LA FRANCE PITTORESQUE
1er mars 1781 : mort de Jean-Baptiste La Curne de Sainte-Palaye
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Publié le vendredi 2 avril 2010, par LA RÉDACTION
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Cet écrivain n’est pas seulement célèbre par la curieuse investigation qu’il porta dans les antiquités du moyen âge, mais encore par cette union si touchante, qui, pendant le cours d’une longue carrière, régna entre son frère et lui.

Ils étaient jumeaux, et parurent le rester toute leur vie, ne se quittant jamais, habitant la même demeure, la même chambre, sans en excepter les temps de maladie, enfin ayant tout en commun, excepté la renommée, qui s’attachait à l’historien de la chevalerie.
Sainte-Palaye, versé dans l’étude des langues anciennes, annonça de bonne heure ce qu’il serait un jour, et l’Académie des inscriptions l’admit à l’âge de vingt-sept ans, en 1724. Chargé de la correspondance de la cour de France avec le roi Stanislas, il mérita l’estime de ce prince, qui voulait lui ouvrir la route des honneurs et de la fortune, en l’attachant aux honneurs de la diplomatie. Sainte-Palaye sacrifia de brillantes espérances à ses études indépendantes. Il s’occupa d’abord d’un travail sur les Vies de Plutarque : mais bientôt il trouva dans l’histoire de France une mine plus riche et à peine exploitée jusque là.

Familiarisé avec la lecture des anciens chroniqueurs, il publia plusieurs Mémoires où il les juge avec sagacité, et présente une analyse rapide de manuscrits importants. Il conçut la pensée de publier une édition fidèle de Froissart ; mais il n’exécuta pas ce projet, réservé à l’érudition consciencieuse de notre époque. Il fit deux voyages en Italie, et plusieurs tournées en France, pour recueillir des matériaux, afin de compléter son principal ouvrage, qui a pour titre : Mémoires sur .l’ancienne chevalerie, considérée comme un établissement politique et militaire.

Il commença plusieurs autres entreprises, qu’il ne put achever. Ainsi, ayant réuni, dit-on, plus de quatre mille notices de vieux manuscrits français, il avait l’intention d’en extraire une histoire des troubadours : il abandonna à l’abbé Millot la rédaction de cet ouvrage, pour se consacrer à la composition de deux dictionnaires, l’un des antiquités françaises, et l’autre de notre ancienne langue. Pour mieux embrasser toutes les parties d’un si vaste travail, il prit soin lui-même de se former un collaborateur, Jean Mouchet, et réforma son plan d’après les conseils d’un ami.

Il avait obtenu un fauteuil à l’Académie française en 1758, et les académies des provinces et de l’étranger étaient fières de s’associer un écrivain qui faisait faire de si grands progrès à la branche d’histoire la plus négligée parmi nous.

Au milieu de tant de succès, Sainte-Palaye ne formait qu’un seul vœu. : c’était de finir sa vie en même temps que ce frère avec qui il l’avait commencée. Ce vœu d’une pieuse tendresse ne fut pas exaucé ; il survécut au compagnon de sa longue existence, et dès lors tomba dans une langueur qui prouvait assez qu’il avait perdu la plus précieuse moitié de lui-même.

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Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.

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