gens ». Et voilà le cœur de notre problème !

Car ainsi que l’indique le Trésor de la langue française, « gens » est l’ancien pluriel de « gent ». C’est à cause de ce lien très intime, que l’on retrouva à l’époque impériale le terme « gens » orthographié « gentes » au pluriel et « gent » au singulier. De quoi mettre toute notre grammaire à l’envers et confondre à tous les coups « la gent » des « gentes » ! Mais passons.

La gent moutonnière
Cette confusion ne perdurera pas. Et à plus forte raison, parce que les mots ne désigneront plus, à compter du XIe siècle, une même réalité. En 1100, le mot « gens » orthographié « genz » au pluriel désigne un « groupe de personnes placées sous l’autorité de quelqu’un ». Le terme « gent », quant à lui, conserve son sens originel et désigne « la nation, le peuple ». Il conservera, dans un registre plus familier, les significations de « race, espèce » jusqu’au XVIIe siècle.

Notons pour l’anecdote — et histoire de compliquer notre récit — que la rupture entre ces deux mots ne sera pas tout de suite consumée. L’usage créera en effet au XIe siècle l’adjectif « gent », « gente », cette fois-ci issue du latin genitus, pour désigner un individu « gentil », « noble ». Est-ce à cause de ce dernier mot que notre « gent » se retrouvera parfois, à tort, orthographié avec un « e » ? Peut-être.

Soyons clairs pour autant. Le substantif féminin « gent » ne désigne ni « des personnes en nombre indéterminé » ni une personne « jolie ou gentille ». De nos jours, la gent signifie selon le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales « la nation, le peuple », « l’ensemble des individus possédant des caractères physiques communs » et d’après Le Petit Robert « l’espèce », « la famille ».

Qu’elle soit féminine ou masculine donc, la gent ne portera jamais de « e » au singulier comme au pluriel. La phrase correcte est « la gent féminine ».

Alice Develey
Le Figaro

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