LA FRANCE PITTORESQUE
Vendée : du génocide au mémoricide.
Mécanique d’un crime légal
contre l’humanité
(par Reynald Secher (préface de Gilles-William Goldnadel,
postfaces de Hélène Piralian et Stéphane Courtois))
Publié le samedi 20 janvier 2018, par Redaction
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En 2011, vingt-cinq ans après la publication de son livre, Le Génocide franco-français : la Vendée-Vengé, Reynald Secher, grâce à la découverte aux Archives nationales de documents totalement inédits, démontre, preuves à l’appui, que le génocide de la Vendée — reconnu comme tel, avant l’avènement du terme génocide, par le révolutionnaire jacobin Gracchus Babeuf qui emploie le mot populicide dans son Du système de dépopulation ou La vie et les crimes de Carrier (1794) — a bien été conçu, voté et mis en oeuvre personnellement par les membres du Comité de salut public et par la Convention, et que l’armée et l’administration n’ont fait qu’exécuter les ordres
 

Afin d’échapper à leurs responsabilités et de masquer la logique idéologique et politique qui menait inéluctablement la République jacobine au génocide, ces criminels et leurs héritiers politiques ont nié les faits, imposé à la nation leur auto-amnistie et une impunité générale. Ils ont ainsi perpétré un second crime, celui de mémoricide, qui, par un renversement pervers, a désigné les victimes vendéennes comme bourreaux et transformé les bourreaux jacobins en victimes.

À ce premier scandale s’en est ajouté un second : ces bourreaux ont bénéficié de toutes les faveurs et des honneurs de l’État, tandis que les victimes et leurs descendants, traumatisés, ont été réduits au silence et en permanence persécutés, se retrouvant ainsi exclus d’une citoyenneté qui leur revenait de droit.

On lit ainsi, sous la plume de Reynald Secher : « Tout d’abord, la Révolution est une rupture définitive dans l’histoire : il y a un avant et un après qui renvoient ses crimes à ceux du XXe siècle et non pas à ceux des siècles antérieurs. Le caractère légal de ce génocide est une nouveauté qui l’ancre dans la modernité. Il a, en effet, été voté à une date précise, publié de manière officielle même s’il est évident que la guerre civile s’est prolongée au-delà de ce vote. Cette guerre civile a commencé avec l’insurrection de la Vendée, au mois de mars 1793, pour s’achever avec la défaite militaire des Vendéens à Savenay les 23 et 24 décembre 1793.

« Parallèlement, la Convention a inauguré le génocide par le vote de la loi du 1er août 1793 qui prescrit l’anéantissement matériel de la Vendée, l’extermination des hommes et la déportation des femmes, des vieillards et des enfants. Elle l’a prolongé avec la loi du 1er octobre 1793 qui prescrit l’extermination de tous les Vendéens sans distinction d’âge, de sexe et d’appartenance politique. Elle l’a achevé avec la chute de Robespierre, le 27 juillet 1794, quand les Conventionnels ont mis fin au génocide. La guerre civile a duré dix mois, le génocide douze mois avec une période de chevauchement de cinq mois qui va du 1er août au 24 décembre 1793. »

Et ailleurs : « Cinq cents enfants des deux sexes, dont le plus âgés avaient quatorze ans, sont conduits au même endroit pour y être fusillés. Jamais spectacle ne fut plus attendrissant et plus effroyable ; la petitesse de leur taille en met plusieurs à l’abri des coups de feu ; il délient leurs liens, s’éparpillent jusque dans les bataillons de leurs bourreaux, cherchent refuge entre leurs jambes qu’ils embrassent fortement en levant vers eux leur visage où se peignent à la fois l’innocence et l’effroi. Rien ne fait impression sur ces exterminateurs ; ils les égorgent à leurs pieds ; d’autres parviennent à s’écarter de ces bataillons de la mort : des soldats se détachent et le plomb arrête leur course en les renversant sur la poussière : des cavaliers les atteignent et les massacrent ; les plus proches sont assommés par ces cannibales.

Massacre des Lucs perpétré par les troupes républicaines des colonnes infernales pendant les guerres de Vendée, le 28 février 1794. Détail d'un vitrail de l'église des Lucs-sur-Boulogne

Massacre des Lucs perpétré par les troupes républicaines des colonnes infernales
pendant les guerres de Vendée, le 28 février 1794. Détail d’un vitrail
de l’église des Lucs-sur-Boulogne

« La vigueur de l’âge les fait relever plusieurs fois sous les coups de crosse qu’on leur assène ; autant de fois ils sont renversés jusqu’à ce qu’ils soient privés de la lumière. Malheureux enfants, ils appellent à haute voix leur père, leur mère à leur secours. Hélas ! Ils ne sont plus. La nature est muette pour eux. L’humanité ne peut se livrer à ses heureux sentiments. La mort attend ceux à qui elle inspire le plus léger mouvement : un soldat perd connaissance à la vue de ce spectacle horrible. Le fer achève de le plonger dans les ténèbres. Un officier ose demander grâce. Il est traduit au milieu de ces groupes d’enfants et fusillé avec eux. »

Reynald Secher, docteur ès lettres, écrivain, scénariste, est l’auteur du concept de mémoricide, quatrième crime de génocide. Gilles-William Goldanel (préfacier de ce livre), avocat pénaliste, président-fondateur d’Avocats sans frontières, est l’auteur de plusieurs ouvrages. Hélène Piralian-Simonyan (qui a rédigé une postface), philosophe et psychanalyste, travaille sur les génocides et les effets psychiques que leurs dénis entraînent pour les héritiers de victimes comme pour ceux des bourreaux. Stéphane Courtois (également auteur d’une postface) est directeur de recherches au CNRS, spécialiste des phénomènes révolutionnaires.

INFORMATIONS PRATIQUES :
Vendée : du génocide au mémoricide. Mécanique d’un crime légal contre l’humanité, par Reynald Secher (préface de Gilles-William Goldnadel, postfaces de Hélène Piralian et Stéphane Courtois). Éditions du Cerf.
444 pages. Format 13,6x21,6 cm. 24 euros.
ISBN : 978-2204095808. Paru en octobre 2011

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Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.

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