LA FRANCE PITTORESQUE
Cafetière (La) qui tua Balzac
(Source : Le Point)
Publié le dimanche 7 décembre 2014, par Redaction
Imprimer cet article
L’écrivain buvait jusqu’à 50 tasses de café par jour pour mener à bien son travail herculéen. Il en serait mort.
 

L’arme du crime protégée par une vitre. Comme elle paraît innocente ! Toute de blanc vêtue, parée de cercles rouges, c’est une petite cafetière en porcelaine de Limoges posée sur sa chaufferette. Durant des jours, des semaines, des mois et même des années, elle servit à son maître Balzac des centaines de litres de café. Il en buvait, dit-on, jusqu’à 50 tasses par jour. Pas un café allongé de Belges, mais une liqueur hyper concentrée à la Turque.

Le directeur de la Maison de Balzac, Yves Gagneux, est intarissable sur la passion de l’écrivain pour le café. Durant les dernières années de sa vie, vivant presque en reclus dans sa drôle de maison d’Auteuil, l’auteur de La Comédie humaine cravachait son esprit au café pour pouvoir écrire jusqu’à 18 heures par jour. Le forçat de l’écriture.

La cafetière de Balzac

La cafetière de Balzac

La caféine, c’était ses amphétamines, sa cocaïne. Balzac ne confiait à personne le soin de confectionner son mélange. Il aurait eu horreur de Nespresso. Il sillonnait Paris à la recherche des meilleurs cafés. En général, il se confectionnait un mélange de trois variétés originaires de l’île Bourbon, de la Martinique et de moka du Yémen. Puis il s’occupait lui-même de préparer la décoction qu’il faisait bouillir des heures pour obtenir un concentré de caféine capable de le faire tenir toute la nuit.

Dans son Traité des excitants modernes, Balzac écrit : « Le café tombe dans votre estomac [...]. Dès lors, tout s’agite : les idées s’ébranlent comme les bataillons de la Grande Armée sur le terrain d’une bataille, et la bataille a lieu. Les souvenirs arrivent au pas de charge, enseignes déployées ; la cavalerie légère des comparaisons se développe par un magnifique galop ; l’artillerie de la logique arrive avec son train et ses gargousses ; les traits d’esprit arrivent en tirailleurs ; les figures se dressent ; le papier se couvre d’encre, car la veille commence et finit par des torrents d’eau noire, comme la bataille par sa poudre noire. »

De retour de Pologne en mai 1850, le géant de l’écriture, mais minuscule par la taille, s’abat comme un chêne, l’organisme usé jusqu’à la corde, le cœur délabré, le corps envahi d’un œdème généralisé, gagné par la gangrène. Le café aurait joué un grand rôle dans cette déroute. Il n’a que 51 ans. Le 18 août, son ami Victor Hugo lui rend visite : « Il avait la face violette, presque noire, inclinée à droite, la barbe non faite, les cheveux gris et coupés courts, l’œil ouvert et fixe. Je le voyais de profil et il ressemblait à Napoléon. » Quelques heures plus tard, Balzac s’éteignait.

Frédéric Lewino et Anne-Sophie Jahn
Le Point

Accédez à l’article source

Copyright © LA FRANCE PITTORESQUE
Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.

Imprimer cet article

LA FRANCE PITTORESQUE