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Histoire des Français. Assassinat de Louis XVI prémédité par la Franc-Maçonnerie. Révolution française et philosophes des Lumières

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Histoire des Français
L’Histoire des Français : systèmes politiques, contexte social, population, économie, gouvernements à travers les âges, évolution des institutions.
Assassinat de Louis XVI : prémédité
par la Franc-Maçonnerie en 1785
(D’après « La Franc-Maçonnerie et la Révolution française », paru en 1904)
Publié / Mis à jour le jeudi 21 janvier 2016, par Redaction
 
 
Temps de lecture estimé : 7 mn
 
 
 
Quel a été, en 1789, en 1792 et en 1793, le rôle exact de la Franc-Maçonnerie dans la Révolution française ? s’interroge en 1904 l’historien et essayiste Maurice Talmeyr. Rapportant que la Franc-Maçonnerie consiste, dans un premier en temps et en apparence, surtout en bals, en banquets et en démonstrations de bienfaisance, il explique qu’il s’agit d’une simple façade, les philosophes des Lumières, et en tête Voltaire, s’appliquant méthodiquement à « maçonniser » les hautes classes de la société afin de préparer la Révolution et le renversement du régime monarchique, tandis qu’en 1785, un congrès de la Franc-Maçonnerie prémédite l’assassinat du roi Louis XVI...

Les documents authentiques, émanant de la Maçonnerie elle-même, ne peuvent pas, on le comprend, ne pas être rares sur le rôle exact de la Franc-Maçonnerie dans la Révolution française, écrit Maurice Talmeyr. Une société secrète ne serait pas une société secrète, si elle ne prenait pas le plus grand soin de cacher tout ce qui peut renseigner sur elle, et les témoignages positifs, là où par principe on les supprime, ne peuvent nécessairement pas abonder.

Néanmoins, si le véritable témoignage nous fait souvent ainsi défaut, il n’en est pas de même de certains faits, singulièrement saisissants, et qui en arrivent, rapprochés les uns des autres, à produire une lumière presque aussi probante que la lumière même des documents. Or ces faits-là sont innombrables, et la démonstration qui en résulte, c’est qu’il n’est peut-être pas une seule des grandes journées de la Révolution qui n’ait pas été, plus ou moins longtemps à l’avance, machinée et répétée dans les Loges, comme on répète et comme on machine une pièce dans un théâtre...

Suivez donc avec un peu d’attention les faits qui vont vous être exposés, et vous verrez, comme de vos yeux, tout un grand pays violemment transformé, par la plus évidente des conspirations, en une immense et véritable Loge. Vous le verrez jeté par force dans toute une succession d’épreuves maçonniques graduées, dont les premières dissimulaient soigneusement le secret final, mais dont la dernière, dès le début, avait toujours dû être le meurtre du roi, pour aboutir au but suprême et caché, c’est-à-dire à la destruction de la nationalité elle-même !

Avant d’en arriver aux faits particuliers, nous constaterons d’abord un grand fait général, c’est que l’histoire de la Révolution a toujours joui, jusqu’ici, du privilège singulier d’être acceptée comme histoire, sans que personne, au fond, l’ait jamais expliquée. D’après les documents les moins niables, et contrairement à une légende audacieusement fabriquée, la nation française, comme masse populaire, en dehors d’une certaine noblesse, d’un certain clergé et d’une certaine bourgeoisie, était alors profondément catholique et royaliste.

Au moment même où on massacrait les prêtres, où l’on détruisait avec le plus de rage tout ce qui était de la Religion traditionnelle, on avait dû renoncer à interdire les processions dans Paris, où le peuple, comme l’établissent aujourd’hui les témoignages les plus précis, obligeait, en pleine Terreur, les patrouilles de sectionnaires à rendre dans la rue les honneurs au saint Sacrement.

Taine, dans La conquête jacobine, explique qu’alors, si un prêtre portant le viatique passe dans la rue, on voit la multitude « accourir de toutes parts pour se jeter à genoux, tous, hommes, femmes, jeunes et vieux, se précipitant en adoration ». Le jour où la châsse de Saint-Leu est portée en procession rue Saint-Martin, « tout le monde se prosterne : je n’ai pas vu, dit un spectateur attentif, un seul homme qui n’ait ôté son chapeau. Au corps de garde de la section Mauconseil, toute la force armée s’est mise sous les armes. » En même temps, « les citoyennes des Halles se concertaient pour savoir s’il n’y aurait pas moyen de tapisser. Dans la semaine qui suit, elles obligent le comité révolutionnaire de Saint-Eustache à autoriser une autre procession, et, cette fois encore, chacun s’agenouille ».

