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Procès de Jeanne d'Arc. Anecdotes historiques

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Anecdotes insolites
Petite Histoire de France et anecdotes, brèves et faits divers insolites, événements remarquables et curieux, événements anecdotiques
Procès de Jeanne d’Arc
(Document du XIXe siècle communiqué par ville de Loches)
Publié / Mis à jour le mardi 9 février 2010, par LA RÉDACTION
 
 
Temps de lecture estimé : 12 mn
 

C’est un procès d’hérésie que Pierre Cauchon, et avec lui l’université de Paris, entend faire à Jeanne. De tels procès sont alors menés par l’Inquisition, instituée en 1231. Il s’agit avant tout de prouver que le roi de France a été couronné par les artifices d’une sorcière - en tout cas d’une hérétique. Les procès de sorcellerie sont rares à l’époque. Il faudra attendre le XIXe siècle pour les voir proliférer.

On a regretté que Jeanne d’Arc ne nous soit connue que par des « grimoires de notaires ». Si les événements qu’elle déclenche ont été rapportés par les chroniqueurs, ce sont les deux procès - de condamnation et de « réhabilitation » - qui nous permettent de connaître Jeanne. A cause de la sécheresse des questions et des comptes-rendus, cette personne ressort avec une netteté incomparable, à laquelle la signature des notaires au bas des pages ajoute une incontestable authenticité historique. Mais il faudra attendre le XIXème siècle (1841-1849) et le travail de Jules Quicherat pour que ces pages soient enfin publiées.

Mercredi 21 février : Première journée des interrogatoires

Jeanne - Je ne sais pas sur quoi vous me voulez interroger. Par aventure me pourriez-vous demander telles choses que je ne vous dirais point.
Cauchon - Vous jurez de dire vérité sur ce qui vous sera demandé concernant la matière de foi et ce que vous saurez ?
J - De mon père, de ma mère, et des choses que j’ai faites depuis que j’ai pris le chemin de France, volontiers je jurerai. Mais des révélations à moi faites de par Dieu, je ne les ai dites ni révélées à personne, fors au seul Charles mon Roi. Et je ne les révélerai même si on devait me couper la tête. Car j’ai eu cet ordre par vision, j’entend par mon conseil secret, de ne rien révéler à personne.[...]
C - Quels sont votre nom et votre surnom ?
J - En mon pays, on m’appelait Jeannette et, après que je fus venue en France, on m’appela Jeanne. Du surnom, je ne sais rien.
C- Quel est votre lieu d’origine ?
J - Je suis née au village de Greux. C’est au lieu dit Greux qu’est la principale église.
C - Quels étaient les prénoms de vos père et mère ?
J - Mon père s’appelait Jacques d’Arc. Ma mère Isabeau.
C - Où fûtes-vous baptisée ?
J - En l’église de Domrémy.[...]
C - Qui vous a appris votre croyance ?
J - Je l’ai appris de ma mère Pater Noster, Ave Maria, Credo. Je n’ai pas appris d’autre personne ma croyance, sinon de ma mère.v
C - Dites Pater Noster.
J - Entendez-moi en confession et je vous le dirai volontiers.[...]

