LA FRANCE PITTORESQUE
L’étonnante histoire du clairon
qui sonna le premier cessez-le-feu
le 7 novembre 1918
(Source : Le Point)
Publié le samedi 15 novembre 2014, par Redaction
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Il appartenait au caporal Pierre Sellier, qui s’en servit pour ouvrir le chemin aux plénipotentiaires allemands venus négocier l’armistice
 

Exposé dans une vitrine du musée de l’Armée, le clairon de Pierre Sellier est bien le seul à regretter la Grande Guerre. À l’époque, il ne se passait guère de jour sans qu’il ne sonnât un ordre. Il fallait alors voir les soldats lui obéir au doigt et à la note. Et puis arriva le 7 novembre 1918, son jour de gloire ! Ce jour-là, il fut le premier à sonner le cessez-le-feu. Oui, le premier de tous les clairons sur le front ! Et quatre jours plus tard, il sonnait, comme tous ses frères, l’armistice.

Ce clairon appartenait au caporal Pierre Sellier, 26 ans, incorporé en octobre 1913 au 171e régiment d’infanterie. Sachant jouer de la trompette, il est incorporé dans la clique du régiment et parvient à traverser vivant et vaillamment les quatre années de guerre. Le 7 novembre 1918, la délégation allemande désignée par le commandement allemand pour négocier l’armistice prend la route de la clairière de Rethondes. À 20h20, elle se présente devant le poste de la 3e compagnie près de La Capelle dans l’Aisne, tenue par le 171e R. I. Le capitaine Lhuiller, chef du 1er bataillon, accueille le convoi avant de demander à Sellier de remplacer le clairon allemand qui se tient debout sur le marchepied de la première voiture.

À 20h30, la délégation allemande se remet en route avec le clairon français sonnant le Cessez-le-feu et plusieurs autres refrains militaires jusqu’au PC de la 171e à La Capelle. La mission de Sellier s’arrête à cet endroit. Il passe le relais à d’autres soldats musiciens qui jouent la Marseillaise. Le soir, à minuit, le cessez-le-feu cesse et les combats reprennent jusqu’à l’armistice définitif le 11 novembre. Ce jour-là, Pierre Sellier sonne l’armistice comme des centaines d’autres clairons de part et d’autre du front.`

Le 28 août 1919, démobilisé, le caporal clairon rejoint sa ville natale de Beaucourt, près de Saint-Dizier, conservant son précieux clairon. Six ans plus tard, l’American Legion lui propose de participer à une tournée américaine pour répéter sa sonnerie. Peu enclin à voyager, il refuse. De même, il oppose une fin de non-recevoir au clairon allemand qu’il avait remplacé sur le marchepied de la voiture des plénipotentiaires et qui lui proposait une tournée aux États-Unis pour jouer à deux la scène du 7 novembre.

Sellier juge que les blessures de la guerre sont encore trop vives pour que les deux ennemis d’hier jouent ensemble du clairon sur scène. Les Américains déçus lui proposent alors une jolie somme pour acquérir son instrument. Le brave poilu oppose un refus ferme. Il préfère offrir son instrument au musée de l’Armée en 1925. Et depuis ce jour-là, le brave clairon se morfond dans sa vitrine, espérant toujours qu’un soldat l’empoigne pour lui redonner vie.

Anne-Sophie Jahn et Frédéric Lewino
Le Point

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