Quant au culte envers le prince, poursuit Talmeyr, il se prouve par les manifestations mêmes dirigées contre sa personne. Pendant deux ans, la Révolution se fait au cri de Vive le Roi ! Ensuite, la plupart même des hommes et des femmes d’émeute, soldés pour outrager le souverain, sont tout à coup ressaisis, en face de lui, de l’insurmontable amour de leur race, pour le descendant de ses monarques. Toute leur exaltation, en sa présence, tourne, comme en octobre 1789, en respect et en tendresse.

Que voit-on, au retour de Varennes, pendant que la famille royale prend son repas ? On voit le député révolutionnaire Barnave se tenant respectueusement debout derrière le roi, et le servant comme un valet de chambre ! Et ce sentiment catholique et royaliste, presque général à cette époque, se confirme, de façon certaine, par les chiffres mêmes des élections. Dès 1790, les ennemis de la Religion et de la Monarchie ne sont plus élus partout que par le dixième, puis par le quinzième, puis par le vingtième des électeurs. Taine constate, à Paris, aux assemblées primaires de 1791, un an déjà avant le 10 août, plus de soixante-quatorze mille abstenants sur quatre-vingt-un mille deux cents inscrits !

N’est-il pas rigoureusement vrai, en conséquence, que la Révolution, considérée comme mouvement national, ne peut pas s’expliquer ? On comprend une nation comme l’Amérique, chez qui la domination anglaise est impopulaire, et qui s’en débarrasse. On ne comprend pas une nation qui a la Religion et la Monarchie dans le sang, qui les veut, qui ne veut qu’elles, et qui les renverse avec fureur. Et cette Révolution-là est tellement inexplicable que tous les historiens, quels qu’ils soient, renoncent, en réalité, à l’expliquer, car les explications par la « fatalité », la « Providence », la « force des choses », le châtiment divin, ou l’ « anarchie spontanée », les seules qu’on nous ait encore données, ne sont pas des explications.

Plus loin, notre essayiste s’interroge : où en était, au dix-huitième siècle, la Franc-Maçonnerie en France ? Elle y daterait, exactement, d’après ses propres annuaires, de soixante-quatre ans avant la Révolution, de 1725, et ses deux premiers grands maîtres auraient été deux Anglais, lord Derwentwater, et lord Harnouester. Elle est ensuite présidée par un grand seigneur français, le duc d’Antin, puis par un prince du sang, Louis de Bourbon, comte de Clermont, puis, de 1771 à 1793, par le duc de Chartres, plus tard duc d’Orléans, et, plus tard encore, Philippe-Égalité (père de Louis-Philippe, roi des Français de 1830 à 1848).

Comme en témoigne la liste de ses grands maîtres, la Franc-Maçonnerie, dans la période immédiatement antérieure à la Révolution, ne cesse pas de suivre, malgré ses crises, une marche ascendante rapide. Elle devient à la mode, finit par faire fureur et le Grand Orient en arrive à créer ces fameuses Loges d’adoption où les femmes étaient admises. Les récipiendaires femmes, nous apprend M. d’Alméras, auteur d’une histoire de Cagliostro, et qui ne semble l’ennemi ni de Cagliostro, ni des Loges, sont des « actrices, des danseuses, des bourgeoises ou des grandes dames sans préjugés ».

Alors, en résumé, la Franc-Maçonnerie, au moins en apparence, consiste surtout en bals, en banquets, en démonstrations de bienfaisance. En 1775, la duchesse de Bourbon recevait le titre de grande maîtresse de toutes les Loges d’adoption de France, le duc de Chartres l’installait lui-même dans ce pontificat féminin, au milieu de fêtes magnifiques, et on faisait une quête, à la fin du banquet, en faveur « des pères et mères retenus en prison pour n’avoir pas payé les mois de nourrice de leurs enfants ».

