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Tigresse du Bengale (La)
qui a failli éventrer le duc d’Orléans
(Source : Le Point)
Publié le vendredi 24 octobre 2014, par Redaction
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Naturalisé, le fauve est devenu un des spécimens stars du Muséum national d’histoire naturelle de Paris
 

C’est le couple star de la grande galerie du Muséum. Depuis cent vingt-cinq ans, la tigresse s’agrippe désespérément à la nacelle fixée sur le dos de l’éléphant. Peu de visiteurs savent que cette étreinte se veut être la reconstitution d’un drame datant du 26 mars 1888, lors d’une chasse au tigre du Bengale.

Ce jour-là, l’arrière-petit-fils du roi Louis-Philippe, qui s’est enrôlé dans l’armée britannique, part à la chasse au tigre du Bengale, à dos d’éléphant. Il n’a que 19 ans et se fait accompagner de son cousin, Henri d’Orléans. Bientôt, une tigresse est acculée. Henri raconte la scène dans ses mémoires : « La muraille d’éléphants tient ferme. La bête alors se jette de côté ! Elle se retourne et voit l’éléphant du duc d’Orléans qui marche vers son gîte : on ne se contente pas de l’assiéger, on veut la forcer ! Au moins ne sera-ce pas impunément ; si elle doit mourir, elle vendra chèrement sa vie.

La tigresse du Bengale naturalisée

La tigresse du Bengale naturalisée

« Elle s’élance sur l’éléphant de Philippe, saisit la paroi de l’howdah (NDLR : la nacelle) et s’y accroche avec ses griffes... mais tout conspire à la trahir : le côté de l’howdah cède et elle retombe. L’éléphant s’affole et, la trompe tendue en avant, part au galop. Le duc d’Orléans a son fusil brisé en deux contre une branche. Heureusement, l’éléphant s’arrête en rejoignant les autres et mon cousin glisse à terre. Quant à la tigresse, elle a disparu. Mais le lendemain, elle se laisse abattre à la même place sans opposer la moindre résistance. »

Le jeune duc d’Orléans fait tanner la peau de la tigresse, qu’il rapporte à Londres pour la confier au plus célèbre taxidermiste de l’époque, Rowland Ward. Il lui demande d’immortaliser la scène de l’attaque. Bien entendu, l’éléphant ne peut être celui monté réellement par le duc. Le couple tigresse-éléphant inaugure une immense collection de trophées et de spécimens collectés lors de ses multiples expéditions dans le monde entier. Il la lègue à la France, qui ne voit que le Muséum pour l’accueillir.

Mais la collection est si riche qu’il faut bâtir un nouveau bâtiment pour l’abriter à partir de 1928. Faute d’entretien, celui-ci tombe en ruine au point qu’il faut l’abattre dans les années soixante. Quelques spécimens rescapés trouvent abri dans la grande galerie, qui fête, cette année, ses vingt ans.

Frédéric Lewino et Anne-Sophie Jahn
Le Point

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