Jeudi 22 février

[...]Jean BEAUPERE - Quel était votre âge quand vous avez quitté la maison devotre père ?
J - De mon âge je ne saurais déposer.
B - Dans votre jeunesse avez-vous appris quelque métier ?
J - Oui, à coudre panneaux de lin, et à filer, et je ne crains femme de Rouen pour filer et coudre.[...]
B- Quand avez-vous commencé à ouïr ce que vous nommez vos voix ?
J - Quand j’eus l’âge d’environ treize ans, j’eus une voix de Dieu pour m’aider à me gouverner. Et la première fois, j’eus grand’peur. Et vint cette voix environ l’heure de midi, au temps de l’été, dans le jardin de mon père. Je n’avais pas jeûné la veille. J’ouïs la voix du côté droit de l’église, et rarement je l’ouïs sans clarté.[...]
B - Comment était cette voix ?
J - Il me semblait que c’était une digne voix, et je crois que cette voix était envoyé de par Dieu. Lorsque j’eus ouï par trois fois cette voix, je connus que c’était la voix d’un ange. Cette voix m’a toujours bien gardée, et je comprenais bien cette voix.
B - Quel enseignement vous donnait cette voix pour le salut de votre âme ?
J - Elle m’enseigna à bien me conduire, à fréquenter l’église.[...] La voix me disait de venir en France, et je ne pouvais plus durer où j’étais. Cette voix me disait encore que je lèverais le siège mis devant la cité d’Orléans. Elle me dit en outre d’aller à Robert de Baudricourt, dans la ville de Vaucouleurs, et qu’il me baillerait des gens pour aller avec moi.[...]
B - Vites-vous quelque ange au-dessus de votre roi ?
J - Pardonnez-moi. Passez outre.
B - Votre roi eut-il des révélations ?
J - Avant que mon roi me mît à l’oeuvre, Il eut plusieurs apparitions et belles révélations.
B - Quelles apparitions et révélations eut votre roi ?
J - Je ne vous le dirai point. Vous n’aurez pas encore réponse. Mais envoyez vers le roi et il vous le dira.
B - Pourquoi votre roi vous a-t-il reçue ?
J - La voix m’avait promis que mon roi me recevrait assez tôt après que je serais venue vers lui. Ceux de mon parti connurent cette voix, je le sais bien. Mon roi et plusieurs autres ouïrent et virent les voix qui venaient à moi.
B - Entendez-vous souvent cette voix ?
J - Il n’est jour que ne l’entende, et même j’en ai bien besoin.[...]

Pierre CAUCHON : Négociateur du traité de Troyes qui lui valu l’évêché de Beauvais, Cauchon fait successivement décider que le procès de Jeanne serait mené par lui. Il se met en devoir de mettre en place tous les éléments du procès qu’il compte bien faire à Jeanne, entre autres en faisant venir de Paris six universitaires pour l’assister et convaincre Jeanne d’hérésie.

Samedi 24 février

[...]BEAUPERE - Ceux de Domrémy tenaient-ils le parti des Bourguignons ou le parti adverse ?
J - Je ne connaissais qu’un Bourguignon, et j’eusse bien voulu qu’il eût la tête coupée, voire s’il eût plu à Dieu !
B - Au village de Maxey, étaient-ils Bourguignons ou adversaires des Bourguignons ?
J - Ils étaient Bourguignons.
B - La voix vous a-t-elle dit en votre jeunesse de haïr les Bourguignons ?

J - Depuis que je compris que les voix étaient pour le roi de France, je n’ai point aimé les Bourguignons. Les Bourguignons auront la guerre s’ils ne font ce qu’ils doivent. Et je le sais par la voix.
B - En votre jeune âge, avez-vous eu révélation par la voix que les Anglais devaient venir en France ?
J - Déjà les Anglais étaient en France, quand les voix commencèrent à venir.[...]
B - En votre jeune âge, aviez-vous grande intention de persécuter les bourguignons ?
J - J’avais grande volonté et grand désir que le roi eût son royaume.

Mardi 27 février

BEAUPERE - Aviez-vous prescience que vous seriez blessée [à Orléans] ?
J - Je le savais bien, et l’avais dit à mon roi, mais que, nonobstant, il ne laissât pas de besogner. Cela m’avait été révélé par les voix des deux saintes, savoir de la bienheureuse Catherine et de la bienheureuse Marguerite. Je fus la première à poser l’échelle en haut, dans ladite bastille du pont. Et comme je levais cette échelle, je fus blessée au cou par le vireton, comme je l’ai dit.[...]

