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Brachiosaures : leur plus vieux cousin
vivait en France
(Source : Le Figaro)
Publié le jeudi 10 août 2017, par Redaction
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Des paléontologues français et anglais ont décrit un fossile découvert dans le Jura en 1934 comme étant le plus ancien représentant du groupe des brachiosauridés. Il serait vieux de 160 millions d’années.
 

Les ossements fossiles du dinosaure de Damparis, découverts en 1934 dans une carrière du Jura, prenaient la poussière depuis des décennies dans les collections du Muséum, à Paris. L’animal était clairement un sauropode, cette famille de grands animaux herbivores dont les plus connus sont le diplodocus ou le brachiosaure. Avec leur long cou et leur longue queue, les sauropodes sont les plus gros animaux terrestres. En 1943, l’abbé Albert-Félix de Lapparent, paléontologue et géologue, l’avait pourtant catalogué comme membre de l’espèce Bothriospondylus madagascariensis. Une classification trop rapide !

« Tous ceux qui avaient vu le matériel, ou, en tout cas, la partie visible dans les collections du Muséum ces dernières années, se doutaient bien que cette classification n’était pas la bonne, mais personne n’avait pris le temps d’en refaire une étude détaillée », explique Ronan Allain, paléontologue au Muséum national d’histoire naturelle de Paris.

Avec le Britannique Philip Mannion, de l’Imperial College, à Londres, et Olivier Moine, géologue au Laboratoire de géographie physique (CNRS/université Paris-I), il s’est donc lancé dans le travail de titan de remise en état des fossiles du spécimen, dont certains ont été abîmés pendant les années de stockage. « L’équipe du Muséum a passé beaucoup de temps à préparer les fossiles disponibles, à les dépoussiérer mais aussi à faire quelques réparations, précise Philip Mannion. Puis, nous avons photographié et décrit dans le détail tous les ossements. » L’animal n’est pas complet, mais ses restes — les quatre pattes, des vertèbres et presque toutes ses dents — suffisent largement pour décrire une nouvelle espèce.

Proche des brachiosaures, les Vouivria vivaient sur les rivages de l'actuelle Franche-Comté, il y a 160 millions d'années

Proche des brachiosaures, les Vouivria vivaient sur les rivages de l’actuelle Franche-Comté,
il y a 160 millions d’années. © Crédit photo : Imperial College London / Chase Stone

Long de 15 mètres
Les conclusions, publiées cette semaine dans la revue PeerJ, montrent que le sauropode jurassien méritait clairement qu’on se penche sur son cas. Il s’agit non seulement d’une nouvelle espèce, baptisée Vouivria damparisensis, en hommage à la vouivre, serpent ailé fabuleux de Franche-Comté, mais cette dernière est aussi la plus ancienne dans la famille des brachiosauridés, avec un âge d’environ 160 millions d’années, au début du jurassique supérieur. « Vouivria ne faisait pas partie à proprement parler de l’espèce des brachiosaures, mais on peut dire sans se tromper que c’était un cousin ou un proche de la famille », raconte Philip Mannion.

« On fait reculer d’au moins 5 à 6 millions d’années l’âge des premiers brachiosauridés, c’est loin d’être négligeable, précise Ronan Allain. Et c’est intéressant de trouver le premier en Europe, puisqu’on sait qu’il vivait sur tous les continents. En Europe donc, mais aussi en Amérique et en Afrique. À cette époque du jurassique, ces continents ne s’étaient pas encore complètement séparés, ce qui n’est plus le cas plus tard au crétacé. »

Avec une longueur totale de 15 mètres (plus qu’un semi-remorque) et une masse estimée à 15 tonnes, l’animal était déjà massif, mais n’est pas le plus gros connu. « Comme on pense que ce spécimen de Vouivria est mort jeune, peut-être l’espèce adulte atteignait-elle des tailles encore un peu plus grandes », précise Philip Mannion.

« Plus que la classification de Vouivria dans la famille de brachiosauridés, qui pourrait, ou non, être contestée dans quelques années, je trouve que c’est un beau travail, car cela n’est pas si courant de découvrir une nouvelle espèce de dinosaure en France », commente Jean Le Loeuff, paléontologue et directeur du Musée Dinosauria d’Espéraza, dans l’Aude. « Ma petite frustration, c’est que les collections du Muséum conservent encore bien des trésors de ce genre qui n’ont pas eu le temps d’être étudiés, faute de paléontologues travaillant sur les dinosaures dans notre pays », regrette le scientifique.

Et Ronan Allain n’a pas le temps de se consacrer à plein temps au patrimoine parisien, il est aussi en train d’exploiter les riches surprises du site d’Angeac-Charente, où l’on a découvert récemment ce qui semble l’un des plus gros dinosaures jamais vus dans le monde, un sauropode qui a un fémur de 2,60 m de long !

Cyrille Vanlerberghe
Le Figaro

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