LA FRANCE PITTORESQUE
Exegi monumentum
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Publié le mercredi 20 avril 2016, par Redaction
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J’ai achevé un monument (HORACE, liv. III, ode XXIV, v. 1
 

Dans l’Antiquité, les hommes célèbres se décernaient à eux-mêmes l’immortalité, sans blesser les convenances et les usages reçus. Ulysse, dans l’Odyssée, dit devant Alcinoüs : « Je suis Ulysse, fils de Laërte, connu de tous les mortels par mon adresse, et dont la gloire s’élève jusqu’aux astres. » Dans l’Énéide, le héros troyen dit de lui-même : « Je suis le pieux Énée ; la renommée a porté mon nom jusqu’aux astres. » Horace parle du monument, plus durable que l’airain, qu’il s’est élevé par ses écrits. Parmi les modernes, Corneille a dit avec fierté : Je ne dois qu’à moi seul toute ma renommée.

« Nous croyons tous avoir le droit de mettre sur nos livres : Exegi monumentum Palais ou bicoque, cathédrale ou chaumière, cette oeuvre est à nous. » (Honoré de BALZAC)

« Nous sommes bien éloignés d’appliquer à l’Encyclopédie les titres fastueux qu’Horace prodiguait à ses ouvrages : Exegi momumentum, et que nos adversaires mêmes nous ont invités d’appliquer au nôtre, quand il serait fini, dans le doute où ils étaient qu’il le fût jamais. » (D’ALEMBERT, Préface au 3e volume de l’Encyclopédie)

« M. Guizot a bonne mémoire et se souvient très bien qu’il n’a pas achevé l’Histoire de la civilisation française, et qu’il lui reste beaucoup à faire avant de pouvoir s’appliquer l’exegi monumentum dont le gratifie si libéralement M. de Ségur. » (Gustave PLANCHE, A propos de la Réception de M. Guizot à l’Académie)

« Voilà mes œuvres ! Je ne les publie pas par vanité et je ne dis pas comme Horace : Exegi monumentum. Je suis si loin de me glorifier devant ce monceau de feuilles mortes ou éphémères tombées du rameau de l’arbre de ma vie, dont je sens déjà les racines mourir, que je dis en toute sincérité : Je voudrais n’avoir jamais su écrire. » (LAMARTINE, Préface des Œuvres complètes)

« Si l’on consulte le Moniteur après le départ de l’île d’Elbe, on y trouvera la marche graduée de Napoléon vers Paris, avec les modifications que son approche produisait dans les opinions du journal. - L’anthropophage est sorti de son repaire. - L’ogre de Corse vient de débarquer au golfe Juan. - Le tigre est arrivé à Gap. - Le monstre a couché à Grenoble. - Le tyran a traversé Lyon. - L’usurpateur a été vu à soixante lieues de la capitale. - Bonaparte s’avance à grands pas, mais il n’entrera jamais à Paris. - Napoléon sera demain sous nos remparts. - L’Empereur est arrivé à Fontainebleau. - Sa Majesté Impériale a fait son entrée hier au château des Tuileries, au milieu de ses fidèles sujets. C’est l’exegi monumentum du journalisme ; il aurait dû ne rien faire depuis, car il ne fera rien de mieux. » (Alexandre DUMAS)

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