Jeudi 1er mars

CAUCHON - Que pensez-vous qu’il doive arriver à ceux de votre parti ?
J - Avant qu’il soit sept ans, Les Anglais perdront plus grand gage qu’ils ne firent devant Orléans, et ils perdront tout en France. Les Anglais auront plus grande perte qu’oncques n’eurent en France, et ce sera par grande victoire que Dieu enverra aux Français.
C - Comment le savez-vous ?
J - Je le sais bien par révélation qui fut faite, et que cela arrivera avant sept ans ; et je serai bien courroucée que ce fût autant différé. Je sais cela par révélation aussi bien que je vous sais devant moi.
C - Quand cela arrivera-t-il ?
J - Je ne sais ni le jour ni l’heure.
C - Quelle année cela arrivera-t-il ?
J - Vous n’aurez pas encore cela. Bien voudrais-je toutefois que ce fût avant la Saint-Jean ![...]
C - Sainte-Marguerite parle-t-elle langage d’Angleterre ?
J - Comment parlerait-elle anglais puisqu’elle n’est pas du parti des Anglais ?
C - Sur leurs têtes, avec les couronnes, y avait-il des anneaux d’or ou autrement ?
J - Je n’en sais rien.
C - Vous-même n’avez-vous pas certains anneaux ?
J - Vous, évêque, vous en avez un à moi. Rendez-le moi ! Les Bourguignons ont un autre anneau. Mais montrez-moi cet anneau, si vous l’avez.
C - Qui vous donna l’anneau qu’ont les Bourguignons ?
J - Mon père, ou ma mère. Il me semble qu’il y avait écrits les noms de Jhesus Maria.[...] Et l’anneau me fut donné en la ville de Domrémy. Mon frère me donna un autre anneau que vous avez, et que je vous charge de le donner à l’église.
C - N’avez-vous guéri personne avec l’un ou l’autre de vos anneaux ?
J - Jamais je n’ai guéri personne par le moyen desdits anneaux.[...]
C - Quel signe avez-vous donné à votre roi pour lui montrer que vous veniez par Dieu ?
J - Je vous ai toujours dit que vous ne le tirerez pas de ma bouche. Allez lui demander !
C - Avez-vous juré de na pas révéler ce qui vous serait demandé touchant le procès ?
J - Je vous ai autrefois dit que je ne vous dirai pas ce qui touche et ce qui va à notre roi, je ne parlerai pas.
C - Ne savez-vous point le signe que vous avez donné au roi ?
J - Vous ne le saurez pas de par moi.
C - Cela touche le procès.
J - J’ai promis de la tenir bien secret, et ne vous en dirai rien. Je l’ai promis en tel lieu que je ne le vous puis dire sans me parjurer.
C - A qui l’avez-vous promis ?
J - A sainte-Catherine et sainte-Marguerite. Et ce fut montré au roi. Je l’ai promis aux deux saintes, sans qu’elles me requissent. Et je le fis à ma propre requête, car trop de gens me l’eussent demandé, si je ne l’eusses promis aux saintes.[...]

Samedi 3 mars

CAUCHON - Avez-vous su par révélation que vous vous échapperiez ?
J - Cela ne touche point votre procès. Voulez-vous que je parle contre moi ?
C - Les voix vous en ont-elles dit quelque chose ?
J - Cela n’est point de votre procès. Je m’en rapporte à mon Seigneur. Et si tout vous concernait, je vous dirais tout. Par ma foi, je ne sais le jour ni l’heure où je m’échapperai.
C - Les voix vous en ont-elles dit quelque chose en général ?
J - Oui, vraiment, les voix m’ont dit que je serai délivrée, mais je ne sais le jour ni l’heure, et qu’hardiment je fasse bon visage.[...]
C - N’avez-vous point levé d’enfant aux fonts baptismaux ?
J - A Troyes, j’en levai un. Mais de Reims je n’en ai point de mémoire, ni de Château-Thierry. J’en levai deux aussi à Saint-Denis. Et volontiers mettais nom aux fils, "Charles", pour l’honneur de mon roi, et aux filles, "Jeanne".[...]
C - Les bonnes femmes de la ville touchaient-elles leurs anneaux à l’anneau que vous portiez ?
J - Maintes femmes ont touché à mes mains et à mes anneaux, mais je ne sais point leur coeur et intention.[...]

Samedi 10 mars : Dans la prison

La Fontaine - Depuis ce lieu de Melun, ne vous fut-il point dit par vos dites voix que vous seriez prise [à Compiègne] ?
J - Oui, par plusieurs fois, et comme tous les jours. Et à mes voix, je requérais, quand je serais prise, d’être bientôt morte, sans long travail de prison. Et elles me dirent de prendre tout en gré, et qu’ainsi il fallait faire. Mais ne me dirent point l’heure, et si je l’eusse sue, je n’y fusse pas allée. J’avais plusieurs fois demandé à savoir l’heure, mais elles ne me la dirent point.