Louis XVI. Peinture de Jean-Marie Ribou

Louis XVI. Peinture de Jean-Marie Ribou (1744-1817)

Telle est, pendant toute cette période, la façade de la Franc-Maçonnerie. Elle est à la fois somptueuse et amusante, avec la promesse d’un mystère, probablement inoffensif, et peut-être même agréable, à l’intérieur de la maison. Sous prétexte de philanthropie, on s’y divertit énormément. On s’y mêle entre gens de la bonne société et de la moins bonne, dans l’illusion d’une égalité sociale qui ne manque pas toujours de piment. On se donne la sensation d’une vie en double où l’on s’appelle de noms de guerre, en échangeant des mots de passe. On se procure le petit frisson d’attendre quelque chose de secret qui sera peut-être défendu.

On joue en grand, en un mot, à ces jeux innocents qui ne le sont pas toujours, et un prodigieux enjouement jette toute la société dans ce jeu-là. Les plus honnêtes gens s’en mettent, et Marie-Antoinette écrit, à cette époque, à Mme de Lamballe : « J’ai lu avec grand intérêt ce qui s’est fait dans les loges franc-maçonniques que vous avez présidées, et dont vous m’avez tant amusée. Je vois qu’on n’y fait pas que de jolies chansons, et qu’on y fait aussi du bien. »

N’existait-il donc, cependant, aucun motif de se méfier ? Si, et certains Etats, dès le milieu du dix-huitième siècle, chassaient assez rudement ces francs-maçons qui s’attachaient en France, avec une si extraordinaire activité, à amuser les Français, à les faire danser, à chatouiller leur frivolité. Le pape Clément XII, en outre, avait lancé contre eux une bulle assez suggestive, dans laquelle il les comparait « aux voleurs qui percent la maison ». On pouvait donc, dès ce moment-là, ne pas déjà voir dans les Loges de simples lieux d’amusements, comme la malheureuse Marie-Antoinette.

Une société « maçonnisée », c’est donc bien celle qui précède immédiatement la Révolution. Elle s’est « maçonnisée » pour s’amuser, mais elle s’est « maçonnisée ». C’est l’atmosphère en dehors de laquelle il ne faut pas même essayer de voir cette époque, sous peine de n’en rien voir de vrai. Et Talmeyr d’expliquer que le « maçonnisme », dès trente ou quarante ans avant 1789, est si bien déjà devenu l’ambiance générale, que les philosophes, en réalité, ne répandent pas simplement leur philosophie par leurs écrits, mais se conjurent maçonniquement pour la répandre, et dans le sens rigoureux du mot...

Ecoutez Voltaire dans sa correspondance : « Il faut, écrit-il, agir en conjurés, et non pas en zélés... Que les philosophes véritables fassent une confrérie comme les Francs-Maçons... Que les mystères de Mithra ne soient pas divulgués... Frappez, et cachez votre main... »

En 1789, entre les atrocités de la prise de la Bastille et celles des massacres d’octobre, un certain Leroy, lieutenant des chasses royales, s’écriait avec des sanglots, lors d’un dîner qui avait lieu chez d’Angevilliers, intendant des Bâtiments du Roi : « J’étais le secrétaire du Comité à qui vous devez cette Révolution et j’en mourrai de douleur et de remords !... Ce Comité se tenait chez le baron d’Holbach... Nos principaux membres étaient d’Alembert, Turgot, Condorcet, Diderot, La Harpe, et ce Lamoignon qui s’est tué dans son parc !... La plupart de ces livres que vous avez vus paraître depuis longtemps contre la religion, les mœurs et le gouvernement étaient notre ouvrage, et nous les envoyions à des colporteurs qui les recevaient pour rien, ou presque rien, et les vendaient aux plus bas prix... Voilà ce qui a changé ce peuple, et l’a conduit au point où vous le voyez aujourd’hui... Oui, j’en mourrai de douleur et de remords... »

Les lettres de Voltaire en date de mars 1763 confirment ces faits : « Pourquoi les adorateurs de la raison, écrivait-il alors à Helvetius, restent-ils dans le silence et dans la crainte ? Qui les empêcherait d’avoir chez eux une petite imprimerie et de donner des ouvrages utiles et courts dont leurs amis seraient les seuls dépositaires ? C’est ainsi qu’en ont usé ceux qui ont imprimé les dernières volontés de ce bon et honnête curé Meslier... » Et il ajoute : « On oppose ainsi, au Pédagogue chrétien et au Pensez-y bien, de petits livres philosophiques qu’on a soin de répandre partout adroitement. On ne les vend point, on les donne à des personnes affidées qui les distribuent à des jeunes gens et à des femmes... »

