Lantara est le vrai type du génie facile, insouciant, paresseux, s’inspirant et s’usant au cabaret, puis s’éteignant à l’hôpital. Né en 1745, dans un village près de Montargis, dès l’enfance il charbonnait de ses paysages les murs et les portes des maisons. Un peintre de Versailles lui donna quelques leçons, et bientôt le maître en aurait pu demander à l’élève.
Lantara excella surtout à reproduire, dans toute l’exactitude de leur coloris et de leur caractère, les différentes heures de la journée. « Ses points du jour, a dit un biographe, ont toute la fraîcheur de l’aurore ; ses couchants n’ont pas moins de vérité : ses clairs de lune sont d’un ton argentin, rempli de finesse. Enfin le plus bel éloge qu’on en puisse faire, c’est que dans plusieurs parties de ses ouvrages, il rappelle Claude Lorrain ».
Ne prenant jamais le pinceau que pressé par une nécessité impérieuse, lié d’amitié avec une foule d’artisans, dont il payait l’hospitalité d’un dessin ou d’un tableau, que ceux-ci vendaient à très haut prix, Lantara, qui aurait pu arriver à la fortune, ne sortit jamais de la misère. Quelques amateurs cherchèrent à l’attirer chez eux ; mais l’artiste jeté au milieu du luxe et du grand monde, perdait tout son talent ; pour le retrouver, il avait besoin de rentrer dans son indigente obscurité. A peine âgé de trente-trois ans et accablé de souffrances, il alla frapper à l’hospice de la Charité : il y entra à midi ; à six heures du soir il avait cessé de vivre.
Ses tableaux et ses dessins, qui ne sont pas très nombreux, tiennent dans les cabinets un rang distingué. Le théâtre du Vaudeville a longtemps représenté une esquisse agréable, sous le titre de Lantara ou le Peintre au cabaret.
Copyright © LA FRANCE PITTORESQUE
Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.