LF - Si vos voix vous eussent commandé de faire la sortie et signifié que vous seriez prise, y fussiez-vous allée ?
J - Si j’eusse su l’heure, et que je dusse être prise, je n’y fusse point allée volontiers ; toutefois j’eusse fait leur commandement à la fin, quelque chose qui me dût être advenue.
LF - Quand vous fîtes cette sortie de Compiègne, avez-vous eu voix de partir et de faire cette sortie ?
J - Ce jour, je ne sus point ma prise et je n’eus d’autre commandement de sortir. Mais toujours il m’avait été dit que je fusse prisonnière.[...]

Lundi 12 mars : Dans la prison

La Fontaine - De ces visions, n’avez-vous point parlé à votre curé ou autre homme d’église ?
J - Non, seulement à Robert de Baudricourt et à mon roi. Je ne fus pas contrainte de mes voix à les celer : mais je redoutais moult de les révéler, par crainte des Bourguignons et qu’ils n’empêchassent mon voyage ; et, tout spécialement, je redoutais moult mon père qu’il ne m’empêchât de faire mon voyage.
LF - Croyiez-vous bien faire de partir sans le congé de votre père ou mère, puisqu’on doit honorer père et mère ?
J - En toutes autres choses, je leur ai bien obéi, excepté en ce départ. Mais depuis, je leur en ai écrit, et ils m’ont pardonné.[...]
LF - Fut-ce à la requête de Robert de Baudricourt ou de vous que vous prîtes l’habit d’homme ?
J - Ce fut par moi, et non à la requête d’homme au monde.
LF - La voix vous commanda-t-elle de prendre habit d’homme ?
J - Tout ce que j’ai fait de bien, je l’ai fait par le commandement des voix.
Quant à cet habit, j’en répondrai une autre fois. Pour le présent, je n’en suis point avisée. Mais demain, j’en répondrai.
LF - Prenant habit d’homme, pensiez-vous mal faire ?
J - Non, et encore de présent si j’étais en l’autre parti et en cet habit d’homme, il me semble que ce serait un des grand biens de France de faire comme je faisais avant ma prise.[...]

Jeudi 15 mars

La Fontaine - Puisque vous demander à ouïr messe, il semble que ce serait le plus honnête que vous soyez en habit de femme. Lequel aimeriez-vous mieux ? Prendre habit de femme et ouïr messe ? Ou demeurer en habit d’homme et non ouïr messe ?
J - Certifiez-moi d’ouïr messe si je suis en habit de femme et sur ce je vous répondrai.
LF - Et je vous certifie que vous orrez messe si vous êtes en habit de femme.
J - Et que dites-vous si j’ai juré et promis à notre roi de ne pas mettre bas cet habit ? Toutefois je vous réponds : faites moi une robe longue jusqu’à terre, sans queue et me la baillez pour aller à la messe ; et puis au retour, je reprendrai l’habit que j’ai.[...]

Samedi 17 mars : Dans la prison. Fin du procès d’office

LF - Dites-nous si vous vous en rapportez à la détermination de l’Eglise ?
J - Je m’en rapporte à Notre-Seigneur qui m’a envoyée, à Notre-Dame et à tous les benoîts saints et saintes de Paradis. Et m’est avis que c’est tout un de Notre-Seigneur et de l’Eglise, et qu’on n’en doit point faire de difficulté. Pourqoi fait-on difficulté que ce soit tout un ?
LF - Il y a l’Eglise triomphante, où sont Dieu, les saints, les anges et les âmes sauvées. L’Eglise militante, c’est notre saint-père le pape, vicaire de Dieu en terre, les cardinaux, les prélats de l’Eglise et le clergé, et tous bons chrétiens et catholiques. Laquelle Eglise bien assemblée ne peut errer et est gouvernée du Sain-Esprit. Voulez-vous vous en rapporter à l’Eglise militante, c’est à savoir celle qui est ainsi déclarée ?
J - Je suis venue au roi de France de par Dieu, de par la Vierge Marie et de tous les benoîts saints et saintes de paradis, et l’Eglise victorieuse de là-haut, et de leur commandement. Et à cette Eglise-là je soumets tous mes bons faits, et tout ce que j’ai fait ou à faire.
LF - Vous soumettez-vous à l’Eglise militante ?
J - Je n’en répondrai maintenant autre chose.[...]
LF - Savez-vous si sainte-Catherine et sainte-Marguerite haïssent les Anglais ?
J - Elles aiment ce que Notre-Seigneur aime et haïssent ce que Dieu hait.
LF - Dieu hait-il les Anglais ?
J - De l’amour ou haine que Dieu a pour les Anglais, ou de ce que Dieu fera à leurs âmes, je ne sais rien. Mais je sais qu’ils seront boutés hors de France, excepté ceux qui y mourront ; Et que Dieu enverra victoire aux Français, et contre les Anglais.[...]

