LA FRANCE PITTORESQUE
L’histoire de France vue par
les jeunes : une succession de guerres
(Source : Le Monde)
Publié le dimanche 29 juin 2014, par Redaction
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Que s’est-il passé en France entre le sacre de Clovis et l’élection de François Hollande ? Des guerres ! Alors que les collégiens planchaient, vendredi 27 juin 2014, sur l’épreuve d’histoire-géographie du brevet, une enquête menée auprès de 5 823 jeunes de 10 à 20 ans révèle que les conflits occupent, selon eux, une place prépondérante dans le roman national français.
 

Pour leur enquête « La fabrication du commun. Récits de l’histoire nationale par des élèves », dont les premiers résultats commencent à être divulgués, les chercheurs du laboratoire Education, cultures, politique (ECP) ont demandé à ces jeunes Français de raconter par écrit, en moins de 45 minutes, l’histoire du pays.

Dans ces près de 6 000 textes, les faits militaires « tiennent une place très importante », relate Églantine Wuillot, enseignante associée à l’Institut français de l’éducation (IFE). Le terme « guerre » apparaît 8 392 fois au total. Il alimente 40 % des récits du primaire et 75 % de ceux du secondaire. Certains jeunes font preuve d’un redoutable esprit de synthèse : « Bref, les Français ont toujours été un peuple guerrier qui sert ses propres intérêts en temps d’expansion ou en temps d’occupation », s’est ainsi contenté d’écrire l’un d’eux. Selon un autre collégien, les vingt derniers siècles « se divisent en trois parties : l’avant-guerre, l’après-guerre, et la guerre ».

Les deux guerres mondiales surreprésentées
S’il fallait résumer les copies, seuls quatre grands événements ont rythmé l’histoire de France : les deux guerres mondiales, citées par 37 % d’entre eux, le siège d’Alesia (6 %) et la guerre de Cent Ans (4 %). Les autres conflits figurent chacun dans moins de 3 % des copies. Les grands absents du roman national sont d’abord des absentes. A l’exception de la téméraire Jeanne D’arc, dont le nom est mentionné 207 fois, très peu de femmes. On trouve Marie-Antoinette (122 occurrences) et Marie Curie, citée seulement à 14 reprises. Certes, entre les deux, il y a bien Marianne (90 occurrences), « mais c’est plus un personnage qu’une personne », relève Laurence De Cock, enseignante associée à l’Institut français de l’éducation.

Bonaparte franchissant le Grand-Saint-Bernard

Bonaparte franchissant le Grand-Saint-Bernard (épisode marquant le début
de la seconde campagne d’Italie). Détail de la peinture de Jacques-Louis David
exécutée entre 1800 et 1803

Le Panthéon masculin est plus fourni, avec 120 personnalités en tout. « Un véritable name dropping », estime Mme De Cock, « les élèves éprouvent le besoin de personnifier leur récit », ajoute-elle. Louis XIV siège confortablement en haut du podium (1 320 occurrences). Il est suivi de Napoléon (1 238), Charlemagne (991), Louis XVI (985) et Clovis (837).

Sarkozy se glisse entre Hitler et Jules César
Si l’on se restreint aux 1 973 textes des élèves de 6e, le classement diffère légèrement. Nicolas Sarkozy (490 occurrences) y arrive d’ailleurs en 7e position. « L’enquête s’est déroulée au moment de l’élection présidentielle de 2012 », justifie Benoît Falaize, chercheur à l’université de Cergy-Pontoise, « et puis la surmédiatisation du précédent gouvernement a probablement fait son œuvre ». L’ancien président s’est donc glissé entre Adolf Hitler et Jules César.

« Comme les élèves n’avaient que 45 minutes pour rédiger leur texte, ils ont fait appel à la mémoire immédiate », estime la directrice du laboratoire ECP, Françoise Lantheaume. Selon elle, « les récits sont parfois un peu en vrac, mais les élèves savent indéniablement beaucoup des choses ». Elle rappelle que l’enquête ne visait pas « à contrôler les connaissances des jeunes, mais à savoir s’ils partagent une même vision de l’histoire, des repères communs ».

Par ailleurs, le ministère de l’éducation nationale évalue déjà les acquis des élèves en histoire-géographie. En juin 2013, il avait annoncé une chute du niveau des collégiens entre 2006 et 2012. Sur cette période, la part des élèves « faibles » dans cette matière est passée de 15% à 21 % et celle des « bons », de 10% à 6%. « On remarque un affaiblissement de l’assimilation d’une culture scolaire géographique et historique », avait conclu la rue de Grenelle.

Emma Paoli
Le Monde

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