LA FRANCE PITTORESQUE
Trèfle (Grand) rouge et chats
(D’après « Le Magasin pittoresque », paru au XIXe siècle)
Publié le mercredi 20 février 2013, par LA RÉDACTION
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Le grand trèfle rouge, qui est un élément important des prairies artificielles, demeurerait presque toujours stérile si les bourdons en venant y chercher leur nourriture, n’agitaient ses fleurs et n’en répandaient la poussière, fécondante. Ces insectes, appartenant à la famille des mellifères, sont beaucoup plus gros que les abeilles, qui rendent un service semblable au petit trèfle, mais qui n’ont pas le suçoir assez long pour atteindre le fond du grand trèfle rouge.

Trèfle rouge

Trèfle rouge

Or, les bourdons ne construisent pas des ruches comme les abeilles ; mais, au printemps, les femelles pleines, qui ont passé l’hiver engourdies dans les trous des arbres ou des murs, réveillent et se construisent des nids sous terre pour y pondre et y élever leurs larves. Là naît pour la famille un grand danger, celui d’être rencontrée par les mulots qui en font leur pâture et aussi les provisions et les nids. Si les mulots se multipliaient outre mesure, ils auraient bientôt amené la disparition presque totale des bourdons. Le grand trèfle rouge, alors, serait de plus en plus restreint et laisserait la place au petit trèfle à fleurs blanches et légèrement rosées, que les abeilles suffisent à rendre fécond.

Heureusement voici venir avec grande autorité, celle de la force, une sorte de justicier, maître Rominagrobis, très friand de la chair des mulots, et qui fait la chasse à ces croqueurs de bourdons.

Le chat devient ainsi (certes sans se douter qu’il remplit une telle fonction) le protecteur de la fécondation des grands trèfles rouges en mangeant les mulots qui mangeraient les bourdons, lesquels ne secoueraient plus les fleurs du grand trèfle rouge. En se promenant dans la campagne, les observateurs remarqueront, en effet, de nombreux nids de bourdons auprès des villages où généralement abondent les chats.

Que de causes éloignées, dont on ne se préoccupe pas, ont ainsi des conséquences importantes sur des faits qui sont en apparence sans relation avec elles. Trop souvent, lorsqu’on les découvre, il n’est plus temps de porter remède au mal qui s’est produit lentement et silencieusement.

Ainsi, en détruisant à outrance les petits oiseaux un peu trop pillards des épis, mais grands chasseurs d’insectes, on s’est exposé aux ravages bien autrement considérables de myriades d’animalcules qui auraient constitué l’alimentation de la gent ailée habitant nos haies et nos arbres. Etudions l’équilibre des forces de la nature pour contribuer à le rétablir lorsqu’il périclite sur quelque point...

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