Mardi 27 mars : Début du procès ordinaire. Thomas de Courcelles lit les soixantes-dix articles du réquisitoire, dans lesquels Jeanne est déclarée :

 "Sorcière, devineresse, fausse prophétesse, invocatrice et conjuratrice des esprits mauvais, superstitieuse, abonnée aux arts magiques ;
Mal pensant en tout ce qui se rapporte à la foi catholique, schismatique, doutant et s’écartant de la foi à propos de l’article Eglise une, sainte, et de quelques autres ;

 Sacrilège, idolâtre, apostate, maldisante et malfaisante, blasphématrice contre Dieu et saints ;

 Scandaleuse, séditieuse, perturbatrice de la paix, empêchant qu’elle ne s’établisse ; excitatrice de la guerre, altérée cruellement de sang humain, en provoquant l’effusion ;

 Impudemment et totalement oublieuse de la décence et des convenances de son sexe, prenant sans rougir l’habit inconvenant et la condition des gens de guerre."

Ces articles furent résumés en douze points : ses apparitions et révélations ; le signe donné au roi ; sa foi en ses visions ; ses prédictions ; son habit d’homme ; ses lettres ; son départ de Vaucouleurs ; sa tentative d’évasion à Beaurevoir ; son assurance d’être sauvée ; la prédiction de Dieu pour le roi de France et la langue française parlée par les saintes ; les hommages rendus par Jeanne à ses apparitions ; son refus de se soumettre à l’Eglise.

Samedi 31 mars : Dans la prison

J - [...] Ce que notre Sire m’a fait faire et commandé et commandera, je ne le laisserai à faire pour homme qui vive, et il me serait impossible de le révoquer. En cas que l’Eglise me voudrait faire faire autre chose au contraire du commandement que je dis à moi fait par Dieu, je ne le ferais pour quelque chose.
C - Si l’Eglise militante vous dit que vos révélations sont illusion ou chose diabolique ou mauvaise chose, vous en rapportez-vous à l’Eglise ?
J - Je m’en rapporte à Notre-Seigneur duquel je ferai toujours le commandement.[...]
C - Croyez-vous point que vous soyez sujette à l’Eglise qui est sur terre, c’est à savoir à notre saint-père le pape, aux cardinaux, archevêques, évêques et autres prélats d’Eglise ?
J - Oui, Notre-Sire Dieu premier servi.

Du 18 avril au 23 mai, ce sont les admonitions charitables : tout au long de ces séances les réponses de Jeanne, qui est malade, sentent la fatigue. Elle est excédée, presque indifférente à la comédie qu’on lui joue. Elle sent la mort proche. Le 9 mai, on la menace de torture.
Elle ajoutera, le 23 mai :
Jeanne - Si j’étais en jugement, et voyais le feu allumé, et le bois préparé, et le bourreau prêt de bouter le feu, et si j’étais dedans le feu, je n’en dirais autre chose et soutiendrais ce que j’en ai dit au procès jusqu’à la mort.

Jeudi 24 mai : Scène de l’abjuration.

On sait que le texte de cette abjuration, tel qu’il figure dans le registre du procès, est beaucoup plus long que celui qui fut lu à Jeanne par l’huissier Jean Massieu et répété, puis signé, par elle ce jour-là. Voici ce qu’elle signa, sans en connaître tout le contenu, la main tenue par le secrétaire du roi d’Angleterre :

"Je, Jeanne, appelée la Pucelle, misérable pécheresse, après que j’ai connu les lacs d’erreur auquel j’étais tenue, et que, par la grâce de Dieu, je sois retournée à notre mère sainte Eglise, afin qu’on voit que, non pas feintement, mais de bon coeur et de bonne volonté je suis retournée à Elle, je confesse que j’ai gravement péché, en feignant mensongèrement avoir eu révélations et apparitions de par Dieu et ses anges, sainte-Catherine et sainte-Marguerite. Et de tous mes dits et faits qui sont contre l’Eglise, je me rétracte et veux demeurer en l’union de l’Eglise sans jamais en départir."

