Jean Ray, qui doit être regardé comme le plus savant naturaliste que l’Angleterre ait produit, naquit le 29 novembre 1628 à Black Notley, dans le comté d’Essex.
Par un hasard heureux, la théologie, à laquelle Ray avait consacré ses premières années, fit naître en lui un goût très-vif pour l’histoire naturelle, alors presque entièrement ignorée de ses compatriotes, qu’il apprit sans guide, et qu’il rendit bientôt un objet d’attention générale, en signalant les connexions intimes qui la rattachent aux arts et à toutes les jouissances de la vie. Non content de la placer ainsi sous un point de vue avantageux, il l’éleva à la dignité de véritable science, en s’attachant à la recherche des rapports généraux, dont l’étude avait été jusque là sacrifiée à celle des détails et des spécialités. H perfectionna surtout la méthode synoptique, qui consiste à diviser toujours par des dichotomies prises dans des parties différentes, et à ne pas s’en tenir à une seule partie, d’après laquelle on établirait un certain nombre de classes. En botanique, il a réellement fondé une ère nouvelle ; car, s’il a suivi de près les traces de Morison, il a cherché aussi avec constance les analogies des plantes, défendu la méthode naturelle contre les méthodistes purement systématiques, établi des familles dont plusieurs ont été observées par lui pour la première fois, présenté le tableau exact de la science des végétaux à la fin du dix-septième siècle, et ajouté une multitude d’observations à celles qu’il puisait, avec autant d’érudition que de critique, dans les écrits de ses prédécesseurs. Ses travaux zoologiques ont moins d’importance. Cependant ce fut lui qui commença à porter la méthode dans le règne animal, où tout était confusion et désordre depuis Aristote. Ray s’est fait connaître aussi comme théologien dans un livre consacré à démontrer l’existence de Dieu par les seules considérations de la nature, et dans un Traité sur le chaos, la création, le déluge universel et la fin du monde. Ce dernier ouvrage a perdu toute importance depuis que les naturalistes sont devenus assez sages pour renoncer aux hypothèses géologiques, et s’en tenir aux faits de la géognosie ; mais quand, pour le juger, on se reporte au temps où il fut écrit, alors on est surpris de la liberté de penser qui y règne partout, et qui annonce un ami de la bonne philosophie, un homme cherchant la vérité avec candeur et modestie. Tant d’occupations si variées n’absorbaient cependant pas tous les moments de Ray ; il en trouva encore pour se livrer à des recherches philologiques : ses longues méditations sur le génie de la langue anglaise nous ont valu une ample collection de proverbes anglais, et une autre, non moins estimée, des mots de cet idiome, dont on ne fait pas généralement usage. — Jourdan.
Copyright © LA FRANCE PITTORESQUE
Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.