En réalité, poursuit Maurice Talmeyr, la conjuration philosophique n’avait que très peu perverti le peuple, et par une excellente raison, c’est que le peuple ne savait pas lire. Elle avait surtout empoisonné les hautes classes. Mais cette philosophie qui est une conjuration, et qui machine, dans le mystère, avec des masques et des trahisons, l’application de ses préceptes, n’est-elle pas, pour une époque, toute une caractéristique ?

Notre essayiste rapporte la tenue à Wilhelmsbad (Allemagne), en 1781, d’un grand congrès de la Franc-Maçonnerie universelle, où les délégations arrivaient en masse, de France, de Belgique, de Suède, d’Italie, d’Angleterre, d’Espagne, d’Amérique, de tous les points du globe ! Est-il exact, comme on l’a dit, qu’on ait arrêté, dix ans d’avance, dans cette tenue de Wilhemsbad, la mise à mort de Louis XVI et presque toute la Terreur ? On peut affirmer, dans tous les cas, que, trois ans plus tard, la mort du roi de Suède et celle de Louis XVI étaient décidées dans une tenue de Francfort, en 1785, comme l’atteste une lettre du cardinal Mathieu, archevêque de Besançon :

« Il y a dans mon pays, écrit le cardinal Mathieu, un détail que je puis vous donner comme certain. Il y eut à Francfort, en 1785, une assemblée de Francs-Maçons où furent convoqués deux hommes considérables de Besançon, qui faisaient partie de la Société, M. de Reymond, inspecteur des postes, et M. Maire de Bouligney, président du Parlement. Dans cette réunion le meurtre du roi de Suède et celui de Louis XVI furent résolus. MM. de Reymond et de Bouligney revinrent consternés, en se promettant de ne jamais remettre les pieds dans une Loge, et de se garder le secret. Le dernier survivant l’a dit à M. Bourgon... Vous avez pu en entendre parler ici, car il a laissé une grande réputation de probité, de droiture et de fermeté parmi nous. Je l’ai beaucoup connu, et pendant bien longtemps, car je suis à Besançon depuis quarante-deux ans. »

Ce qu’on sait aussi, et avec certitude, c’est que la réunion de Wilhemsbad avait un épilogue dans le genre des révélations désespérées du malheureux M. Leroy. Le comte de Virieu, sur qui les Illuministes avaient cru pouvoir compter, et qui avait fait partie de la délégation française, revenait terrifié du Congrès, déclarait quitter la secte, et disait au baron de Gilliers : « Je ne vous révélerai pas ce qui s’est passé ; ce que je puis seulement vous dire, c’est que tout ceci est autrement sérieux que vous ne pensez. La conspiration qui se trame est si bien ourdie qu’il sera pour ainsi dire impossible à la Monarchie et à l’Église d’y échapper. »

Enfin, c’est également encore à cette époque que l’écrivain Cazotte, qui avait appartenu aux Illuministes français (alliés à la Franc-Maçonnerie), faisait un soir, dans un dîner, cette soi-disant prophétie dont la réalisation devait, évidemment, comporter une part de coïncidence, mais qui était aussi, avant tout, comme celles de Cagliostro, et sans aucun doute possible, de l’information anticipée. Il disait aux convives qui s’en amusaient beaucoup, trois ou quatre ans avant 1789 :

« Vous, Monsieur Bailly, et vous, Monsieur de Malesherbes, vous mourrez sur l’échafaud... Vous, Madame, on vous conduira en charrette, les mains liées derrière le dos, à la place des exécutions. — Mais, Monsieur le prophète, lui répondait en riant la duchesse de Grammont, ne me laisserez-vous pas au moins un confesseur ? — Non, Madame, non, lui répondait Cazotte énigmatique, non, vous n’en aurez pas, et le dernier supplicié qui en aura un, ce sera le roi !... », rapporte Louis Blanc dans son Histoire de la Révolution française.


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