LA FRANCE PITTORESQUE
8 septembre 1381 : émeute et incendie
au siège du conseil municipal de Béziers
(D’après « Histoire de Béziers ou Recherches
sur la province de Languedoc », paru en 1845)
Publié le lundi 7 septembre 2015, par Redaction
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Après la mort du roi Charles V (16 septembre 1380), Charles VI, son fils et son successeur, enlève au comte de Foix le gouvernement du Languedoc, pour le donner au duc de Berry, son oncle. Le comte de Foix, irrité de se voir injustement dépouillé de ces hautes fonctions, fait un appel aux peuples de la province, et lève l’étendard de la révolte.

Béziers ne balança pas à suivre le parti du comte ; et quand celui-ci eut fait la paix avec le duc de Berry, cette malheureuse cité, forcée de se soumettre au nouveau gouverneur du Languedoc, éprouva le sort des peuples qui veulent se mêler des querelles des grands. Béziers fut condamnée à payer au duc de Berry une forte amende.

Le 8 septembre 1381, jour de Notre-Dame, les consuls de Béziers et tous les conseillers municipaux délibéraient à l’hôtel de ville si l’on devait se soumettre à l’impôt exorbitant de vingt sols par maison, qu’exigeait le duc de Berry. Le peuple, craignant d’être trahi, se rassemble ; il attend patiemment la fin de la séance ; alors les portes s’ouvrent. La nouvelle qu’on apprend est sans doute fâcheuse ; car aussitôt un murmure s’élève de toute part.

Jean Ier de Berry (1340-1416)

Le duc Jean Ier de Berry (1340-1416)

Les magistrats, effrayés, n’osent sortir ; ils font fermer les portes de l’hôtel de ville, et quelques-uns d’entre eux vont dans la tour chercher un refuge. Le peuple, exaspéré, se porte alors aux excès les plus déplorables ; il met le feu à l’hôtel de ville. Bientôt la fumée et les flammes dérobent à la vue ce vaste monument. Les magistrats, qui n’ont pas su braver l’émeute, périssent dans l’embrasement, et ceux qui échappent à ce supplice trouvent la mort en se précipitant du haut de la tour.

Les malfaiteurs, qui profitent toujours des scènes sanglantes pour se livrer aux plus grands crimes, ne tardent pas à se répandre dans la cité ; ils enfoncent les portes des maisons, pillent les plus riches habitants et donnent la mort à ceux qui ont le courage de les repousser.

Enfin, le jour de la justice se lève : on s’empare des révoltés, et tous expient, par la peine capitale, les crimes dont ils s’étaient rendus coupables. Le Thalamus de Montpellier — Annales historiques de la ville couvrant la période 814-1604 — en porte le nombre à quatre-vingts ; Jacme Mascaro, contemporain des événements et écuyer des consuls de la ville, à plus de cent ; Pierre Andoque, conseiller du roi au présidial de Béziers au XVIIe siècle, à plus de deux cents (Histoire du Languedoc).

On dit que ces exécutions eurent lieu à cinq ou six cents pas de la ville, et que sans l’intervention de l’évêque Sicard, le duc de Berry se serait montré beaucoup plus sévère. Ce prince, il est vrai, ne se contenta pas de châtier les auteurs de la révolte ; il voulut aussi punir la ville qui en avait été le théâtre, et Béziers fut imposée de nouveau pour une somme de douze mille livres.

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Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.

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