Condamnée à hanter le château et se transformant chaque vendredi en un crapaud tenant en sa bouche une clé, la Dame Blanche du Greifestein serait délivrée par qui l’embrasserait sous sa forme hideuse et lui prendrait cette clé...
Au début du XXe siècle vivait encore à Saverne (Bas-Rhin) un vitrier qui, chaque dimanche, depuis de longues années, avait l’habitude d’aller se promener à l’ouest de la ville pour y accomplir un singulier rituel.
Il se rendait à l’entrée de la belle vallée de la Zorn, là où se trouve le château de Greifenstein, en face du Haut-Barr et des deux Geroldseck. Il s’asseyait sur un rocher, prenait son flageolet et commençait à jouer une mélodie. Il vit plusieurs fois apparaître sur les ruines de la tour, en face de l’endroit où il se tenait, une dame vêtue de blanc qui l’accompagnait sur la flûte.
Ruines du château de Greifenstein (Bas-Rhin). © Crédit photo : Office de Tourisme du Pays de Saverne
Au commencement, cette apparition l’impressionna, mais il s’y habitua peu à peu. Une fois même, il prit son courage à deux mains et s’écria :
— Prenez garde de ne pas tomber.
— Plût à Dieu que je pusse me précipiter dans la vallée pour mettre fin à mes maux.
— Êtes-vous donc si malheureuse, demanda le vitrier compatissant.
— Plus que vous ne pouvez vous l’imaginer, répondit l’apparition ; je n’ai aucun repos dans ma tombe. Quand j’étais au monde, j’étais orgueilleuse et avide ; j’entassais trésors sur trésors, que je cachais dans ce château ; puis je m’emparai injustement des prairies que l’on appelle encore maintenant Helematt, d’après mon nom d’Hélène. Mais mes épreuves peuvent prendre fin. Par punition du ciel, je prends chaque vendredi, la forme d’un affreux crapaud. Celui qui, me trouvant sous cette forme, aurait le courage de m’embrasser et de prendre la clef d’or que j’ai alors dans la bouche, me délivrerait. Il deviendrait propriétaire d’un tiers des trésors contenus dans les creux de ces rochers, les deux autres tiers devant être consacrés à de bonnes œuvres.
La Dame Blanche du Château de Greifenstein
Ces paroles et le regard suppliant que la dame lui lança, déterminèrent le vitrier à lui promettre de tenter la délivrance le vendredi suivant. Il vint dans la vallée à l’heure dite, mais quand il vit sur le rocher l’énorme crapaud, hideux avec ses yeux étincelants, il perdit tout courage et se sauva en courant.
Depuis ce jour, il ne retourna plus au château de Greifenstein et ne joua jamais de son instrument favori.
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