Pendant que l’on dresse ostensiblement un bûcher non loin de là, Jeanne répondra aux exhortations du maître de l’université de Paris et chanoine de Rouen, qui lui fait un sermon, devant un tribunal : "Je m’en rapporte à Dieu et à Notre Saint Père le Pape."
Ce qui en un procès normal eût été suffisant pour interrompre la procédure, car ceux qui faisaent appel au Pape devaient lui être conduits.

Lundi 28 mai : Dans la prison. Procès de relapse et dernier interrogatoire de Jeanne

Cauchon - Quand et pourquoi avez-vous repris l’habit d’homme ?
J - J’ai naguère repris l’habit d’homme et laissé l’habit de femme.
C - Pourquoi l’avez-vous pris ? Qui vous l’a fait prendre ?
J - Je l’ai pris de ma propre volonté. Personne ne m’y a contrainte ; j’aime mieux l’habit d’homme que de femme.
C - Vous aviez juré et promis de ne pas reprendre l’habit d’homme.
J - Je n’ai jamais entendu faire serment de ne pas reprendre l’habit d’homme.
C - Pour quelle cause l’avez-vous repris ?
J - Parce qu’il me semble plus licite et convenable d’avoir l’habit d’homme, autant que je serai avec des hommes, que de porter l’habit de femme. Et en outre, je l’ai repris parce qu’on n’a pas tenu ce qu’on m’avait promis : que j’irai à la messe, et recevrais mon Sauveur, et que je serai mise hors de fers. Les Anglais m’ont fait ou fait faire en la prison beaucoup de torts et de violences quand j’étais vêtue d’habits de femme. (elle pleure) J’ai fait cela pour la défense de ma pudeur[...].
C - Depuis jeudi dernier, avez-vous ouï les voix de sainte-Catherine et sainte-Marguerite ?
J - Oui
C - Que vous ont-elles dit ?
J - Que Dieu me mandait par elles que je m’étais mise en grand danger de perdition, parce que j’avais consenti à faire cette abjuration et renonciation, pour sauver ma vie ; et que je me damnais pour sauver ma vie. Avant ce jeudi, mes voix m’avaient dit ce que je devais faire, et ce que j’ai fait. Elles m’avaient dit, [quand je serai sur] en l’échafaud, de répondre hardiment au prêcheur ; il disait que j’avais fait plusieurs choses que j’ai jamais faites ; Si ce n’était Dieu qui m’avait envoyée, je me damnerais, mais véritablement c’est Dieu qui m’a envoyée...[...] Tout ce que j’ai dit et rétracté, je l’ai fait seulement pour la crainte du feu. [...] Jamais je n’ai fait quelque chose contre Dieu ou contre la foi, quoi que l’on m’ait commandé de rétracter ; et ce qui était contenu dans la cédule d’abjuration, je ne l’ai jamais compris. Je n’entends jamais rien rétracter, si ce n’était qu’il plût à Dieu que je le rétracte. Si les juges le veulent, je reprendrai l’habit de femme. Du surplus je n’en ferai autre chose.
C - Vous êtes donc hérétique obstinée et rechue.
J - Si vous, Messeigneurs de l’Eglise, m’eussiez menée et gardée en vos prisons, par aventure ne me fût-il pas advenu ainsi.
C - Cela entendu, nous n’avons plus qu’à procéder plus outre, selon ce qui est de droit et de raison.

Le mercredi 30 mai, Jeanne était conduite au bûcher sur la place du Vieux marché. Etant dans la flamme, jamais elle ne cessa jusqu’en la fin de clamer et confesser à haute voix le saint nom de Jésus en implorant sans cesse l’aide des saints et saintes du paradis. Et, qui plus est, en rendant son esprit et inclinant la tête, proféra le nom de Jésus en signe qu’elle était fervente en la foi de Dieu.

L’épopée et la personnalité de Jeanne d’Arc ont toujours prêté à discussions - le plus souvent fantaisistes - sur ses origines, sa bonne foi.
Toujours est-il que son procès a bel et bien été mené comme un procès politique.

 
 
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